Seul pendant les fêtes, vous risquez d’être frappé par le "singlism"

© Photo Pexels/Anastasiya Lobanovskaya / Homme et femme tenant les uns les autres à la main avec des guirlandes lumineusesHomme et femme tenant les uns les autres à la main avec des guirlandes lumineuses
Homme et femme tenant les uns les autres à la main avec des guirlandes lumineuses - Sputnik Afrique, 1920, 17.12.2021
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Décorations de Noël, musique festive, enfants joyeux. Signes de bonheur ou de solitude? Il est parfois difficile de passer les fêtes de fin d’année seul. La société a souvent une perception stéréotypée des célibataires, expose à Sputnik la sociologue Bella DePaulo qui étudie la discrimination envers ces derniers, frappés par le "singlism".
Idée reçue: les célibataires tendent à se sentir plus seuls et misérables, et les personnes mariées plus heureuses. Mais qu’en est-il en réalité? La scientifique américaine en sciences sociales à l’université de Californie à Santa Barbara, Bella DePaulo, analyse la vie de célibataire depuis des années et indique que son niveau général de misère est surestimé.
Les célibataires ne sont pas nécessairement misérables et les mariés ne sont pas obligatoirement heureux, démontrent les études en l’espèce. Cependant, les célibataires sont souvent stéréotypés, stigmatisés et ignorés dans une société où le couple est perçu comme la norme, ce qui peut encore s’aggraver en période de fêtes de fin d’année.
"Le singlism ["célibatisme" en français, ndlr] se manifeste par des stéréotypes et la stigmatisation envers les célibataires. Je l’ai remarqué au quotidien, dans ma vie de célibataire entourée de couples", explique la sociologue dans un entretien à Sputnik.
Bella DePaulo, la soixantaine, dit avoir toujours été heureuse de retourner à sa vie habituelle après les quelques courtes relations qu’elle a eues. Elle a presque toujours été célibataire, un état qu’elle apprécie, mais pas la manière dont on le traite.
"Mes amis, couples, avaient l’habitude de communiquer entre familles le week-end. Ils ne m’invitaient pas. Je ne pouvais que les rencontrer pendant la semaine pour un déjeuner", se rappelle-t-elle. "Un autre exemple: on m’a demandé de m’occuper d’un cours en soirée. On m’a dit qu’il serait trop difficile pour les professeurs mariés de venir en soirée bien qu’ils n’aient pas encore d’enfants!"
Une autre idée reçue suggère que toute personne célibataire aspire à trouver un partenaire.
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Si les gens comme Bella vivent en harmonie avec leur statut de célibataire et s’érigent contre cette idée, d’autres peuvent souffrir de ne pouvoir réaliser ce désir ainsi que de l’exclusion qui en découlent de la part des amis ou des collègues.

Est-ce une vie d’adulte?

D’autres peuvent poser la question suivante: "Mais Bella, tu n’es pas mariée. Tu n’as pas d’enfants. Cela peut-il être considéré comme une vie d’adulte?" Auteure de plusieurs livres et études, Bella explique que les célibataires assument la tâche de s’éduquer eux-mêmes au lieu de trouver un partenaire sur qui ils peuvent compter.
Selon elle, les célibataires sont plus indépendants du point de vue économique et émotionnel, et développent les compétences nécessaires pour mener une vie autonome.
"Ce sont les célibataires qui ont plus d’amis, qui font le plus afin de maintenir un contact avec leurs frères et sœurs. Ce sont les célibataires qui sont plus attachés à leurs parents, qui aident plus leurs voisins, qui contribuent plus à la vie de leur ville", insiste Bella DePaulo lors d’une conférence TED (Technology, Entertainment and Design).
"En revanche, quand les couples commencent à vivre ensemble ou se marient, ils deviennent plus insulaires. Et ils le sont même s’ils n’ont pas encore d’enfants", nuance-t-elle, citant les résultats de plusieurs recherches.
Conférence "Ce que personne ne vous a dit sur les célibataires"
Si l’on se penche sur la question de la solitude, ce n’est pas toujours le partenaire qui aide à se débarrasser de ce sentiment, mais la possibilité et la capacité de s’ouvrir à un ami ou à un proche, poursuit-elle.

La loi du côté des mariés

Bella confie qu’elle ne comprenait pas dans quelle mesure le célibatisme était ancré dans la législation jusqu’à ce qu’elle commence à l’étudier.
"Aux États-Unis, par exemple, il existe plus de 1.000 lois qui offrent des avantages et protections uniquement aux personnes mariées. Et lorsque les mariés sont facturés moins par tête que les célibataires, c’est un autre exemple du célibatisme."

Faire face au "singlism"

Ainsi, comment résister à ce type de discriminations?
"Un individu peut attirer l’attention dessus quand ça arrive, mais c’est risqué. D’autres sont susceptibles de le critiquer et de dire que ce premier est trop sensible", prévient la sociologue.
Mais pour quelle raison a-t-elle choisi ce domaine de recherche? "Je veux attirer l’attention sur le célibatisme, le rendre plus reconnaissable et reconnu comme étant injuste. Si plus de personnes étaient plus conscientes du célibatisme, comme elles le sont des autres +ismes+ tels que le sexisme ou le racisme, plus de personnes et organisations se rendraient compte qu’il faut traiter les célibataires de façon juste".
Au fur et à mesure que le nombre de célibataires s’accroît aux quatre coins du monde, ils prennent de plus en plus la parole et résistent aux stéréotypes, assure la chercheuse. Et il "devient plus difficile d’insister quand il y a quelque chose qui cloche avec ces millions de personnes vu qu’elles sont célibataires".
"Être célibataire devient de plus en plus normal, de moins en moins stigmatisé. Mais il reste toujours un long chemin à parcourir pour que les célibataires soient respectés de la même manière que les personnes mariées", résume Bella DePaulo.
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