Proposition de Mohammed VI à Alger: les médias nourrissent la polémique

En attendant la réponse officielle d’Alger à la proposition du roi Mohammed VI du Maroc d’ouvrir un dialogue direct entre les deux États afin de refonder les relations bilatérales, des médias des deux pays entretiennent une polémique quant à l’issue de cette initiative, en contradiction avec l’optimisme de deux anciens ministres algériens.
Sputnik

Depuis le discours de du roi du Maroc Mohammed VI le 6 novembre appelant les autorités algériennes à refonder les relations bilatérales entre les deux États sur des bases plus saines, une polémique fait rage dans les médias des deux pays suscitée par le silence qu'Alger observe encore face à la proposition du souverain marocain, jugée par certains observateurs algériens comme historique.

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En effet, dans son édition de ce lundi 12 novembre, le plus grand quotidien algérien Echourouk, souvent décrit par la presse marocaine «comme proche des services de renseignements militaires algériens», a qualifié l'initiative du roi du Maroc de «nouvelle manœuvre» dont l'objectif ne serait autre que «la diabolisation de l'Algérie et son implication dans le dossier du Sahara» occidental.

Selon ce journal algérien, citant une source diplomatique, c'est la «proximité des pourparlers [directs entre Rabat et le Front Polisario sur la résolution du conflit au Sahara occidental, ndlr] de Genève qui serait la seule motivation d'une telle proposition». L'Algérie «dans sa politique étrangère veille au respect du principe du bon voisinage, mais défend d'un autre côté les justes causes!», a-t-il encore ajouté.

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Pour sa part, ce dimanche 11 novembre, le site d'information marocain Le360, jugé par la presse algérienne «comme proche du palais royal», a estimé qu'«Alger se dérobe encore une fois à l'appel de fraternité lancé par le roi». «On comprend mieux pourquoi Alger a tardé à réagir à l'offre de dialogue faite par le souverain […] à laquelle Alger oppose toutefois une fin de non-recevoir», a-t-il encore ajouté.

Évoquant le froid qui couvre les relations bilatérales entre les deux pays, le média a rappelé que «ce n'est pas la première fois qu'Alger décline l'offre de dialogue pour une remise à plat des divergences bilatérales». «Le roi Mohammed VI, depuis son intronisation, n'a en effet eu de cesse de tendre la main à Alger en vue d'une normalisation», a-t-il encore soutenu en soulignant que «ce n'est pas de cet œil que semble le voir un régime algérien haineux non seulement envers le Maroc, mais aussi tous les pays du voisinage ou presque, qui se plaignent d'ailleurs de son inimitié viscérale».

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Critiquant le silence des autorités algériennes quant à la main tendue du roi Mohammed VI, Le360 a considéré qu'«avec cette énième rebuffade, il apparaît donc à l'évidence que le voisin de l'est continuera d'insulter l'avenir».

Contrairement à ces attaques par médias interposés, deux observateurs algériens de premier rang considèrent la proposition marocaine comme une chance inouïe pour rebâtir les relations entre les deux pays et relancer la construction du Maghreb arabe. En effet, Halim Benatallah, ancien secrétaire d'État auprès du ministre algérien des Affaires étrangères chargé de l'émigration, a affirmé le 8 novembre au site d'information Algerie patriotique que le discours de Mohammed VI est «un tournant positif», du fait que ce dernier ne considère plus l'Algérie comme un «pays ennemi» mais comme un «partenaire qui a les clés de la région du Maghreb».

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M.Benatallah a encore soutenu que son optimisme n'était pas fortuit, car «pour la première fois, le roi du Maroc se dit disposé à ouvrir le dialogue avec l'Algérie sur toutes les questions en suspens, dont celles des frontières, de la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue, alors que, dans le passé, ses plaidoiries se limitaient à la seule revendication de la réouverture des frontières terrestres», fermées depuis 1994.

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Pour sa part, Maheiddine Amimour, ancien ministre algérien de l'Information, considérant que le dialogue entre l'Algérie et le Maroc est «inéluctable», a déclaré au même média que la première démarche à envisager est «une rencontre à huis clos» entre les deux pays «pour examiner les principales questions de discorde et d'éviter les discours de courtoisie et les rencontres protocolaires qui ne font pas avancer la cause».

Pour rappel, le 6 novembre, à l'occasion du 43e anniversaire de la Marche verte, le roi Mohammed VI a proposé, dans son discours à la nation, aux autorités algériennes de relancer les relations bilatérales en créant un «mécanisme politique conjoint de dialogue et de concertation» destiné à permettre de régler les différends entre les deux pays. Les autorités algériennes n'ont pas encore réagit officiellement à la proposition marocaine.

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