L’Agence d’information sur l’énergie du département américain de l’Énergie (EIA) a publié vendredi 28 mai ce qui pourrait être un signe historique d’une évolution du marché pétrolier mondial.
En mars 2021, pour la première fois depuis une trentaine d’années, les États-Unis ont acheté du pétrole brut à l’Iran.
Il s’agit de 1.033 millions de barils, un humble volume par rapport aux premiers fournisseurs d’or noir aux Américains: le Canada (139,869 millions de barils), la Russie (22,938 millions de barils) et le Mexique (17,616 millions de barils). Les achats de pétrole russe ont d’ailleurs atteint leur plus haut niveau depuis 2009.
Mais dans le cas iranien, с’est le contexte international qui importe et pas un chiffre.
«Les pourparlers à Vienne concernaient des point mineurs. Ils [les représentants des pays signataires, ndlr] ont accepté de lever des sanctions à l’encontre des secteurs pétrolier et maritime de l’Iran, aussi bien que des sanctions contre la Banque centrale [iranienne, ndlr], et d’autres», a annoncé M.Rohani le 20 mai dans son allocution au Conseil des ministres.
Cependant, l’Iran a annoncé plus tard ne pas disposer de données officielles à propos des informations de l’EIA sur le pétrole fourni aux États-Unis.
Pétrole iranien sous sanctions
Depuis la sortie des États-Unis du Plan d'action conjoint en mai 2018 et l’imposition de nouvelles sanctions américaines, l’Iran n’affiche aucun chiffre de ses exportations d’hydrocarbures pour ne pas dévoiler à qui il fournit du pétrole. Les estimations de plusieurs sociétés de conseil sont fondées sur des données sur l’extraction, le remplissage de réservoirs, des fournitures d’équipements et les transports maritimes.
Selon les estimations de Fereidun Fesharaki, président-fondateur du groupe de conseil FGE, spécialisé dans les questions d’énergie, les exportations pétrolières de l’Iran en mai 2018 se montaient à 3,2 millions de barils par jour, dont 2,4 millions de barils de pétrole brut, pour atteindre en février 2020 son minimum de 606.000 barils, sont 137.000 de brut, indique le New York Times.
Le fait que les sanctions imposées n’ont pas atteint leur objectif de mettre fin aux exportations pétrolières de l’Iran a été évoqué par le sénateur démocrate Christopher S.Murphy comme le «cataclysme d’une politique [de sanctions, ndlr]».
«Trump avait imposé des sanctions et nos partenaires, au lieu d’agir à l’instar des États-Unis, ont en réalité pris le parti iranien pour aider l’Iran à fonctionner même en contournant nos sanctions», a-t-il déclaré dans son intervention au forum du Middle East Institute.
La campagne de nouvelles sanctions, lancée par Donald Trump contre l’Iran, s’est avérée, selon le sénateur, un «échec spectaculaire».
Les reproches que font les États-Unis à la Chine
Une autre organisation américaine, United Against Nuclear Iran (UNAI, Uni contre l’Iran nucléaire) a indiqué au New York Times que la plupart des exportations pétrolières de l’Iran allaient depuis 2020 en Chine.
En mars 2021, selon le groupe, l’Empire du milieu a acheté presque un million de barils d’hydrocarbures iraniens, la Syrie, les Émirats arabes unis et la Malaisie étant les trois autres plus gros clients de la République islamique.
Fereidun Fesharaki, le fondateur de FGE, a précisé que, d’après ses informations, ce sont des petites raffineries chinoises qui achètent le plus de pétrole iranien à des prix fortement démarqués, la rentabilité élevée l’emportant pour ces petites compagnies sur le risque d’être frappées par des sanctions venant d’outre-Pacifique.
Le New York Times ajoute que le mécontentement de Washington quant aux importations d’hydrocarbures iraniens par la Chine a été exprimé lors d’une rencontre avec la diplomatie chinoise les 18 et 19 mars 2021 à Anchorage.
Compte tenu que la première réunion diplomatique entre l’Amérique et la Chine s’est déroulée dans une ambiance de bras de fer et d’attaques verbales réciproques, les appels américains à interrompre l’achat de pétrole à l’Iran risquent d’être à peine entendus par les autorités et les entreprises de la deuxième puissance économique mondiale.