Le sujet revient à l’ordre du jour alors que les relations entre Moscou et Washington sont au plus bas. En visite en Chine ce lundi 22 mars, le chef de la diplomatie russe a abordé la dédollarisation et l’autonomie face aux systèmes de paiement internationaux. Une stratégie que les autorités russes cherchent à mettre en œuvre depuis plusieurs années et qui trouve un soutien de taille auprès de l’empire du Milieu.
«Il faut réduire les risques de sanctions en renforçant notre autonomie technologique, en passant à des règlements en monnaies nationales et mondiales autres que le dollar», insiste Sergueï Lavrov devant les médias chinois.
«Nous devons nous éloigner progressivement de l’utilisation de systèmes de paiement internationaux contrôlés par l’Occident», poursuit-il.
Cap sur la dédollarisation
La Russie a annoncé à plusieurs reprises étudier des possibilités pour réduire sa dépendance à l’égard du dollar. Déjà en 2020, dans une interview accordée au Times of India, M.Lavrov présentait une «politique visant à dédollariser progressivement l’économie».
D’après les données de la Banque centrale russe, la part du dollar dans les échanges entre la Russie et la Chine dans le cadre d'accords commerciaux dépassait 90% de 2013 à 2015, tandis que fin 2018 elle était d’environ 50%. Depuis le deuxième trimestre de 2019, la part de l'euro dans les échanges russo-chinois dépasse constamment celle du dollar. Par ailleurs, celle du rouble dans les règlements entre les deux pays est passée de 1% en 2013 à 10% l'année dernière.
La dédollarisation a été abordée à plusieurs reprises au sein des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Le groupe travaille entre autres à réduire leur dépendance au dollar. En 2020, Binod Singh Ajatshatru, directeur de l’institut indien des BRICS, a déclaré dans une interview au média russe Gazeta.ru que le système unique de paiement entre les pays membres du groupe fonctionnera à pleine capacité en 2025. Avec ce système dénommé BRICS Pay, les habitants des pays concernés pourront payer leurs commandes passées au sein du groupe.
L’impact négatif des sanctions américaines
Quant aux risques de nouvelles sanctions américaines, elles pourraient avoir un impact négatif sur les États-Unis eux-mêmes, ce dont Washington semble être conscient.
En janvier, le Service de recherche du Congrès (CRS), le think tank du Congrès américain, a émis un rapport dans lequel il notait que les États-Unis utilisaient souvent leur monnaie comme levier dans leur politique étrangère, notamment en restreignant l'accès au dollar et aux marchés financiers pour l'Iran, la Russie et le Venezuela.
Selon ce compte rendu, cette approche pourrait avoir des conséquences négatives, car pour réduire leur dépendance au dollar, les pays en question examinent d’autres moyens, notamment les devises numériques et les systèmes de paiements sans dollar.
«De nombreux gouvernements étrangers visés par les sanctions financières américaines et leurs partenaires économiques étudient et créent de plus en plus de moyens de réduire leur dépendance vis-à-vis du dollar», soulignaient alors les analystes.
Déconnexion de SWIFT
Dans le contexte des tensions russo-américaines, le Kremlin a commenté lundi 22 mars une éventuelle déconnexion de la Russie du système bancaire SWIFT comme mesure de rétorsion. Dmitri Peskov, porte-parole de la présidence russe, a indiqué aux journalistes que «cette situation nous oblige à rester vigilants».