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En Syrie, la Russie et l’Iran se partagent les dividendes de la paix
En Syrie, la Russie et l’Iran se partagent les dividendes de la paix
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Une délégation russe a évoqué le dossier syrien en Iran. Après avoir aidé militairement Bachar el-Assad, Téhéran et Moscou n’en sont pas moins économiquement... 22.11.2021, Sputnik Afrique
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Une chose est sûre sans Téhéran ni Moscou, "Assad ne serait plus là", affirme notre interlocuteurAprès la guerre, le binôme russo-iranien entend gagner la paix en Syrie. Alexander Lavrentiev, l'envoyé spécial du Président russe pour la réconciliation syrienne, et Sergey Vershinin, vice-ministre russe des Affaires étrangères, se sont rendus le 21 novembre à Téhéran. Ils se sont entretenus avec le chef de la diplomatie iranienne, Hossein Amir Abdollahian. Passant en revue la situation régionale, ils ont surtout traité du dossier syrien. Au cours de ces échanges, le ministre des Affaires étrangères iranien a rappelé sa détermination à renforcer les liens bilatéraux avec Moscou. "La coopération conjointe russo-iranienne en Syrie a été une expérience très réussie, et est venue en réponse à la demande du gouvernement syrien", a-t-il déclaré. En effet, outre le Hezbollah libanais, seuls deux pays ont reçu l’aval de Damas pour intervenir militairement sur son territoire.La délégation russe a également rencontré Ali Asghar Khaji, envoyé spécial du ministère iranien des Affaires étrangères pour la Syrie. Au programme: la coopération bilatérale et notamment les questions relatives à la lutte antiterroriste ainsi qu’à la reconstruction et la stabilité du pays.Qassem Soleimani aurait convaincu Vladimir PoutineEt c’est même Téhéran qui aurait joué un rôle crucial pour convaincre Moscou d’intervenir en Syrie. Suite à un voyage en Russie en 2015 de Qassem Soleimani, l’ancien général des Forces extérieures iraniennes Al Qods assassiné par un drone américain en janvier 2020, Vladimir Poutine et son ministre de la Défense, Sergueï Choïgou, auraient pris la décision de soutenir militairement les forces de Bachar el-Assad selon Emirates Policy Center. Depuis, le binôme russo-iranien a permis aux troupes gouvernementales de recouvrer la maîtrise de près des trois quarts du pays et d’annihiler progressivement les poches djihadistes. Avant l’intervention russe de 2015, l’armée syrienne s’était repliée sur le littoral et les faubourgs de Damas.Les deux pays participent conjointement au processus d’Astana, qui vise à résoudre pacifiquement la crise syrienne, en passant outre le système onusien. Le prochain cycle des pourparlers aura lieu à Nour-Sultan au Kazakhstan à la mi-décembre. La Russie, l’Iran, la Turquie, les partis syriens ainsi que plusieurs observateurs seront présents.En Syrie, chacun son pré carréToutefois, cette logique de coopération bilatérale aurait ses limites, "depuis 2019 et la relative pacification de la Syrie utile, on entre dans une nouvelle phase. Les alliés d’hier se positionnent dans une dynamique de concurrence économique", précise Pascal Le Pautremat. En d’autres termes, Moscou et Téhéran convoitent tous deux les dividendes de la paix en Syrie.Téhéran a déjà obtenu l’exploitation des mines de phosphate d’Al-Charqiya et Khunayfis. Les Perses ont également construit plusieurs centrales électriques à Banyas et à Alep et gèrent le port de Lattaquié depuis 2019. De surcroît, ils investissent majoritairement à Alep, où ils contrôlent l’aéroport de la ville, à Deir ez-Zor ou à la frontière syro-irakienne pour sanctuariser un corridor terrestre allant de Téhéran à la Méditerranée.De leur côté, les Russes ne sont pas en reste. Ils détiennent des bases militaires à Lattaquié, à Tartous, à Qamischly, à Palmyre, mais aussi à Damas. Moscou a également obtenu le permis d’exploitation du gaz, du pétrole et d’autres ressources, à l’instar du phosphate, dans les territoires contrôlés par Bachar el-Assad.En effet, les deux pays mèneraient une lutte d’influence au sein même de l’armée syrienne. Alors que plusieurs régiments des troupes de Bachar el-Assad sont plus ou moins contrôlés par Moscou, la cinquième division par exemple, les Iraniens quant à eux, seraient proches de la quatrième division, contrôlée par Maher el-Assad, frère du Président syrien.Pourtant, en dépit