Le marché unique africain: un rêve et des obstacles

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Afrique - Sputnik Afrique, 1920, 17.12.2022
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Les efforts pour créer un marché commun africain se multiplient depuis plusieurs années. Mais l’instauration de la Zone de libre-échange continentale africaine (AfCFTA) se heurte à des problèmes structurels et à l’influence américaine, expliquent à Sputnik deux analystes en la matière.
La mise sur orbite d’un marché unique africain est l’un des plus grands défis auxquels est confronté le continent noir. Créée en 2019, la Zone de libre-échange continentale africaine (AfCFTA) pourrait porter la taille de l’économie africaine à 29.000 milliards de dollars d’ici 2050, selon ses défenseurs.
Le projet doit déboucher sur la création d’un marché unique englobant 1,3 milliard d’habitants, et pourrait stimuler le commerce intra-africain de 52% en éliminant les barrières douanières, selon la Banque mondiale. Un projet d’envergure, qui délivrerait l’Afrique de ces dépendances aux importations, explique à Sputnik Bamidele Adekunle, professeur agrégé à l'Université canadienne de Guelph.
"Si cela fonctionne, l'Afrique sera un grand acteur de l'économie mondiale. Elle passera d’un continent dépendant des importations à une grande économie pesant sur le prix mondial des matières premières", souligne l’expert.
L’AfCFTA se heurte néanmoins à certains obstacles, qui l’empêchent pour l’heure de prendre son envol. La volatilité des devises et les taux de change fluctuants affectent notamment le processus, précise Bamidele Adekunle.
La différence de développement entre États complique aussi la tâche, le Burundi restant par exemple l'une des économies africaines les moins développées alors que le Rwanda est devenu une puissance technologique. Enfin, l’état des infrastructures de transports perturbent la connectivité entre les pays.

Le jeu trouble de Washington

Le marché unique africain doit aussi composer avec diverses influences extérieures, notamment celle des États-Unis. Washington a en effet salué la création de l'AfCFTA mais continue de pousser sa Loi sur le développement et les opportunités africaines (AGOA), qui facilite l’accès des pays africains au marché américain.
Problème: ce mécanisme est restrictif. Il faut jouer selon les règles du jeu américain pour y avoir accès. Début janvier, Washington avait ainsi banni le Mali, l'Éthiopie et la Guinée de l’AGOA, invoquant des "violations des droits humains". Une exclusivité qui pousse aussi les pays africains à se concurrencer entre eux, plutôt qu’à tirer ensemble dans le même sens, affirme à Sputnik Sergio Rossi, professeur de macroéconomie à l'Université de Fribourg
"Les pays africains sont en concurrence les uns avec les autres, pour obtenir les subsides américains, au lieu de collaborer pour mettre en place un système économique correct et indépendant de l'économie américaine, en ce qui concerne la production, le commerce et les activités bancaires", explique le chercheur.
Ces derniers mois, les deux monnaies uniques imaginées par la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC) et la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) ont aussi pris du plomb dans l’aile.
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