Un an après l’expulsion par les autorités maliennes de transition de l’ambassadeur français, Abdoulaye Diallo, analyste politique malien, retrace pour Sputnik les enjeux de la quête de souveraineté.
Le 31 janvier 2022, l’ambassadeur de France a été sommé par les autorités maliennes de quitter Bamako sous 72 heures. À l’origine de cette expulsion, les propos du ministre français des Affaires étrangères, disant que le gouvernement malien est "illégitime" et qu’il prend des décisions "irresponsables".
"Les Maliens considèrent ces militaires comme un espoir pour la refondation du Mali parce que les Maliens se sont dit qu'il est temps de faire un changement, de donner le pouvoir aux militaires parce que ce ne sont pas des personnes tombées du ciel. Ce sont des Maliens comme nous également", insiste Abdoulaye Diallo, chargé de la communication du collectif pour la refondation du Mali COREMA.
Pour lui, le chef de la diplomatie française a tenu "ces propos écœurants" à cause "du refus de nos autorités d'être manipulées par la France".
Failles sécuritaires imputées à Paris
Le bilan de la présence française au Mali est insignifiant, pour l’activiste. "Barkhane n'a pas pu neutraliser plus de 500 terroristes en dix ans", assure-t-il, tandis que "les soldats maliens, sur la base d'informations crédibles, ont pu neutraliser plus de 300 terroristes en une seule journée à Moura".
La France, elle, ne communique d’ailleurs pas sur le nombre de présumés djihadistes tués au Sahel depuis le lancement des opérations Serval et Barkhane.
Abdoulaye Diallo qualifie Barkhane de "force d'occupation au sens du mot".
"La force Barkhane soutenait les terroristes. D'après certaines informations de source sûre, Barkhane était une force qui savait où se trouvaient les terroristes, mais qui les formait, qui apportait des appuis logistiques aux terroristes", assène-t-il.
Coopération avec la Russie
L’activiste prône la poursuite de la coopération sécuritaire avec la Russie en notant que cette aide "a été vraiment un espoir, un espoir qui a permis aujourd'hui aux forces maliennes de monter en puissance".
"Avec la Russie, vous avez vu que le Mali a pu acquérir des outils de défense, des hélicos, des avions de chasse et d'autres équipements militaires pour assurer sa défense et assurer la sécurité des personnes et des biens", poursuit-il, admettant toutefois que "l'instabilité règne toujours" sur le territoire.
Il souligne la différence d’approches française et russe en Afrique. Ainsi, "la France n'a jamais été amie avec le Mali, ni avec le Burkina Faso, ni avec un autre pays africain. La France ne veut que ses intérêts". Par contre, "la Russie aussi a besoin des intérêts donc, mais à la richesse de ses intérêts, elle ne vient pas s'imposer et elle ne s'ingère pas dans les affaires internes des autres États".
Le Burkina Faso suit le Mali
Voisin du Mali, le Burkina Faso avait demandé fin 2021 à Paris le remplacement de son ambassadeur, qui selon les autorités de transition a tenu des propos jugés inacceptables. Fin janvier le diplomate en question, Luc Hallade, a été rappelé par Paris pour "consultations".
"La presse dit que le Burkina Faso est en train de suivre la voie du Mali dans le cadre du divorce avec la France. Le Burkina a parfaitement raison", prétend Abdoulaye Diallo.
Fin janvier, le gouvernement burkinabè a demandé le départ des militaires français dans un délai d'un mois, sans pour autant vouloir rompre diplomatiquement avec Paris.