Ces nouveaux éléments «éclairent, d’un jour nouveau l’instrumentalisation politique et judiciaire contre la candidature de François Fillon», a lâché Bruno Retailleau au micro de Sputnik France.
Contacté par la rédaction, Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains (LR) au Sénat et directeur de campagne de François Fillon en 2017, a d’abord refusé de commenter les révélations d’Éliane Houlette sur les pressions qu’elle aurait subies dans l’affaire Fillon. Celui qui s’est montré bien plus clair sur les réseaux sociaux a donc toutefois pointé un doigt discret, mais accusateur vers les procureurs.
Mais de quelles pressions parle-t-on? Nos confrères du Point ont révélé les récentes déclarations de l’ex-chef du Parquet national financier (PNF) devant la représentation nationale. Et elles font l’effet d’une bombe.
Auditionnée durant 1h30 par la commission d’enquête de l’Assemblée consacrée aux «obstacles à l’indépendance du pouvoir judiciaire», la magistrate s’est d’abord montrée critique sur l’organisation trop verticale de la justice. Une organisation qui placerait de facto les procureurs dans une «subordination» vis-à-vis de l’exécutif, à travers le Parquet général.
D’après les informations du Point, cette réunion aurait eu lieu le 15 février 2017, quelques jours à peine après les révélations du Canard enchaîné. Le 25 janvier, l’hebdomadaire révélait en effet que Penelope Fillon avait perçu «environ 500.000 euros brut» pendant plus de 10 ans, d’abord en tant qu’assistante parlementaire de son mari –alors député de Paris –, puis de son suppléant.
«J’ai été convoquée au parquet général –j’y suis allée avec trois de mes collègues, d’ailleurs– parce que le choix procédural que j’avais adopté ne convenait pas. On m’engageait [sic] à changer de voie procédurale, c’est-à-dire à ouvrir une information judiciaire. J’ai reçu une dépêche du procureur général en ce sens», a-t-elle dit devant la représentation nationale, relèvent de leur côté nos confrères du Point.
Neuf jours après la fameuse réunion dans le bureau du procureur général, le 24 février 2017, le PNF ouvrait une enquête judiciaire à l’encontre du candidat de la Droite pour détournements de fonds publics, abus de biens sociaux et recel, trafic d’influence et manquement aux obligations de déclaration à la Haute Autorité sur la transparence de la vie publique.
Le 14 mars 2017, François Fillon était mis en examen et ne retrouvera jamais la faveur des sondages, au profit de Marine Le Pen et surtout d’Emmanuel Macron, qui finira par être élu Président de la République moins de deux mois plus tard.
«C’était une affaire qui était pour moi comme toutes les autres affaires: une enquête préliminaire, rien ne justifiait une information judiciaire. Le procureur général n’était pas d’accord avec moi. Donc il espérait probablement me convaincre en me faisant venir pour une “réunion de travail” dans son bureau –réunion où il était accompagné de deux ou trois avocats généraux d’ailleurs […]
Et je lui avais dit “non, en l’état je ne changerai pas d’opinion”. Peut-être qu’à un moment, il faudra aller à l’ouverture d’une information judiciaire, mais ça sera quand je l’aurai décidé, parce que j’aurai des éléments pour le faire», développe l’ex-procureur financier.
Des «demandes incessantes de renseignements»
«Il n’y a aucun article du Code de procédure pénale qui stipule que, dans une période de six mois avant les élections, le parquet n’aurait pas le droit de lancer une enquête visant un candidat», se défendait-elle alors. Elle avait affirmé avoir traité cette affaire «comme toutes les autres» et plaidé le «concours de circonstances» avec la publication, au même moment que les révélations du Palmipède, d’un nouveau texte de loi qui venait bouleverser les règles en matière de prescription des délits, lequel l’aurait poussée à agir rapidement.
Une justification au déclenchement express de l’affaire Fillon en tout cas bien plus alambiquée que celle qu’Éliane Houlette a fournie devant la représentation nationale.