Dans la nuit du 4 au 5 juin, des habitants de la bourgade burkinabè de Solhan ont été massacrés. Un bilan local fait état d’au moins 160 morts, dont une vingtaine d’enfants, les autorités donnant le chiffre de 132 victimes dans cette ville de 3.000 habitants. Le Président Kaboré s’est adressé à la nation dimanche 27 juin, mais depuis aucune action concrète n’a été entreprise pour répondre à cet acte de barbarie, attribué à des groupes djihadistes.
Les Burkinabè s’attendaient à des décisions fermes et à des changements radicaux, mais Roch Kaboré est resté très politique dans son message. Le dialogue avec l’opposition a été suspendu et les populations organisent désormais des marches de protestation, détaille pour Sputnik Siaka Coulibaly, expert en sécurité.
«Les réactions des Burkinabè suite au discours, relayé par les médias et les réseaux sociaux, sont généralement négatives et expriment leur déception, parce que les mesures attendues, la démission du gouvernement et remplacement du Premier ministre et du ministre de la Défense, n’ont pas été entendues dans le discours.»
Le weekend du 3 et 4 juillet, des manifestations pacifiques sont organisées par l’opposition et la société civile partout dans le pays, mais le Président Kaboré a appelé à «surseoir aux marches et meetings projetés.»
Le dialogue avec l’opposition suspendu
Les populations s’attendaient à une nouvelle étape radicale dans la lutte contre le terrorisme, mais ce n’est pas le cas, déplore M. Coulibaly.
«Le Président appelle tous les Burkinabè à s’unir pour lutter contre le terrorisme, cependant, les mécanismes qui pourraient permettre cette action commune n’existent pas ou ne sont pas fonctionnels.»
Au cœur du désaccord entre l’opposition et la majorité au pouvoir figure un sujet qui devrait pourtant être consensuel, la sécurité. D’après l’expert, le précédent dialogue politique, qui s’est tenu mi-juillet 2019, s’était conclu sur une quasi-unanimité. Désormais, la confiance des Burkinabè vis-à-vis des autorités et des Forces de défense et de sécurité baisse, les populations ne croient plus qu’ils sont capables de stopper ou même d’endiguer les offensives terroristes.
La confiance est rompue
Le pouvoir recherchait un soutien de l’opposition politique pour se donner une marge de manœuvre supplémentaire, rajoute Siaka Coulibaly. Selon lui, l’opposition a bien compris que soutenir le gouvernement reviendrait aux yeux de l’opinion publique à être co-responsable de la situation sécuritaire.
«L’adhésion de tous les acteurs politiques à la lutte antiterroriste, qui était un acquis il y a deux ans, commence à se fissurer autour de la capacité des responsables (armée et gouvernement) à résoudre la crise sécuritaire. Tous les Burkinabè souhaitent la fin du terrorisme, mais l’unanimité n’existe plus quant à la manière d’y parvenir.»