«La Syrie a gagné la guerre. Bachar el-Assad est toujours au pouvoir et certains pays continuent de tout faire pour nous nuire», commente un cadre du parti Baas, principale force politique en Syrie.
La victoire de Bachar el-Assad ne fait incontestablement pas que des heureux.
L’Union européenne, par l’intermédiaire du chef de sa diplomatie, Joseph Borrel, a déclaré que «ces élections n’étaient pas libres ni légitimes, elles ne vont pas contribuer au règlement du conflit ni conduire à la normalisation des relations de la communauté internationale avec le régime syrien.» Pire encore, le Conseil de l’UE a annoncé la prolongation annuelle, à compter du 1er juin 2021, des sanctions contre la République syrienne, introduites en 2011.
Bachar al-Assad réélu sans surprise président de la Syrie https://t.co/YCEuSt1xvs pic.twitter.com/SY26GVyiU0
— Courrier inter (@courrierinter) May 27, 2021
En définitive, malgré son écrasante victoire aux élections présidentielles, tout n’est pas gagné pour Bachar el-Assad. Le regard de l’étranger proche reste mitigé. Le petit émirat du Qatar a ainsi rappelé que la Syrie était loin de faire consensus dans la région. «Jusqu’à présent, nous ne voyons rien à l’horizon pour une solution politique acceptable pour le peuple syrien […] l’approche et la conduite [du régime, ndlr] n’ont pas changé», a déclaré le chef de la diplomatie qatarie, Cheikh Mohammed ben Abdulrahman Al-Thani le 28 mai à la télévision britannique Al Araby. «Il n’y a aucune motivation pour nous de rétablir des liens avec le régime syrien pour le moment», a-t-il ajouté. En d’autres termes, Doha ne semble pas prêt à normaliser ses relations avec Damas.
Reste à savoir si l’émirat suivra un autre pays qui s’est récemment rapproché du pouvoir syrien. Car Damas peut tout de même compter sur un soutien régional: après avoir fait le choix de l’opposition syrienne, les Émirats arabes unis ont rouvert leur ambassade en 2018. Pour notre source locale, qui a souhaité garder l’anonymat, «le Qatar finira par admettre son erreur».
«Le Qatar est le principal bailleur des djihadistes d’Idlib. Il finance les Frères musulmans, ainsi que plusieurs mouvances islamistes pour garder la main sur le dossier syrien. Mais tôt ou tard, la poche d’Idlib sera reprise», espère-t-il.
Le Hezbollah félicite Bachar el-Assad
Fidèle allié du gouvernement syrien, le Hezbollah a également félicité le Président syrien. Tout comme le Sultan Haïtham d’Oman, le seul pays du golfe à n’avoir jamais coupé ses liens avec Damas. Pour notre source locale, ce timide soutien arabe n’est pas anodin:
«Il y a une sorte de manichéisme autour des élections syriennes. Tous les pays arabes qui refusent de reconnaître les élections sont en partie soumis aux intérêts américains dans la région. Les autres savent que la Syrie à un rôle à jouer au Moyen-Orient», estime-t-il.
Pourtant, au sein du parti Baas, on ne perd pas espoir: «nos voisins arabes commencent petit à petit à changer de position sur la Syrie», estime notre interlocuteur, en faisant ici référence à l’Arabie saoudite. Le chef du renseignement saoudien s’est en effet rendu le 3 mai en catimini à Damas pour discuter d’une probable réouverture de l’ambassade saoudienne. Pourtant, le plus solide soutien à la Syrie ne provient pas de son environnement arabe.
La Chine prête à reconstruire la Syrie?
Les deux principaux alliés étatiques de Damas, la Russie et l’Iran, se sont empressés de reconnaître le résultat des élections. Dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, Moscou a déclaré considérer les élections «comme une affaire souveraine de la République arabe syrienne et une étape importante vers le renforcement de sa stabilité interne.» De son côté, Téhéran a qualifié «la tenue réussie de l’élection et la participation massive du peuple syrien» d’«étape importante dans l’instauration de la paix.» Après avoir aidé militairement Bachar el-Assad à reprendre une partie de son territoire, l’Iran et la Russie tentent d’aider la Syrie à réintégrer le concert des nations:
«Sans eux, la Syrie n’existerait plus. Nous pouvons compter sur nos alliés traditionnels. Ils l’ont prouvé depuis le début du conflit. Ils ont perdu des hommes, investi de l’argent pour que la Syrie ne tombe pas entre les mains des djihadistes. Et pour ça, nous leur en sommes éternellement reconnaissants», souligne-t-il.
«La Syrie cristallise un réseau d’alliance hétérogène contre les intérêts de Washington», conclut-il.