À Montréal, Hollande, content de lui et fâché contre Trump et le «populisme»

© AFP 2024 MARTIN OUELLET-DIOTTEFrançois Hollande
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Mais où était François Hollande dans les derniers jours? À Montréal, loin des projecteurs européens… ou presque. Malgré des années difficiles, l’ex-Président s’est dit fier de son bilan. Mais surtout, il a mis les gens en garde contre Trump et la montée du «populisme». Un discours en phase avec celui du patronat canadien.

François Hollande a-t-il goûté la poutine? L'histoire ne le dit pas, pourtant, l'ex-Président de la République s'est offert une petite visite dans la métropole québécoise. Il était invité par le Conseil des relations internationales de Montréal à prononcer une conférence. M. Hollande a profité de l'occasion pour délivrer quelques messages… et faire la promotion de son livre Les leçons du pouvoir (Stock, avril 2018).

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Dans une entrevue radiophonique diffusée le 23 septembre, l'ex-Président est revenu sur son quinquennat difficile, sur sa gestion du terrorisme et sur la crise des réfugiés en Europe. Il a aussi évoqué le déclin du Parti socialiste français. C'est le journaliste Michel Désautels qui l'a interviewé dans le cadre son émission Désautels le dimanche. Une émission de grande écoute sur les ondes de la chaîne Radio Canada.

M. Hollande attribue le déclin du Parti socialiste et de la gauche en général à la montée du nationalisme et du populisme. Selon lui, la gauche pourrait «connaître un effacement» dans les prochaines années.

[L'effacement de la gauche, ndlr] est dû à plusieurs facteurs. Le premier, c'est une montée du populisme, du nationalisme, de l'extrémisme, qui n'est pas une montée récente, mais qui s'est amplifiée, notamment autour des questions d'identité et d'immigration. Et qui a coupé une partie des catégories populaires qui votaient pour le PS en France, pour la gauche, et qui a basculé de ce côté-là pour un temps. Jusqu'au moment où nous verrons bien ce que les populistes peuvent en faire», a affirmé François Hollande.

M. Hollande pense que les difficultés économiques dues à la mondialisation poussent un certain électorat de gauche à rester en marge du jeu électoral. Les turbulences économiques favoriseraient aussi l'émergence d'un mouvement «anti-système» ne croyant plus au rôle des grands partis de gauche, comme le PS. Hollande s'inquiète de la radicalisation et du cynisme en politique.

«Puis il y a une deuxième raison [à l'effacement de la gauche, ndlr], qui est qu'avec la mondialisation, les difficultés économiques, il y a eu une part de l'électorat de gauche qui a pu rester dans l'abstention, ou se radicaliser plus à gauche et contester totalement le système, au risque de ne pas pouvoir le changer. Et nous sommes dans cette phase-là.»

François Hollande a abordé plusieurs thèmes lors de cette interview à Montréal, mais la question du populisme a été centrale dans ses interventions. L'ex-Président n'est pas passé par quatre chemins pour dénoncer la montée de la droite en Europe et aux États-Unis.

Le populisme, la grande préoccupation de François Hollande

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À la radio, M. Hollande a critiqué la présidence de Donald Trump, affirmant que «la question de la démocratie et des libertés» était loin d'être «acquise» en Amérique.

Dans la conférence qu'il a prononcée vendredi dernier, Hollande s'en était déjà pris au Président américain. Hollande a accusé Trump de «semer le désordre et la division à travers le monde» devant les 400 personnes réunies par le Conseil des relations internationales de Montréal. De plus, les «populistes» tels que Trump entretiendraient la confusion entre le terrorisme islamiste et l'islam comme religion:

«Les populistes, eux, les nationalistes, les extrémistes s'emparent de cette peur- c'est finalement leur terreau, la peur- et y ajoutent la question de l'islam, faisant une confusion regrettable entre un terrorisme qui peut utiliser la religion, et l'islam en tant que culte. Et donnent à ce moment-là l'image de pays qui pourraient perdre leur identité- si je puis dire, leur âme, pour rester dans un vocabulaire religieux. Et puis il y a la question de l'immigration, qui est utilisée par les populistes, souvent ceux qui n'ont d'ailleurs jamais reçu de réfugiés, pour dire qu'ils n'en veulent pas et qu'ils veulent se protéger.»

Sur une autre note, François Hollande estime qu'il aurait vu le chômage baisser davantage en France s'il était resté plus longtemps au pouvoir. Les réformes prennent du temps avant de déboucher sur des résultats concrets. Selon lui, les Français n'ont pas attendu que ses réformes fassent effet avant de le congédier.

«Si j'étais resté sur un septennat, je serais peut-être devant vous encore Président de la République», a affirmé François Hollande.

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Par ailleurs, l'ex-Président croit que «l'extrême droite» gagne du terrain, même dans les pays où il n'y a pas de chômage structurel. «[…] Il y a quand même des populistes qui font leur miel du désordre et le thème de l'immigration se substitue à celui qui était le thème principal, c'est-à-dire le pouvoir d'achat et l'emploi», a soutenu Hollande sur les ondes de Radio Canada.

Cette prise de position survient dans un contexte où de nombreux acteurs économiques au Canada se prononcent contre la montée du «populisme» dans le monde. En septembre 2017 à Montréal, le PDG de l'entreprise Cogeco avait invité les milieux d'affaires à s'impliquer davantage contre la montée des forces «populistes».

Hollande au diapason des milieux d'affaires canadiens

Dans une conférence qu'il a donnée la semaine dernière, Peter Hall, vice-président et économiste en chef d'Exportation et développement Canada, a tenu des propos similaires. Pour de nombreux acteurs économiques au Canada, le populisme menace le libre-échange en favorisant le retour de mesures protectionnistes. Ce mouvement politique nuirait aussi à l'embauche éventuelle de travailleurs immigrés par les grandes entreprises.

De manière paradoxale, les propos de François Hollande, un ex-président socialiste, semblent au diapason de ceux de plusieurs grands patrons canadiens. Au Canada, François Hollande pourrait séduire des personnalités qu'il serait difficile de ranger à gauche… Si M. Hollande ne croit pas à la fin du clivage gauche-droite, comme il l'a aussi mentionné, il contribue lui-même à le redéfinir.

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