"Infliger des sanctions à la Russie, c'est les infliger à l'Afrique", selon un responsable ivoirien

En Côte d’Ivoire, les boulangers ont fait grève contre la flambée continue des prix de la farine et du pain. Au micro de Sputnik, des analystes ivoiriens désignent les sanctions occidentales contre la Russie comme responsables de cette crise et s’expriment pour l’élargissement de la coopération avec Moscou.
Sputnik
Imposées par l’Occident, les sanctions antirusses ont provoqué la hausse des prix et une crise alimentaire sur tout le continent africain, ont déclaré des experts ivoiriens dans le domaine du commerce, dans un entretien accordé à Sputnik Afrique.
"L’Occident ne veut pas le bien de l’Afrique. Infliger des sanctions à la Russie, c'est infliger des sanctions à l'Afrique parce que la Russie peut voler de ses propres ailes", a déclaré Henri Doué Tai, président de la Chambre de commerce ivoiro-russe.
Il a également rappelé que les navires de céréales, expédiés via la mer Noire, n’avaient finalement pas atteint l’Afrique, mais l’Europe, à son profit.
Visant la Russie, ces restrictions "se sont avérées inefficaces, pour la simple raison que les prix du gaz, de l'essence, de l'électricité ont quasiment doublé en Europe", poursuit un économiste ivoirien, spécialiste du développement durable.
"Nous pouvons clairement dire que les sanctions sont une des raisons de cette flambée des prix", a noté le docteur Nahoua Basile Sekongo.

Causes de la grève

Face à l’inflation, le gouvernement ivoirien a décidé d’augmenter, il y a un an, le prix de la baguette standard, fixé par l’État. Elle est passée ainsi de 150 à 200 francs CFA (22 à 30 centimes d'euros). Entre-temps, le prix de la farine augmente tant qu’il est devenu impossible de l’absorber, selon le président du Haut Patronat de la boulangerie et de la pâtisserie du pays, Amadou Coulibaly.
Une nouvelle hausse de près de 20% a suscité un mécontentement de nombreux boulangers et pâtissiers du pays, qui ont éteint leurs fours les 6 et 7 février. En effet, la farine a augmenté, passant de 21.750 Fcfa le prix usine (du sac de 50 Kg) à 25.500 F CFA, soit une progression de 3.750 Fcfa, toujours d’après M.Coulibaly.
"L'Afrique de l'Ouest en général et la Côte d'Ivoire en particulier dépend du blé russe et ukrainien. À cela, il faut ajouter l'augmentation récente du prix de l'essence qui pourrait être un facteur à prendre en compte, car elle devrait agir sur les coûts de production", a expliqué l’économiste Sekongo.
Cette flambée des prix fait d’ailleurs craindre une crise alimentaire, indique-t-il. L’analyste rappelle que déjà plus de "20 millions de personnes ne mangeraient pas à leur faim" rien qu’au Sahel et en Afrique de l'Ouest, selon les chiffres du FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture).

"Un partenariat gagnant-gagnant avec la Russie"

Sur fond de cette situation instable, le partenariat russo-ivoirien devrait s’élargir, estiment les experts interrogés par Sputnik.
"La Côte d'Ivoire doit accepter de briser les liens historiques avec la France et les États-Unis pour former un partenariat gagnant-gagnant avec la Russie qui est le plus grand pays au monde et qui regorge d'énormes ressources minérales", a déclaré M. Sekongo.
Et d’ajouter que "la Russie a son rôle à jouer dans le développement de la Côte d'Ivoire et vice versa". D’ailleurs, le volume des échanges entre les deux pays est déjà en hausse. En 2021, il était de 387 millions de dollars contre 95 millions en 2020, "soit une augmentation de près de 33%", a souligné l’analyste.
De son côté, le président de la Chambre de commerce ivoiro-russe, a mis en exergue les "relations très larges dans le domaine commercial, industriel, économique, humanitaire, agricole, social, culturel" entre les pays, et a tablé sur leur renforcement.
Discuter