Vrai pas en avant pour la protection de l’environnement ou diversion politique? Annoncé par Emmanuel Macron le 14 décembre dernier lors de la Convention citoyenne pour le climat, le référendum pour inscrire la «lutte contre le dérèglement climatique» dans l’article 1 de la Constitution a été présenté ce mercredi 20 janvier en Conseil des ministres. Pour être soumis aux citoyens français, il devra toutefois être adopté dans les mêmes termes par les deux Chambres.
«Il y a déjà la Charte de l’environnement. Ce mandat sera celui du blabla: 98% de ce que l’on est en train de faire est déjà inscrit dans la loi. C’est la République du brassage d’air», lance François-Michel Lambert.
Promulguée par Jacques Chirac en 2005, la Charte de l’environnement reconnaît les droits et les devoirs fondamentaux relatifs à la protection de l’environnement. Ce texte a en effet déjà valeur constitutionnelle; par conséquent, à quoi bon apporter une nouvelle modification de la Constitution?
Diversion politique?
Le député écologiste n’est pas le seul à voir une «diversion politique» dans le projet d’Emmanuel Macron. À gauche comme à droite, les critiques avaient fusé contre le Président de la République, accusé de se servir de cette proposition de référendum comme d’une caution écolo alors même que les 149 propositions émises par la Convention citoyenne pour le climat sont pour le moment restées lettre morte.
Référendum sur le climat. Macron fait un coup de com pour masquer son mauvais bilan écologique. Cela ne changera rien : la charte de l’environnement a déjà une valeur constitutionnelle !
— Bruno Retailleau (@BrunoRetailleau) December 14, 2020
Le porte-parole du Parti socialiste, Rachid Temal, n’avait pas mâché ses mots: «Non seulement le Président ne respecte pas la Convention citoyenne pour le climat en ne reprenant pas ses propositions, mais il dresse un écran de fumée en annonçant un référendum qui n’a d’autre but que de masquer ses insuffisances.»
C’est donc l’action du gouvernement vis-à-vis de la protection de l’environnement qui se trouve visée par l’opposition. Très critique, François-Michel Lambert tacle la politique menée par l’exécutif sur ce sujet. Laquelle relève selon lui du «vide sidéral».
«Quand mettra-t-on les mains dans le cambouis pour l’écologie? On sait aujourd’hui que les riches génèrent du CO2 dans des proportions colossales, contrairement aux plus pauvres. Quand nous attaquerons-nous à cela?» s’interroge l’élu.
«Une seule mesure est allée dans le bon sens: l’arrêt des voitures thermiques en 2040, une mesure que nous devons à Nicolas Hulot», reconnaît-il toutefois. Mais l’arrêt du glyphosate, l’interdiction de l’usage des néonicotinoïdes et l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes ne suffisent pas à convaincre notre interlocuteur.
«Pour le glyphosate, on a déjà dépassé de cent jours la date limite d’utilisation qu’Emmanuel Macron lui-même avait fixée. [...] LREM nous fait croire que le retrait du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes suffit à faire d’eux des écologistes. Si sauver la planète, c’était préserver quelques hectares de bocage nantais, on serait bien aise de l’avoir fait», ironise le député LEF.
J’ai demandé au gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour que l’utilisation du glyphosate soit interdite en France dès que des alternatives auront été trouvées, et au plus tard dans 3 ans. #MakeOurPlanetGreatAgain
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) November 27, 2017
«Réforme superfétatoire»
Reste que ce référendum sur le climat pourrait ne jamais voir le jour. Dans Le Journal du dimanche du 9 janvier dernier, le président (LR) du Sénat, Gérard Larcher, décrivait une «réforme superfétatoire». La Chambre haute du Parlement, où la droite est majoritaire, pourrait donc faire capoter le référendum sur le climat.
À un an et demi de la présidentielle et alors que l’épidémie de Covid-19 accapare l’attention, il n’est donc pas certain que la question référendaire puisse être soumise au peuple français dans les mois qui viennent. Cette perspective ne semble en tout cas pas déchaîner les passions. Selon un sondage de l’Ifop réalisé pour la société Depanneo ce mercredi 20 janvier, seuls 36% des électeurs se disent prêts à se déplacer pour voter. Pire, 64% y voient «avant tout une manœuvre politique» du chef de l'État.