Liberté d’action, influence: pourquoi Washington ouvre des laboratoires biologiques en Afrique?
19:40 03.11.2023 (Mis à jour: 19:44 03.11.2023)
CC BY 2.0 / James St. John / Danger - Biohazard signPanneau signalant un danger biologique
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Moscou s’inquiète d’une possible expansion des laboratoires biologiques américains en Afrique. L’installation sur le continent offre de nombreux avantages aux Américains mais fait peser de grands risques sur les populations, a déclaré à Sputnik Moses Khanyile, de l’Université de Stellenbosch.
Tout bénéfice. Si la Russie redoute que les États-Unis étendent leur réseau de laboratoires biologiques en Afrique, la stratégie est bien pesée par Washington qui y trouve parfaitement son compte, comme l’explique à Sputnik Moses Khanyile, directeur du Centre d'études militaires (CEMIS) de l’Université sud-africaine de Stellenbosch.
En s’installant en Afrique, les États-Unis évitent les contrôles et réduisent leur responsabilité en cas de fâcheuses conséquences dans ce type de laboratoires.
"Les États-Unis transféreront les multiples exigences de conformité de leur propre pays au pays hôte. Cela assurera aussiune liberté d'action pour ce qu’ils veulent faire, sans crainte de répercussions immédiates. Cela réduit la responsabilité", explique ainsi le chercheur.
Le transfert d’activités biologiques à double usage répond aussi à des logiques d’influence. Les États-Unis ont bien identifié l’Afrique comme un continent d’avenir et veulent y apposer leur empreinte.
"Le continent est un marché en pleine croissance. Il est au centre de nombreux intérêts géopolitiques. Il possède de vastes ressources minérales, essentielles à la subsistance de la plupart des pays. Par conséquent, tout ce qui peut aider à stabiliser l'empreinte sera d'un grand intérêt pour toutes les puissances mondiales, y compris les États-Unis", déclare ainsi Moses Khanyile.
Risques multipliés
Pour les populations africaines, les risques sont au contraire décuplés, souligne encore le spécialiste. Les recherches sur le matériel biologique peuvent provoquer des accidents, mais sont aussi sous la menace d’organisations criminelles, qui s’intéressent particulièrement à ce type d’activité.
"Il pourrait y avoir une fuite. Des recherches peuvent tomber entre les mauvaises mains de terroristes. Les syndicats du crime sont toujours à la recherche de certaines de ces armes biologiques pour poursuivre leurs objectifs", souligne Moses Khanyile.
Sur un plan légal, le fait que les Africains n’aient pas accès aux résultats des études menées dans ces laboratoires pourrait aussi constituer une violation de la Convention sur les armes biologiques. Cette dernière interdit le développement, la production, le transfert, le stockage et l'utilisation des armes biologiques et à toxines, depuis 1975.
Début octobre, la Défense russe avait annoncé disposer de documents prouvant le transfert d’études biologiques à double usage en Afrique. Le Pentagone utiliserait notamment des sous-traitants au Cameroun, en Ouganda, en Sierra Leone et en République démocratique du Congo.