Saper les Jeux de l'amitié? L’Afrique est "considérée par l’Occident comme un continent à la traine"
18:41 28.03.2024 (Mis à jour: 19:34 28.03.2024)
© AP Photo / David J. PhillipLe Kényan David Lekuta Rudisha aux Jeux olympiques de Rio de Janeiro (archive photo)
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Les pays africains subissent la pression de l'Occident pour prendre position contre la Russie et ses Jeux de l'amitié. Mais "toutes les tentatives cherchant à imposer un diktat aux pays africains sont vouées à l’échec, le monde a beaucoup changé", a déclaré à Sputnik Afrique le géopolitologue Karim Diakhaté.
Alors le Président de l'Agence mondiale antidopage (AMA) a déclaré que l'Afrique pourrait servir d'appui pour critiquer les prochains Jeux de l'amitié en Russie, le continent ne se pliera plus au diktat des pays occidentaux puisque le monde a changé, a déclaré à Sputnik Afrique Karim Diakhaté, géopolitologue et directeur de publication du magazine Le Panafricain.
"L’Afrique continue d’être considérée par l’Occident comme un continent à la traine, incapable de faire preuve d’imagination pour peser dans l’économie mondiale […]. Toutes les tentatives cherchant à imposer un quelconque diktat aux pays africains sont vouées à l’échec, le monde a beaucoup changé ces dernières années et, de plus en plus, les peuples africains réclament un nouveau type de partenariat mettant en avant des aspects spécifiques liés à la coopération, l'économie, la sécurité, l’environnement, entre autres", a indiqué M.Diakhaté.
Selon lui, les pays africains sont des cibles privilégiées de pressions car ils doivent parfois s'appuyer sur l'Occident pour préparer leurs athlètes bien qu'ils souhaitent rester fidèles à la neutralité sportive.
"Les pays africains sont pris entre le marteau et l’enclume. Ils obligés très souvent d’avoir recours à l’appui du Comité International Olympique (CIO) ou de certains pays occidentaux pour la préparation de leurs athlètes et d’autres formes d’assistance, mais ils sont en même temps soucieux de faire participer des délégations à tout évènement sportif, répondant au noble souci de favoriser le brassage des cultures et la compétition dans la sportivité et le respect de l’autre", explique le spécialiste.
Deux poids deux mesures
Les critiques du président de l'AMA contre les Jeux de l'amitié 2024, que la Russie entend organiser du 15 au 29 septembre prochain, mettent clairement à mal l'image de neutralité que les instances internationales du sport veulent se donner, ajoute Karim Diakhaté.
"L’AMA comme le CIO qui disent défendre des valeurs universelles doivent se départir de certaines considérations de nature politique. La stricte neutralité de ces organismes est sujette à caution", affirme le géopolitologue.
À ce titre, le fait de permettre aux athlètes russes de participer aux prochains Jeux Olympiques de Paris à condition qu'ils n'aient pas soutenu la position des autorités russes sur l'Ukraine, interroge.
"On comprend bien, dès lors, la réaction musclée de la représentante russe aux Nations unies qui a critiqué la décision du CIO de priver les athlètes russes de leurs couleurs officielles, la qualifiant à juste titre de politisée et discriminatoire."
Par ailleurs, les grandes instances sportives font beaucoup moins de bruit lorsque d'autres athlètes prennent position. Lors de l'Euro de football 2021, plusieurs joueurs avaient critiqué la décision de l'UEFA de ne pas illuminer le stade de Munich aux couleurs de l'arc-en-ciel LGBT, sans que cela ne soulève l'émoi, rappelle le géopolitique. "Beaucoup de sportifs prennent position et ne risquent rien", résume-t-il.
Le 27 mars, le président de l'AMA, Witold Bańka avait été piégé lors d'un canular téléphonique par les célèbres humoristes russes Lexus et Vovan. Il avait admis que son but était "d'arrêter l'initiative" russe des Jeux de l'amitié, ajoutant que l'Afrique "pourrait prendre la tête de cette opposition".