La Turquie projette-t-elle de créer une base navale en Chypre du Nord?

Annoncé en début de semaine par un journal progouvernemental turc, que cache l’éventuel projet d’Ankara de créer une base navale et d’en rétablir une autre, aérienne, en Chypre du Nord et quelles seraient leurs conséquences pour la région? La parole aux experts.
Sputnik

Pour défendre les intérêts de la Turquie en Méditerranée, Ankara veut créer de toute urgence une base navale dans la République autoproclamée de Chypre du Nord (RTCN), a annoncé mardi le journal turc Yeni Safak. En outre, la Turquie envisage d’y reconstituer la base aérienne de Geçitkale, a-t-il été indiqué. Dans son commentaire à Sputnik, Ata Atun, membre du Conseil consultatif auprès de l’ex-président de la RTCN, a déclaré que la décision en question était la plus efficace compte tenu du contexte actuel.

«La Russie a conclu un accord spécial avec les dirigeants de Chypre grec, prévoyant l’utilisation du port de Limassol et de la base aérienne Andreas Papandreou. Des accords analogues existent avec la France. Le Royaume-Uni a à sa disposition les bases d’Akrotiri et de Dhekelia, qui abritent des sites du renseignement électronique britannique. Les bases anglaises sont également utilisées par les Américains. Dans de telles dispositions, la Turquie doit conclure au plus vite un accord ad hoc avec la RTCN», a-t-il indiqué.

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Et d’ajouter que ces derniers ne devaient pas tenir compte des réactions de la partie grecque ainsi que de l’UE, des États-Unis et du Royaume-Uni, soulignant qu’ils n’avaient pas demandé d’autorisation aux Turcs en concluant les accords avec Paris et Moscou.

Beyazit Karatas, du parti turc Vatan, partage son avis, tout en soulignant néanmoins la nécessité que les mesures sur l’île ne se limitent pas à du militaire. «La Turquie doit entreprendre des avancées pour son [Chypre du Nord, NDLR] développement économique», insiste-t-il dans un entretien accordé à Sputnik.

«Grande stratégie d’Ankara»

Cependant, pour Konstantinos Grivas, professeur à l'Académie de l'Armée Hellénique, le développement actuel des événements fait partie d'une stratégie plus large d'Ankara, dont l’objectif est d’imposer une domination totale de la Turquie en Méditerranée orientale.

«Dans ce contexte, [la Turquie, ndlr] est déterminée à mettre sous un contrôle très serré, si je peux le dire, "digérer" Chypre dans la zone maritime où la Turquie jouira d’un contrôle incontestable. C’est un maillon d'une chaîne de décisions stratégiques d’Ankara qui sont extrêmement agressives envers Chypre et la Grèce», souligne-t-il.

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Publiées dans les pages d’une «presse de propagande extrêmement proche d’Erdogan» de telles rumeurs ont pour but de faire que l’Otan, l’UE et les États-Unis dévoilent leurs projets, estime de son côté Ioannis Mazis, chef de la chaire de turcologie et d’études de l’Asie contemporaine à l’Université nationale et capodistrienne d'Athènes.

«Si ces rumeurs se confirment, cela suscitera toute une série de questions sur l'ingérence militaire turque dans les affaires de la République de Chypre. Cela est contraire à la Charte des Nations unies et aux décisions prises par l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité de l’Onu à l'égard de la République de Chypre», explique-t-il.

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