Depuis le 11 juillet, l’île de Cuba est secouée par des manifestations violentes, les participants saccageant dans plusieurs villes des magasins, renversant des voitures et s’attaquant aux autorités. La réaction de Joe Biden n’a pas tardé, puisqu’il a exprimé ses inquiétudes à travers un communiqué publié lundi, déplorant des «décennies de répression et de souffrance économique».
Des déclarations jugées «cyniques» par la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova, compte tenu de l’embargo américain qui plombe l’économie cubaine depuis les années 1960. Elle invite les responsables à se débarrasser de leur double discours et à lever cet embargo s’ils sont «vraiment préoccupés par la situation humanitaire à Cuba».
Intervention
«Laissez les Cubains, leur gouvernement et leur peuple comprendre par eux-mêmes ce qui se passe et décider de leur sort», a-t-elle ajouté, demandant de ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures d’un État souverain.
Mardi, le maire de Miami Francis Suarez a affirmé sur Fox News que Cuba «exporte le communisme à travers le monde depuis des décennies» et que cela devrait concerner la sécurité nationale américaine. À ce titre, il a suggéré qu’une intervention militaire, sous la forme de frappes aériennes, «ne devait pas être écartée».
Révolution de couleur
Pour la diplomatie russe, les États-Unis cherchent à mettre en œuvre un scénario de révolution de couleur à Cuba, l’algorithme mis en place pour les «régimes indésirables».
«La logique ici est simple. […] Tout d'abord, des sanctions leur sont imposées et des problèmes artificiels qui aggravent la situation socio-économique sont créés ou introduits de l'extérieur. Sur cette base, des tensions sont provoquées et des sentiments antigouvernementaux sont fomentés», explique Mme Zakharova.
Le gouvernement cubain a d’ailleurs accusé les États-Unis d’avoir utilisé Twitter pour accentuer ces tensions via le hashtag #SOSCuba, diffusé depuis début juillet. Julian Macias Tovar, expert espagnol en réseaux sociaux, a analysé sa progression, affirmant qu’il avait été relayé par «un réseau international de comptes liés par une idéologie» avec «souvent de faux comptes ou des comptes automatisés pour publier un grand nombre de tweets».
L’analyste américain Doug Madory, interrogé par l’AFP, est plus circonspect: «Quelqu'un envoie un tweet aux États-Unis et cela pousse les gens dans la rue à Cuba? […] J’ai du mal à y croire». Il note que certains messages de partisans du gouvernement cubain sont «étonnamment identiques», ce qui laisse à penser que ce dernier a fait usage des mêmes techniques.
Mesures annoncées
Sur fond de l’épidémie du Covid-19, une grave crise économique a mené à de fortes pénuries dans l’État insulaire. Des milliers de Cubains ont envahi les rues aux cris de «Nous avons faim», «Liberté» et «À bas la dictature». Lundi, l’Internet mobile a été coupé et l’accès aux réseaux sociaux restreint. Des affrontements ont fait des blessés et un mort, ainsi qu’une centaine de détenus.
Mercredi, le Président Miguel Diaz-Canel a annoncé une série de mesures pour apaiser les tensions. Les aliments et médicaments peuvent désormais librement entrer dans le pays sans taxes et sans limites de valeur, mais uniquement jusqu’au 31 décembre. La limite des salaires dans les entreprises d’État a été supprimée.
«Nous devons aussi tirer des enseignements de ces troubles, nous devons aussi faire une analyse critique de nos problèmes», a-t-il déclaré, reconnaissant qu’il y avait «des personnes insatisfaites» au sein du régime. «Ce que nous devons encourager, même si nous avons parfois des points de vue différents sur certains sujets, c'est d'essayer de trouver, tous, des solutions».