de cette concurrence pour étendre leur influence, ils ne seraient pas dans une logique "d’adversité", nuance notre intervenant. "Il y a des points d’ancrage, des points de désaccord, mais on ne parlera aucunement d’adversaires pour caractériser cette relation bilatérale", résume-t-il.Israël, la pomme de discorde russo-iranienneMais c’est bel et bien dans le domaine géopolitique que les deux alliés auraient des visions divergentes. Par l’intermédiaire de sa présence sur le territoire syrien, l’Iran entend de surcroît maintenir une capacité de nuisance contre son ennemi israélien. À plusieurs reprises, les milices iraniennes ont construit des bases militaires non loin du Golan et de la frontière syro-libanaise. Une conduite qui lui vaudrait les foudres de Tel-Aviv.Depuis 2018, l’aviation de Tsahal aurait mené plus de mille frappes contre des casernes, des convois de munitions et d’armes iraniennes en Syrie. Le dernier raid daterait du 8 novembre dernier. Israël aurait visé la base T4, où sont stockées les armes du Hezbollah, non loin de Homs. Des bombardements dont Moscou ne se mêlerait pas. En effet, la Russie se refuse à prendre parti dans ce conflit:Pour éviter une escalade militaire, la Russie avait même obtenu en 2018 que les forces iraniennes se retirent à plus de 85 kilomètres du Golan.D’alliés militaires à concurrents économiques en passant par une opposition sur la question épineuse d’Israël, Russes et Iraniens ne coiffent pas toujours les mêmes casquettes en Syrie et dans la région.En définitive, on peut parler "d’alliance en demi-teinte", conclut Pascal Le Pautremat.
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En Syrie, la Russie et l’Iran se partagent les dividendes de la paix
20:15 22.11.2021 (Mis à jour: 22:23 08.04.2023) Une délégation russe a évoqué le dossier syrien en Iran. Après avoir aidé militairement Bachar el-Assad, Téhéran et Moscou n’en sont pas moins économiquement concurrents pour étendre leurs influences respectives sur le terrain.
"L’alliance russo-iranienne est un partenariat complexe", observe Pascal Le Pautremat, géopolitologue.
Une chose est sûre sans Téhéran ni Moscou, "Assad ne serait plus là", affirme notre interlocuteur
Après la guerre, le binôme russo-iranien entend gagner la paix en Syrie. Alexander Lavrentiev, l'envoyé spécial du Président russe pour la réconciliation syrienne, et Sergey Vershinin, vice-ministre russe des Affaires étrangères, se sont rendus le 21 novembre à Téhéran. Ils se sont entretenus avec le chef de la diplomatie iranienne, Hossein Amir Abdollahian. Passant en revue la situation régionale, ils ont surtout traité du dossier syrien. Au cours de ces échanges, le ministre des Affaires étrangères iranien a rappelé sa détermination à renforcer les liens bilatéraux avec Moscou. "La coopération conjointe russo-iranienne en Syrie a été une expérience très réussie, et est venue en réponse à la demande du gouvernement syrien", a-t-il déclaré. En effet, outre le Hezbollah libanais, seuls deux pays ont reçu l’aval de Damas pour intervenir militairement sur son territoire.
La délégation russe a également rencontré Ali Asghar Khaji, envoyé spécial du ministère iranien des Affaires étrangères pour la Syrie. Au programme: la coopération bilatérale et notamment les questions relatives à la lutte antiterroriste ainsi qu’à la reconstruction et la stabilité du pays.
Qassem Soleimani aurait convaincu Vladimir Poutine
"Les deux pays avaient leurs propres agendas sur le terrain. Mais la finalité était la même, sauver le régime d’Assad. Il y avait indubitablement une convergence des luttes sur le terrain militaire", souligne le docteur en histoire contemporaine.
Et c’est même Téhéran qui aurait joué un rôle crucial pour
convaincre Moscou d’intervenir en Syrie. Suite à un voyage en Russie en 2015 de Qassem Soleimani, l’ancien général des Forces extérieures iraniennes Al Qods assassiné par un drone américain en janvier 2020, Vladimir Poutine et son ministre de la Défense, Sergueï Choïgou, auraient pris la décision de soutenir militairement les forces de Bachar el-Assad selon Emirates Policy Center. Depuis, le binôme russo-iranien a permis aux troupes gouvernementales de recouvrer la maîtrise de près des trois quarts du pays et d’annihiler progressivement les poches djihadistes. Avant l’intervention russe de 2015, l’armée syrienne s’était repliée sur le littoral et les faubourgs de Damas.
