Un populisme positif? Ce qu’il faut retenir du livre de Stephen Harper, ex-PM canadien

L’ancien Premier ministre conservateur du Canada, Stephen Harper, vient de publier un livre étonnant. Un ouvrage critique de la gauche dans lequel il défend une vision positive du populisme. Quels sont les principaux points à retenir de ce livre? Le compte rendu de Sputnik.
Sputnik

Stephen Harper est un ancien Premier ministre canadien qui a conservé le pouvoir de 2006 à 2015. Chef du Parti conservateur du Canada durant ces 10 années, il a mené une politique économique assez rigide, tout en en se faisant remarquer pour ses valeurs plus «traditionnelles». M. Harper tentera aussi de revaloriser le rôle de l'Armée canadienne et se fera critiquer pour l'absence de politiques environnementales dans son programme.

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Sur la scène internationale, Harper se démarquera surtout en raison de son fort soutien à l'État d'Israël, ce qui lui vaudra bien des critiques, au Canada comme à l'étranger. À l'interne, Stephen Harper reconnaîtra le Québec comme nation, un geste symbolique qui visait à initier de meilleures relations entre le fédéral et la Belle Province.

Dans un livre étonnant publié récemment, l'ex-Premier ministre aborde de nombreux sujets qui vont de l'arrivée de Donald Trump aux États-Unis aux abus de pouvoir de l'Union européenne. Dans Right Here Right Now, Stephen Harper prône un populisme positif qu'il oppose au néo-libéralisme d'élites complètement déconnectées. Voici ce qu'en a retenu Sputnik.

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Dès les premières lignes de son livre, Stephen Harper affirme qu'il n'avait pas «espéré» la victoire de Trump en novembre 2016, mais qu'il l'avait jugée au moins possible. Contrairement aux nombreux commentateurs qui considèrent les électeurs de Trump comme des «imbéciles» et des «intolérants», Stephen Harper dit les comprendre, même s'il n'approuve pas leur choix. La victoire de Trump n'a donc rien à voir avec des «hackers russes», affirme-t-il.

L'ex-Premier ministre canadien voit l'élection de Trump comme l'une des preuves les plus tangibles de l'insatisfaction à l'endroit de la mondialisation. M. Harper fait toutefois l'autocritique de son propre camp. Selon lui, dans les 30 dernières années, des conservateurs ont instauré des politiques qui nuisent actuellement au bien-être des peuples occidentaux. Sur le plan économique comme sur le plan identitaire.

«Un grand nombre d'Américains, y compris de nombreux Américains conservateurs, ont voté pour Trump parce qu'ils ne vont pas bien. Ils ne vont pas bien dans le monde que les conservateurs ont créé après la Guerre froide. Et ils ne vont pas bien, en partie, en raison de certaines politiques que les conservateurs ont préconisées. En résumé, le monde globalisé ne fonctionne pas pour plusieurs d'entre nous. Nous pourrions prétendre qu'il s'agit d'une fausse perception, mais ce n'en est pas une», écrit Stephen Harper dans son livre.

«Au Québec, la gauche a complètement détruit le principe de nation»
Stephen Harper ne remet pas en cause tous les aspects de la mondialisation. Il rappelle le rôle important de dirigeants comme Ronald Reagan (États-Unis) et Margaret Thatcher (Royaume-Uni) lors de la Guerre froide. Deux chefs d'État qui ont beaucoup fait pour la liberté économique en s'opposant au socialisme. Le problème n'est pas le libéralisme économique en soi, mais le fait que ce système ne profite plus suffisamment aux pays qui l'ont inventé. Une réalité que Donald Trump aurait parfaitement comprise:

«Le problème, c'est que la mondialisation a été un succès pour beaucoup de peuples dans le monde, mais pas tellement pour plusieurs des nôtres. Un milliard de personnes à travers le monde — la majorité dans des pays émergents en Asie — sont sortis de la pauvreté. Pourtant, dans de nombreux pays occidentaux, les revenus des travailleurs ont stagné ou ont diminué au cours des 25 dernières années. Cela est particulièrement vrai aux États-Unis. Trump l'a parfaitement compris.»

Après le chef du Parti populaire du Canada, Maxime Bernier, Stephen Harper critique aussi le multiculturalisme extrême, un modèle de société nuisant selon lui à l'intégration des personnes immigrées. Un modèle dont le principal représentant est actuellement le Premier ministre canadien Justin Trudeau.

Le débat sur le multiculturalisme est associé à celui sur l'immigration, un thème qui est vu comme tabou, et qui a également permis à Trump de prendre le pouvoir. En brisant le consensus sur cette question, Trump serait apparu comme une sorte de héros auprès de la population américaine. Les électeurs ont décidé de lui accorder leur confiance.

Une critique du multiculturalisme extrême

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Stephen Harper rejette la vision à l'eau de rose du multiculturalisme. Selon lui, les immigrés ne souhaitent pas rester dans des «ghettos archaïques» qui fragmentent et divisent la société. De même, la meilleure façon de les intégrer est de les voir comme de futurs Canadiens, et non comme d'éternels étrangers.

Harper critique aussi l'aveuglement de la gauche libérale face à l'immigration illégale. Respecter les nouveaux arrivants, pense-t-il, ce n'est pas maintenir un système qui leur permet de contourner les lois. Et un système qui ignore la menace terroriste.

«Nous pouvons rendre l'immigration légale, sécurisée et, dans l'ensemble, régie par des considérations économiques, et alors, la confiance des gens sera grande. […]. En récompensant l'immigration clandestine, en ignorant les menaces réelles à la sécurité, en n'ayant aucun objectif économique et en encourageant le multiculturalisme qui fracture la société, deux choses vont se produire. Les immigrants échoueront souvent à s'intégrer et l'immigration sera largement ressentie comme négative dans la population.»

Enfin, l'ex-Premier ministre canadien plaide pour un renouveau du populisme, lequel apparaît dans son livre comme une force positive. Stephen Harper ne croit pas du tout, comme François Hollande à Montréal, que le populisme représente une menace pour la démocratie dans le monde. Au contraire, il y voit l'expression d'un peuple en droit de regagner sa place dans l'histoire.

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