Crise ukrainienne 2021

Les Américains "dans une situation inédite" face à la crise ukrainienne

La vice-Présidente US Kamala Harris se retrouve à la tête d’une diplomatie américaine compliquée puisque "personne n’ira se faire tuer pour Kiev", explique l’avocat Olivier Piton pour Le Désordre mondial.
Sputnik
À en croire la Maison-Blanche, la Russie pourrait "attaquer" l’Ukraine à tout moment. Mais si la situation est aussi grave que le prétend Joe Biden, pourquoi, en ce moment si critique, a-t-il délégué la direction de la diplomatie à Kamala Harris, sa vice-Présidente?
Avec une cote de popularité de 39%, selon une synthèse de récents sondages effectuée par RealClearPolitics, on comprend que Kamala Harris voudrait s’aventurer en dehors des États-Unis. Mais pourquoi envoyer quelqu’un d’aussi clivant au sein même du Parti démocrate pour tenter une conciliation dans ce que Washington décrit comme la toute dernière chance d’éviter une guerre?
À moins, bien sûr, que de provoquer un conflit avec la Russie –et non de l’empêcher– n’ait été la vraie raison d’envoyer la vice-Présidente américaine à la Conférence de Munich sur la sécurité pour s’adresser aux représentants mondiaux et discuter avec Stoltenberg, secrétaire général de l’Otan.
"Nous voyons la Russie diffuser de la désinformation, des mensonges et de la propagande. Néanmoins, dans un effort délibéré et coordonné, nous sommes ensemble en train de: un, exposer la vérité et, deux, parler d’une seule voix", a déclaré Kamala Harris lors de son allocution. Le "nous" de majesté, c’est bien sûr l’Otan, dont Harris dissimule volontairement les dissensions. Les pays européens sont en effet divisés sur la stratégie américaine dans le conflit ukrainien.
Le chef de l'Otan ne voit aucune violation de la promesse de ne pas s'étendre à l'est
Dans quelle mesure l’"unité" à laquelle Harris a constamment fait référence existe-t-elle vraiment? Se pourrait-il qu’elle soit aussi déconnectée des affaires mondiales et de la volonté des alliés des États-Unis qu’elle l’est de l’électorat américain?
Olivier Piton, président de la Commission des lois à l’assemblée des Français de l’étranger, réagit à la gestion américaine, vue depuis Washington:
"On est dans une situation complètement inédite du côté de l’administration américaine sur la façon de traiter une crise aiguë. On a un dévoilement de la stratégie de l’adversaire. Un Président qui n’est pas en première ligne. Des annonces quasiment toutes les 48h que demain l’invasion va avoir lieu. Et personne, y compris du côté américain, n’ira se faire tuer pour Kiev."
L’auteur du livre Kamala Harris: La pionnière de l’Amérique (Éd. Plon) Olivier Piton justifie la logique de Washington, qui répète sur tous les tons qu’une attaque russe contre l’Ukraine est imminente:
"L’administration Biden affirme qu’en dévoilant volontairement la volonté d’invasion de Poutine, c’est un moyen de le piéger et de l’empêcher d’agir puisque l’on révèle sa stratégie à l’avance."
Le spécialiste en politique américaine pointe du doigt le paradoxe de l’approche US:
"Si c’est grave, pourquoi est-ce que ce n’est pas le Président lui-même qui est à la manette? Et si ce n’est pas grave, pourquoi ces messages volontairement extrêmement alarmistes?"
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