"Les États-Unis sont entre le marteau russe et l’enclume chinoise en Afrique"

© AP Photo / Tiksa NegeriAntony Blinken à Addis-Abeba
Antony Blinken à Addis-Abeba - Sputnik Afrique, 1920, 08.04.2023
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Washington a de plus en plus de mal à trouver sa place en Afrique, alors que les pays du continent nouent des partenariats avec Moscou et Pékin, explique à Sputnik le politologue Abdou Karim Diakhaté.
Alors que les visites d’officiels américains se succèdent en Afrique, les États-Unis sont pris entre deux feux sur le continent. Washington, qui croyait pouvoir profiter de la perte d’influence française dans certaines régions, se voit en effet confronté à l’apparition des nouveaux partenaires chinois et russes, explique à Sputnik Abdou Karim Diakhaté, politologue et directeur de publication du magazine Le Panafricain.
"Les États-Unis sont entre le marteau russe et l’enclume chinoise en Afrique. La Chine est le principal partenaire commercial de beaucoup de pays du continent, mais la coopération entre les pays africains et la Russie connaît une nouvelle dynamique et suscite de grands espoirs. C’est cette tendance qui dérange les États-Unis", déclare-t-il ainsi.
Washington a également dû revoir ses financements à la baisse, coupant dans ses aides à l’Afrique. Lors du G7 2022, Joe Biden avait ainsi promis un plan Marshall de 600 milliards de dollars à destination du continent, avant de finalement évoquer un financement de 50 milliards sur trois ans lors du dernier sommet Afrique - États-Unis, rappelle Abdou Karim Diakhaté.

Des pressions inefficaces

Cette perte d’influence américaine a même poussé Washington à faire la morale à certains pays africains sur leur collaboration avec Moscou ou Pékin. Début janvier, la ministre de la Défense sud-africaine Thandi Modise avait encore dénoncé les "pression injustifiées" de Washington pour obliger son pays à couper les ponts avec la Russie, dans le sillage de l’incident du navire Lady R.
Des pressions américaines qui n’aboutiront sans doute pas, affirment cependant Abdou Karim Diakhaté, qui applaudit la "prise de conscience" des pays africains sur le sujet. La résilience de l’Afrique après la pandémie de Covid-19 a notamment montré que le continent pouvait se prendre en charge lui-même.
"Je ne pense pas que les pressions exercées par les pays occidentaux sur certains pays africains quant au choix de leurs partenaires puissent aboutir. Il y a une prise de conscience qui va au-delà du simple constat, une réelle démarche de rupture dont on voit les effets se produire ici et là, à travers des prises de position de plus en plus audacieuses, des réflexions et des actes forts posés par des élites politiques et une société civile très dynamique", déclare-t-il ainsi.

La Russie n’est pas isolée

Les liens que cultivent aujourd’hui les pays africains avec Moscou prouvent en outre que la Russie n’est pas isolée sur la scène internationale, souligne encore Abdou Karim Diakhaté. Les pays arabes s’abstiennent également de prendre des sanctions, tandis que la position de la Russie au sein des BRICS lui assure certains soutiens, explique l’expert.
"Dans le monde multipolaire, un isolement de la Russie ne me semble pas possible compte tenu des enjeux géostratégiques et des intérêts divergents des pays […] Seuls 28 pays sur les 54 que compte l’Union africaine ont voté en faveur de la résolution condamnant l’invasion russe de l’Ukraine […] D’autres pays, comme l’Inde et l’Iran, tentent de préserver leurs liens économiques avec l’Occident, mais aussi leur coopération énergétique et sécuritaire avec la Russie", argumente-t-il.
Un constat partagé par le géopolitologue français Aymeric Chauprade, qui expliquait récemment à Sputnik que la stratégie occidentale d’isolement de la Russie avait ses limites.
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