Algérie : Pourquoi les autorités ont interdit la vente de ce produit alimentaire aux enfants?

Alger - Sputnik Afrique, 1920, 11.01.2022
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L’huile alimentaire connaît une grande tension sur le marché algérien à cause de problèmes liés à la distribution. Face à cette crise, le ministre du Commerce a décidé d’interdire la vente de ce produit aux enfants car ils seraient "utilisés" par des réseaux de spéculateurs.
Le consommateur algérien est une nouvelle fois confronté à une pénurie d’huile de table. Appelée communément "songo" (sans goût), elle est indisponiblesur les étals depuis les premiers jours de l’année 2022. Une situation qui a provoqué de longues files d’attentes devant les quelques grandes surfaces qui disposent encore d’un stock de bidons. Cette crise a aussi provoqué une déferlante de memes et de blagues sur les réseaux sociaux suite à la décision de Kamel Rezig, le ministre du Commerce, qui a ordonné, samedi 8 janvier, d’interdire la vente d’huile "aux mineurs". "L’exploitation d’enfants et de mineurs à des fins de spéculation a été enregistrée et (…) des individus les envoient pour acheter quotidiennement ce produit en grandes quantités, chose qui a également causé une certaine rareté", a-t-il indiqué.

Sans facture

C’est par un "sans commentaire" émis d’un ton sec que Mustapha Zebdi, le président de l'Association algérienne de protection et d'orientation du consommateur et de son environnement (Apoce), a répondu à Sputnik au sujet de cette interdiction. Selon lui, le marché de l’huile de table connaît un "grave dysfonctionnement" dû à des problèmes de régulation et non pas à cause d’une mafia qui utilise des enfants.

"Le problème c’est avant tout la distribution de ce produit de large consommation. Des grossistes et des détaillants refusent de s’approvisionner en huile auprès des producteurs car ils ne veulent pas acheter avec une facture afin de ne pas payer de taxe. C’est l’exigence d’un paiement avec facture par les industriels qui les incommodent. L’huile étant subventionnée, ces commerçants estiment que le gain est minime. Pour eux l’impact fiscal sur le chiffre d’affaires seraient énorme. Au sein de notre organisation, nous estimons qu’il est nécessaire de revoir le système de taxes des produits sensibles pour éviter de nouvelles crises", explique le président de l’Apoce.

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En Algérie, l’huile de table fait partie des produits subventionnés par l’État au même titre que le sucre, le lait, l’eau potable et le carburant. Depuis les émeutes de janvier 2011, provoquées par la hausse du sucre et de l’huile, ce système de subvention concerne les producteurs privés et impose un barème des marges bénéficiaires de tous les intervenants du circuit de distribution. Au mois d’octobre 2021, le gouvernement a imposé un nouveau tarif pour le bidon d’huile de 5 litres: 650 dinars (4,11 euros) au lieu de 600 dinars (3,79 euros). Pour ce qui est de la production, le pays est autosuffisant et dégage même un excédent. En effet, les 6 principaux groupes de trituration d’oléagineux produisent entre 50.000 et 60.000 tonnes d’huile alimentaire par mois pour consommation nationale mensuelle de 48.000 tonnes.

"Nous avons un potentiel important qui va augmenter ces prochaines années avec l’entrée de nouveaux opérateurs et qui permettra à l’Algérie d’exporter l’excédent. Mais actuellement, vu cette tension il faut se concentrer sur la demande du marché national et l’inonder", insiste Mustapha Zebdi.

Depuis deux semaines, la tension ne concerne pas uniquement l’huile mais aussi le lait ainsi que les produits laitiers. La facture d’importation de la poudre de lait a atteint 1,2 milliard de dollars durant l’année 2019. Une situation qui a conduit les autorités à imposer une dérogation d’importation aux producteurs. Cette mesure ne concerne pas le lait en sachet d’un litre, qui est un produit subventionné et dont le prix public est de 25 dinars (0,15 euros) mais le lait conditionné dans des packs en carton.

"En fait, il y a eu un retard dans la délivrance des autorisations d’importation donc certains producteurs ont été confrontés à des ruptures de stock. C’est juste transitoire puisque ces entreprises ont obtenu les dérogations pour importer la matière première. Mais il est nécessaire de trouver les solutions adéquates pour que ce genre de situations ne se répète plus", note le responsable de l’association de consommateurs.

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Mustapha Zebdi indique par ailleurs que le principe de la levée des subventions inscrite dans la loi de Finances 2022 n’est pas encore applicable. "Pour l’heure, pas question de lever les subventions des produits de large consommation. Le Président de la République a été clair à ce sujet et a démenti toutes les rumeurs", ajoute-t-il.
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