Véritable test de légitimité pour le pouvoir, les législatives anticipées algériennes de ce samedi 12 juin n’auront pas attiré les masses. Sur les quelque 24 millions d’Algériens appelés à élire les 407 députés de l’Assemblée populaire nationale pour cinq ans, seuls 30.20% se sont présentés aux urnes. Les Algérois auraient défilé au compte-gouttes dans les isoloirs, ont indiqué les journalistes de l'AFP sur place.
«Ce chiffre rappelle la légitimité nulle d’un gouvernent qui ne représente que lui-même», tacle le géopolitologue algérien Kader Abderrahim: «Les Algériens en ont fait la démonstration, au visage de la terre entière, avec cette abstention record.»
«Pour moi, le taux de participation n’a pas d’importance»
«Ils auraient aimé avoir une participation beaucoup plus importante», affirme le maître de conférences à Sciences Po. Et ce, même si le successeur d’Abdelaziz Bouteflika prétend le contraire:
«Pour moi, le taux de participation n’a pas d’importance. Ce qui m’importe, c’est que ceux pour lesquels vote le peuple aient une légitimité suffisante», a déclaré le Président algérien.
Une prise de position qui attesterait «un cynisme incroyable», juge Kader Abderrahim.
«C’est une prise de position incroyable, dans un Etat où la source de la légitimité est la traduction du vote», poursuit-il.
D’autant que «certains disent que le taux d’abstention est même beaucoup plus important. Ce chiffre de 30% provient des autorités, elles fournissent une indication, ce n’est pas une information», poursuit notre interlocuteur.
Instabilité politique chronique
Face à la crise politique que vit le pays depuis 2019, avec la naissance du mouvement contestataire du Hirak, ces élections étaient censées apaiser le climat de tension qui règne entre une partie non négligeable de la population algérienne et ses élites dirigeantes. Il n’en a visiblement rien été.
«Ceux qui refusent le scrutin ne proposent aucune alternative réaliste»
Dans les rues, la fatalité semble dominer les esprits:
«Face à l’impasse, il ne semble pas y avoir de solution, si ce n’est entamer un véritable dialogue avec la société civile. Mais cela ne semble pas être l’orientation choisie par le pouvoir. Il s’enferme et s’isole», regrette notre interlocuteur.
Un choix risqué. En effet, mis à part renouer se dialogue, «je ne vois pas très bien comment cette situation pourrait évoluer sans passer par la violence», prévient le chercheur de l’Institut de relations internationales et stratégiques.
Le parti islamiste du MSP clame sa victoire
Dans cette séquence politique pour le moins confuse, le Mouvement de la société pour la paix (MSP), parti islamiste conservateur considéré comme modéré, a tenté de tirer son épingle du jeu. Il a affirmé «arriver en tête dans la majorité des wilayas [les préfectures] et à l'étranger». Une affirmation démentie ce dimanche par l'Autorité nationale indépendante des élections.