Afrique en marche

Drones: déception pour Kiev, mais option pour l’Afrique, selon l’analyste Xavier Moreau

Les drones ont prouvé à plusieurs reprises leur efficacité lors de conflits. Cependant, il ne faut pas les surestimer, comme l'a fait l'armée ukrainienne, avertit dans L’Afrique en marche Xavier Moreau, analyste politico-stratégique. D’un autre côté, les drones civils pourraient faire une grande différence dans le contexte africain.
Sputnik
Depuis le 24 février 2022, date du début de l’opération militaire spéciale russe en Ukraine, l’importance des drones ne fait que se confirmer sur le champ de bataille. Entre 2019 et 2020, les effets tactiques et psychologiques des véhicules aériens sans pilote ont été observés avec force et à plusieurs reprises en Syrie, en Libye et au Haut-Karabakh. Ainsi, peut-on considérer le drone comme une arme stratégique capable de faire basculer le résultat d’un conflit de haute intensité, comme le laissent penser beaucoup d’experts?
"Les médias occidentaux ont été impressionnés par ce qui s’est passé en 2020, au Haut-Karabakh, durant le conflit militaire qui avait opposé l’armée azerbaïdjanaise à l’armée arménienne. En effet, les drones de construction turque de type Bayraktar TB-2 avaient donné un avantage certain aux forces azerbaïdjanaises. Néanmoins, il faut bien constater que le drone est une arme du fort au faible. L’Arménie n’avait pas une défense antiaérienne sophistiquée", affirme à Radio Sputnik Afrique Xavier Moreau, fondateur et directeur du centre d’analyse politico-stratégique Stratpol.
Et de rappeler qu’"alors que le conflit au Haut-Karabakh est actuellement gelé, les Bayraktar TB-2 turcs ont été réorientés vers l’Ukraine, où les spécialistes occidentaux, notamment ceux des plateaux télévisés, pensaient que le même exploit pouvait être réédité face à l’armée russe. Or, il est évident que la déception a été très grande à cause des capacités aériennes et antiaériennes des forces aérospatiales russes. Les drones livrés à l’Ukraine ont été littéralement abattus par les DCA russes".
Pour M.Moreau, "les drones peuvent effectivement être une arme d’appoint dans un conflit de haute intensité, pouvant être utilisée dans la reconnaissance, la guerre électronique et l’orientation des frappes à l’intérieur des lignes ennemies, mais en aucun cas une arme stratégique à même de changer ou de décider de l’issue d’un conflit de haute intensité face à une armée hautement qualifiée et équipée comme l’armée russe".
Dans le bassin du lac Tchad et au Sahel, les Américains et les Français ont mis en service depuis 2014 des bases de drones pour lutter contre les mouvements djihadistes Boko Haram*, Al-Qaïda* au Maghreb islamique et d’autres groupes terroristes. Selon l’interlocuteur de L’Afrique en marche, "l’utilisation des drones de reconnaissance ou d’attaque dans la lutte antiterroriste, dans la région du Sahel, face à un ennemi qui ne peut pas se doter de moyens antiaériens peut effectivement être efficace".
Cependant, c'est dans le contexte de l’Afrique, avec ses vastes étendues et des régions difficiles à atteindre, que les drones sont particulièrement importants pour un usage civil. Ils peuvent être utilisés pour livrer des médicaments, dans l'agriculture de même que pour la lutte contre les incendies.
En même temps, indique Xavier Moreau, "il faut également prendre en considération le danger que ces mouvements terroristes s’équipent de drones destinés à un usage civil, pour les utiliser dans la reconnaissance. À ce titre, l’arrivée de combattants djihadistes aguerris de Syrie et d’Irak au Sahel, particulièrement dans la région des trois frontières partagées entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger, va constituer de sérieux problèmes aux pays de la région".
* Organisation terroriste interdite en Russie
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