Guinée équatoriale: le projet d’une base militaire chinoise inquiète Washington

D’après le Wall Street Journal, la Chine envisage d'établir une base militaire permanente en Guinée équatoriale. Alors que Washington voit d’un mauvais œil ce positionnement de Pékin, sur la côte atlantique, pour certains spécialistes, ce projet rentre dans le cadre des nouvelles routes de la soie "pour remodeler la géopolitique mondiale".
Sputnik

"Dans son vaste projet géopolitique, géostratégique et géoéconomique des nouvelles routes de la soie, les bases militaires constituent des pions du puzzle de l'expansionnisme chinois. Le contrôle du trafic maritime et la sécurisation du commerce mondial voulu par Pékin placent le golfe de Guinée, ouvert sur l'océan Atlantique, au cœur de cette équation stratégique. Ceci peut justifier ce projet d’installation annoncée de cette base militaire en Guinée équatoriale", décrypte pour Sputnik, Hippolyte Éric Djounguep, chercheur associé à Trends Research and Advisory et consultant en géopolitique.

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En effet, à en croire le Wall Street Journal, citant le 6 décembre des rapports secrets des services de renseignement américains, la Chine envisage d'établir sa première base militaire permanente sur l’océan Atlantique, précisément en Guinée équatoriale. Si ce projet est concrétisé, il sera installé à Bata, qui dispose déjà d'un port commercial en eau profonde construit par la Chine sur le golfe de Guinée. Il s’agirait après Djibouti, de la deuxième base militaire de l’Empire du Milieu sur le continent africain.

Les craintes de Washington

Cependant, le choix de Pékin d’installer cette base sur la côte Atlantique africaine, considérée comme la chasse gardée américaine, est vu d’un mauvais œil par Washington. Selon le Wall Street Journal, l’inquiétude principale des Américains ici, c’est que "les navires de guerre chinois puissent à terme se réarmer et se rééquiper en face de la côte est des États-Unis. Une menace qui déclenche l'alarme à la Maison-Blanche et au Pentagone". Pour des analystes comme Hippolyte Éric Djounguep, il faut aller plus loin: "le gigantesque projet chinois des nouvelles routes de la soie, lancer pour remodeler le contexte géopolitique, en faisant de la Chine un acteur majeur de la mondialisation en marche, pèse de plus en plus comme une menace pour les États-Unis".
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"Washington voit en ce projet, une conquête du monde par la Chine. Par la construction des ports, des aéroports, des chemins de fer, des autoroutes et des bases militaires dont le but est d'améliorer les voies de communication, favoriser la coopération entre les États membres, sécuriser les approvisionnements chinois des matières premières et favoriser l'exportation des biens chinois dans le monde. Ce projet reconfigure la carte du monde et place la Chine au centre", commente le géostratège.

Une ambition qui fait perdre le sommeil à Washington et dans la foulée, les deux grandes puissances tentent chacune de leur côté, de manœuvrer en sa faveur. D’ailleurs en octobre dernier, Malabo a constitué l'une des étapes du déplacement africain de John Finer, le conseiller principal adjoint à la sécurité nationale américaine. Si officiellement il y était pour aborder avec le Président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema des questions liées à la sécurité maritime et à la pandémie, pour le Wall Street Journal, il était question sous cape de pousser Malabo à rejeter l’offre de Pékin.

Washington, partenaire stratégique de Malabo?

Comme une contre-offensive, une semaine après cette tournée de John Finer, le Président chinois Xi Jinping a lors d'une conversation téléphonique avec le président de la Guinée équatoriale, réitéré son soutien vis-à-vis de Malabo "dans la sauvegarde de sa souveraineté nationale et promet de fournir le meilleur soutien possible pour son développement économique".
Si les relations bilatérales entre Malabo et Pékin se sont bien développées ces dernières années dans plusieurs domaines infrastructurels comme sanitaire, il reste que Washington demeure un partenaire stratégique de la Guinée équatoriale notamment, dans la sécurisation maritime. Cependant, souligne Hippolyte Éric Djounguep, dans "la logique de la diversification de ses partenaires bilatéraux et stratégiques ", Malabo peut trouver bénéfique de s’ouvrir à d’autres horizons, surtout que "les relations entre les deux pays se sont un peu crispées à cause du refus de Washington de voir se perpétuer une dynastie Obiang au pouvoir. Une question qui n’est pas inscrite à l’ordre du jour dans ses rapports avec la Chine".
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"Seulement en opérant ainsi Malabo s’incruste dans la lutte d’influence entre l'Occident et l'Orient. Il faudra naturellement faire des choix: soit de rester sous cette tutelle américaine ou de bâtir ce pont avec Pékin. Et l'un ou l'autre ne sera pas sans conséquences. Car de gros intérêts sont en jeu", analyse le géostratège.

Depuis que la Guinée équatoriale est devenue un Eldorado pétrolier, la petite contrée autrefois ignorée est très souvent sous le feu des projecteurs, et convoitée depuis les quatre coins du monde. Au-delà de sa manne pétrolière, son ouverture sur le golfe de Guinée lui octroie une position stratégique dans la bataille des grandes puissances pour le contrôle de la région.
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