Désormais «incontournable» dans la lutte antiterroriste, le Président togolais reçu à l'Élysée

© AP Photo / Lewis JolyLe Président togolais Faure Gnassingbé est reçu à l'Élysée par Emmanuel Macron, le 9 avril 2021
Le Président togolais Faure Gnassingbé est reçu à l'Élysée par Emmanuel Macron, le 9 avril 2021 - Sputnik Afrique, 1920, 09.04.2021
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Le Président togolais Faure Gnassingbé est reçu ce 9 avril par Emmanuel Macron. Une visite inédite, à laquelle Paris aurait été longtemps réticent mais qui aurait été favorisée aujourd'hui par l'engagement du Togo contre le terrorisme. Sauf que le pragmatisme français agace les opposants togolais.

Le chef de l’État togolais Faure Gnassingbé effectue depuis ce 7 avril 2021 une visite de travail en France, la première sous le mandat d’Emmanuel Macron.

«Le Président de la République togolaise et le Président français Emmanuel Macron auront de larges échanges de vues sur la question de la lutte contre le terrorisme et la stabilité du Sahel» a déclaré à Sputnik, à la veille de la rencontre, Robert Dussey, ministre togolais des Affaires étrangères, de l’intégration africaine, en charge des Togolais de l’extérieur.

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Pour le chef de la diplomatie togolaise, c’est la «position de Faure Gnassingbé, et sa connaissance pointilleuse des problèmes qui minent la sous-région ouest africaine» qui nécessitent qu’il soit «consulté par ses pairs non seulement africains, mais aussi européens parmi lesquels le Président français Emmanuel Macron».

De manière plus détaillée, Emmanuel Dupuy, président du think tank Institut Prospective et sécurité en Europe (IPSE), énumère d’autres sujets de préoccupation pour la France qui sont de nature à meubler le tête-à-tête Gnassingbé-Macron: «Il y a l’élargissement de la zone d’influence des groupes armées du Sahel vers la Guinée, et de Boko Haram* du Nigeria vers les pays limitrophes. Il y a aussi la problématique de la piraterie maritime sur laquelle le Togo a beaucoup travaillé lorsqu’il présidait le Conseil de sécurité des Nations unies entre 2012 et 2013. Il y a, en outre, le sentiment antifrançais qui se développe en Afrique francophone», dit-il à Sputnik.

Emmanuel Dupuy pense que cette rencontre ne peut pas escamoter «le contexte post électoral de la présidentielle de février 2020 au Togo et la perspective des prochaines élections régionales qui probablement auront lieu au Togo au même moment que celles prévues en France».

Une marque de reconnaissance

Depuis son arrivée au pouvoir en 2005 dans des conditions controversées, le Président du Togo a été reçu par tous les prédécesseurs de l'actuel chef de l’État français.

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Cette rencontre à l'Élysée a été «tellement voulue par les autorités togolaises qui ont tenté de l'organiser à plusieurs reprises» selon Emmanuel Dupuy. Toutefois, elle n’a pu se tenir depuis l’arrivée de Macron au pouvoir pour plusieurs raisons.

«D'abord parce que les opposants togolais, notamment ceux qui sont à l'étranger, y étaient très hostiles. Et il faut dire que la diaspora togolaise est très influente en France. Il y a en outre le caractère un peu taciturne du Président français qui a fait que Gnassingbé a pu difficilement imposer son agenda. J'ajouterais que l'ambassadeur de France au Togo de 2017 à 2020, Marc Vizy, n'a pas été favorable» à cette visite, détaille l'analyste.

Les contestations systématiques dont ont fait l'objet chacune de ses réélections n'étaient sans doute pas pour faciliter ce rapprochement. Mais cette visite officielle a finalement pu s'organiser car «le Président togolais est aujourd’hui engagé sur des questions qui sont aussi d’intérêt pour la France» précise à Sputnik Jean-Christophe Bas, président de Global Compass, un organisme de conseil en Stratégie et Développement International basé en France, et ancien responsable du dialogue stratégique paneuropéen à la banque mondiale.

«Le Président Faure Gnassingbé a montré sa détermination pour endiguer cette vague de terrorisme [dans la région ouest-africaine] qui est aussi un sujet de préoccupation majeure pour la France. Je pense justement que c’est un élément qui a bien pu favoriser cette visite de travail» assure-t-il.

L'engagement du Togo pour la paix et la sécurité dans la région ouest-africaine se manifeste aujourd’hui principalement à travers son soutien au Mali depuis le coup d'État de l'été 2020. Lomé appuie notamment le groupe de soutien à la transition pacifique au Mali qui regroupe les pays amis et des institutions financières et internationales. Or le Mali est justement un pays-clé de la lutte antiterroriste dans laquelle est engagée la France à travers l’opération Barkhane déployée depuis le 1er août 2014 dans la région du Sahel.

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Sur le plan national, les autorités togolaises sont pleinement engagées dans la lutte contre la menace terroriste en déployant dans le sud comme dans le nord du pays «des bataillons militaires qui veillent sur l’intégrité du pays» sous le contrôle «d’un général français», précise Jean-Christophe Bas.

«Tout cela mis ensemble, avec un budget militaire assez renforcé, fait que le Président Faure Gnassingbé apparaît aujourd’hui comme un des hommes incontournables de la région ouest-africaine dont la France a besoin dans la poursuite de sa lutte contre le terrorisme» ajoute-t-il.

Une visite qui frustre l’opposition

Mais le tête-à-tête franco-togolais de ce vendredi frustre les opposants de Gnassingbé, lesquels se sont déchaînés sur les réseaux sociaux.

Kodjo Agbeyome fait partie des principaux détracteurs. Cet ancien Premier ministre, actuellement en exil, conteste toujours la réélection de Faure Gnassingbé pour un quatrième mandat à la présidentielle du 22 février 2020.

Un autre opposant, Nathaniel Olympio, qui dirige le Parti des Togolais, rappelle à dessein comment Macron, au début de son mandat, insinuait qu'il refuserait de recevoir Gnassingbé.

Pour Nathaniel Olympio, «Macron exigeait de Faure Gnassingbé une transition démocratique et une alternance».

La vidéo dans laquelle le Président français était interpellé, en 2018 au Québec, par des manifestants togolais, est d'ailleurs devenue virale sur les réseaux sociaux.

Aidé par l'armée, Faure Gnassingbé a accédé au pouvoir en 2005 au terme d'un scrutin controversé qui a fait des centaines de morts. Il succédait à son père, Eyadéma Gnassingbé, qui a disparu après 38 ans de pouvoir sans partage.

*Organisation terroriste interdite en Russie

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