"La plupart" des entreprises françaises "ne pourra pas" rester en Iran, a déclaré ce 19 juin Bruno le Maire sur RMC. Malgré le volontarisme affiché par l'UE et la France pour résister aux sanctions américaines contre les entreprises qui commerceraient avec l'Iran, le ministre de l'Économie a fait aveu d'impuissance.
Prépondérance du dollar dans les échanges internationaux oblige, les entreprises européennes implantées en Iran devront plier bagage: PSA et Total ont déjà annoncé leur retrait; seul Renault, pour l'heure, a décidé de rester, quitte à adopter une "voilure réduite". Échec diplomatique ou annonce tactique? Pour Djordje Kuzmanovic, c'est une «capitulation»: «La France, ridiculisée diplomatiquement, n'a plus aucune autonomie géopolitique», tweet le porte-parole de la France insoumise pour les questions internationales.
Si «c'est une caractéristique de la politique étrangère américaine, d'avoir une conception illégale de la manière dont elle peut sanctionner les entreprises étrangères», le plus important «c'est qu'un certain nombre d'entreprises européennes restent en Iran et qu'il puisse vendre la quasi-totalité de son pétrole», tempère Thierry Coville, chercheur à l'IRIS, spécialiste de l'Iran:
«Il faut attendre. Il faut être pragmatique: ce que veulent les Européens, c'est que l'Iran reste dans l'accord. S'il sort, c'est un échec. On pourra alors dire que la politique européenne vis-à-vis de l'accord sur le nucléaire n'a pas marché.»
Afin d'empêcher les Américains d'être «le gendarme économique de la planète», «notre priorité c'est de bâtir des institutions financières européennes indépendantes souveraines qui permettent des canaux de financement entre des entreprises françaises, italiennes, allemandes, espagnoles et n'importe quel autre pays de la planète, car c'est à nous Européens de choisir librement et souverainement avec qui nous voulons faire du commerce", a martelé le ministre.
De fait, Thierry Coville rappelle que
«ce sont de petites banques qui financent les échanges», car «les grandes banques avec des intérêts aux États-Unis n'osent pas». Cela pose des problèmes «parce qu'on ne peut pas financer les échanges importants et les opérations d'investissement.»
«On est un peu surpris de l'incapacité, sur le plan pratique, des Européens à trouver des méthodes et stratégies pour contrer effectivement l'impact des sanctions américaines» confie Thierry Coville, qui veut se monter confiant sur la capacité de l'Europe à aller au-delà des déclarations d'intention, émet quelques réserves:
«Les exportations vers l'Iran de l'UE, c'est 0,5% des exportations. Ce n'est quand même pas énorme à mettre en place […] Si l'Union européenne n'arrive pas à mettre en place des institutions publiques de financement vis-à-vis de l'Iran, c'est un peu inquiétant.»