Le chef de la diplomatie malienne a rétorqué avec véhémence à une ministre française qui avait exhorté le Mali d’être reconnaissant à Paris pour sa participation militaire au pays.
La secrétaire d’État française en charge du Développement et de la Francophonie, Chrysoula Zacharopoulou, a estimé que c’est justement l’intervention des troupes françaises qui "a empêché l’effondrement du Mali et l’installation d’un califat, comme au Levant". Selon ses calculs, 48 militaires français sont morts au Mali, et 59 dans la région du Sahel.
"Elle a parlé de 50, mais le Mali ne compte même plus ses morts civils ou militaires […]. Elle dit aussi que la France se bat pour la souveraineté des pays africains et qu’elle n’entend pas se substituer aux armées africaines", a réagi Abdoulaye Diop en marge du Forum international de Dakar sur la Paix et sécurité.
Il a ensuite cité un exemple démentant ce constat sur la présumée non-substitution de l’armée malienne:
"Quand la France est venue pour aider le Mali à libérer notre territoire en 2013, il y a trois grandes régions dans le nord du Mali, et on a libéré ensemble Gao et Tombouctou. Mais à 50 km de Kidal, l’armée française a stoppé net l’armée malienne en disant que vous ne pouvez pas entrer à Kidal sur notre propre territoire. Aujourd’hui 10 ans après, l’armée malienne et l’État malien ne sont pas présents à Kidal. Depuis 10 ans, elle travaille au nord du Mali avec des groupes rebelles. Elle a choisi ses amis dans le pays. Ce n’est pas normal", a pesté Abdoulaye Diop.
La situation déstabilisée par la France
Le ministre est aussi revenu sur les propos de Mme Zacharopoulou sur le combat mené par Bamako pour sa survie:
"Je crois qu’un régime qui a une telle assise populaire n’a pas à s’inquiéter pour sa survie. La survie pour laquelle le Mali se bat, c’est la survie du Mali en tant qu’État. Et la survie de l’État malien a été menacée parce que la France, à la tête d’une coalition internationale, est intervenue en Libye pour une opération. Jusqu’à aujourd’hui, on ne connait pas quel était l’objectif recherché. Qui est-ce qui a été fait pour gérer le service après-vente et éviter qu’une opération étrangère ne finisse par une déstabilisation de l’ensemble de la région", a noté M.Diop.
"Aujourd’hui, c’est l’intervention en Libye qui est la cause de la déstabilisation de toute l’Afrique", conclut-il.
Politique de doubles standards
Enfin, il a mis en valeur la stratégie deux poids deux mesures, exercée par la communauté internationale. Pour appuyer ses propos, il a rappelé que l’objectif de 423 millions d’euros pour le G5 Sahel n’avait pas été atteint en six ans, alors qu’au moins 8 milliards de dollars avaient été débloqués en quelques jours.