Les deux pays participent conjointement au processus d’Astana, qui vise à résoudre pacifiquement la crise syrienne, en passant outre le système onusien. Le prochain cycle des pourparlers aura lieu à Nour-Sultan au Kazakhstan à la
mi-décembre. La Russie, l’Iran, la Turquie, les partis syriens ainsi que plusieurs observateurs seront présents.
En Syrie, chacun son pré carré
Toutefois, cette logique de coopération bilatérale aurait ses limites, "depuis 2019 et la relative pacification de la Syrie utile, on entre dans une nouvelle phase. Les alliés d’hier se positionnent dans une dynamique de concurrence économique", précise Pascal Le Pautremat. En d’autres termes, Moscou et Téhéran convoitent tous deux les dividendes de la paix en Syrie.
Téhéran a déjà obtenu l’exploitation
des mines de phosphate d’Al-Charqiya et Khunayfis. Les Perses ont également construit plusieurs centrales électriques à Banyas et à Alep et gèrent le port de Lattaquié depuis 2019. De surcroît, ils investissent majoritairement à Alep, où ils contrôlent l’aéroport de la ville, à Deir ez-Zor ou à la frontière syro-irakienne pour sanctuariser un corridor terrestre allant de Téhéran à la Méditerranée.
De leur côté, les Russes ne sont pas en reste. Ils détiennent
des bases militaires à Lattaquié, à Tartous, à Qamischly, à Palmyre, mais aussi à Damas. Moscou a également obtenu le permis d’exploitation du gaz, du pétrole et d’autres ressources, à l’instar du phosphate, dans les territoires contrôlés par Bachar el-Assad.
"Les deux pays sont également en concurrence pour avoir une place privilégiée dans l’ossature sécuritaire de la Syrie", ajoute Pascal Le Pautremat
En effet, les deux pays mèneraient une lutte d’influence au sein même de l’armée syrienne. Alors que plusieurs régiments des troupes de Bachar el-Assad sont plus ou moins contrôlés par Moscou,
la cinquième division par exemple, les Iraniens quant à eux, seraient proches de la quatrième division, contrôlée par Maher el-Assad, frère du Président syrien.
Pourtant, en dépit de cette concurrence pour étendre leur influence, ils ne seraient pas dans une logique "d’adversité", nuance notre intervenant. "Il y a des points d’ancrage, des points de désaccord, mais on ne parlera aucunement d’adversaires pour caractériser cette relation bilatérale", résume-t-il.
Israël, la pomme de discorde russo-iranienne
Mais c’est bel et bien dans le domaine géopolitique que les deux alliés auraient des visions divergentes. Par l’intermédiaire de sa présence sur le territoire syrien, l’Iran entend de surcroît maintenir une capacité de nuisance contre son ennemi israélien. À plusieurs reprises, les milices iraniennes ont construit des bases militaires non loin du Golan et de la frontière syro-libanaise. Une conduite qui lui vaudrait les foudres de Tel-Aviv.
Depuis 2018, l’aviation de Tsahal aurait mené plus de
mille frappes contre des casernes, des convois de munitions et d’armes iraniennes en Syrie. Le dernier raid daterait du 8 novembre dernier. Israël aurait visé la base T4, où sont stockées les armes du Hezbollah, non loin de Homs. Des bombardements dont Moscou ne se mêlerait pas. En effet, la Russie se refuse à prendre parti dans ce conflit:
"Il ne faut pas entrer dans une lecture binaire du conflit. L’Iran et la Russie sont alliés mais ne partagent pas les mêmes intérêts sur Israël, ce qui chagrine Téhéran. Or Moscou a de bonnes relations avec Tel-Aviv", indique le géopolitologue.
Pour éviter une escalade militaire, la Russie avait même obtenu en 2018 que les forces iraniennes se retirent à plus de
85 kilomètres du Golan.
D’alliés militaires à concurrents économiques en passant par une opposition sur la question épineuse d’Israël, Russes et Iraniens ne coiffent pas toujours les mêmes casquettes en Syrie et dans la région.
En définitive, on peut parler "d’alliance en demi-teinte", conclut Pascal Le Pautremat.