En Algérie, Tamanrasset, futur hub aérien africain: une annonce «révolutionnaire»?

Les autorités algériennes veulent profiter de la position géographique de Tamanrasset pour en faire un hub dédié au transport de passagers et de fret en Afrique. Selon un expert de l’aérien approché par Sputnik, un tel projet implique la création d’une nouvelle compagnie aérienne à capitaux mixtes qui desservira les principales villes du continent.
Sputnik

«Mesdames et messieurs, nous entamons notre descente sur l’aéroport international de Tamanrasset. Les passagers en correspondance pour Addis-Abeba, Brazzaville, N’Djaména et Le Caire sont priés de se diriger vers la zone de transit.» Cette annonce, les personnes qui voyagent en Afrique pourront peut-être l’entendre dans quelques années, à Tamanrasset.

En effet, la capitale du Hoggar, située à 2.000 kilomètres au sud d’Alger, a été choisie par les autorités algériennes pour accueillir le futur hub aérien destiné au continent africain. L’annonce a été faite par le Président Abdelmadjid Tebboune lors du Conseil des ministres qui s’est tenu le dimanche 4 octobre dernier.

«Le Président de la République a donné des orientations pour la préparation d’une plateforme pour un hub aéroportuaire de l’Algérie à Tamanrasset en collaboration avec les spécialistes et experts pour accéder aux marchés africains», indique un communiqué de la présidence.

Cette déclaration entre dans le cadre d’un nouveau plan de développement du secteur de l’aérien que le ministère des Transports est tenu de mettre en œuvre.

Situation stratégique

Le choix de Tamanrasset n’est pas fortuit. Cette ville du Sahel, située à la porte de l’Afrique de l’Ouest, dispose d’atouts solides pour devenir une plateforme aéroportuaire de premier plan. La création d’un hub –espace où les passagers en transit pourront se restaurer, dormir et faire des achats– nécessitera cependant la construction d’une nouvelle infrastructure. L’aéroport international existant Aguenar–Hadj Bey Akhamok, à usage civil et militaire, n’est pas adapté à un tel projet.

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Lamine Chouiter, PDG de Melya Global Services, une société basée à Dubaï, est un homme d’affaires algérien qui a participé à l’implantation de compagnies aériennes dans les pays du Golfe. Il explique à Sputnik que l’Algérie doit profiter de la position stratégique de Tamanrasset pour développer son économie. Pour illustrer les atouts de «Tam», il cite l’exemple d’un passager qui souhaite aller de Dakar à N’Djamena. «Pour ne faire qu’une seule escale, notre voyageur doit actuellement transiter par Paris. Un périple harassant de 24 heures en moyenne qui coûte plus de 1.000 euros. Une étape dans le Sud algérien raccourcira l’itinéraire de plusieurs heures pour un tarif largement inférieur.»

Il regrette cependant que ce projet ne soit pas accueilli comme il se doit par les milieux économiques algériens.

«La création d’un hub aérien dans la région du Hoggar est certainement un des plus grands projets qui sera lancé en Algérie. J’ai l’impression que l’annonce du Président Abdelmadjid Tebboune n’a pas été appréciée à sa juste valeur dans son propre pays. Elle est pourtant révolutionnaire. Des amis de plusieurs États africains, des personnalités politiques et des hommes d’affaires ont accueilli avec joie cette déclaration», affirme Lamine Chouiter.

Air Algérie out

Selon lui, le développement du secteur de l’aérien peut faire gagner des points de croissance à l’Algérie et créer une dynamique dans une grande partie de l’Afrique du Nord et subsaharienne en participant au règlement de la problématique de la mobilité dont souffre le continent. Pour Lamine Chouiter, ce hub nécessitera cependant le lancement d’une nouvelle compagnie aérienne dédiée exclusivement à l’Afrique.

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«Il faut une entreprise qui puisse gérer cette infrastructure internationale. Air Algérie, qui est en grandes difficultés et qui a montré ses limites, n’est pas apte à relever un tel défi», note-t-il.

Lamine Chouiter estime que cette nouvelle compagnie devrait être de capitaux algériens mixte publics-privés avec une participation d’actionnaires originaires d’autres États africains. «Il est nécessaire d’avoir une implication continentale dans ce projet. Le personnel navigant et les commerciaux pourront être recrutés dans plusieurs pays. Il est important que cette entreprise ait une forte identité africaine.» Sur le plan économique, la région de Tamanrasset sera la première à profiter de la création de ce hub.

«Il faut imaginer l’opportunité que représente une telle infrastructure aéroportuaire pour la ville de Tamanrasset et pour l’ensemble du sud algérien. Baser un hub et une compagnie de cette envergure à Tamanrasset créera de la richesse et un dynamisme économique extraordinaire. Tamanrasset doit profiter de cette opportunité car le Hoggar peut devenir une formidable destination commerciale, touristique, médicale et même sportive dans la région du Sahel.»

Stabilité régionale

En plus du transport de passagers à travers le continent, le hub de Tam devrait également être une plateforme importante de fret.

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«Il est possible de créer un environnement commercial et financier qui profitera aussi aux régions nord du Mali et du Niger et au Sud libyen», ajoute Lamine Chouiter.

En proie à la pauvreté et à des problèmes sécuritaires, cette partie du Sahel pourrait gagner en stabilité grâce au rayonnement de ce projet. «Il faut maintenant sortir de la phase des effets d’annonces et passer à l’acte. Ce projet est viable et il peut être réalisé dans des délais acceptables. Au-delà des aspects économiques et de développement, le hub de Tamanrasset peut surtout devenir un atout central pour la diplomatie algérienne en Afrique», relève Lamine Chouiter.

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