L’extrémisme au Sahel, «n’est pas une question de sexe, de statut social ou de niveau d’éducation» — exclusif

© Photo ECPADLes Groupements de commandos de montagne (GCM) au Mali
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Comment les territoires du Sahel gèrent-ils les personnes radicalisées et la réinsertion des repentis? Dans un entretien exclusif pour Sputnik, le responsable de la cellule de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent du G5 Sahel explique les spécificités du travail dans cette région.

La part de l’Afrique dans l’impact économique mondial du terrorisme est passée de 3,1% en 2007 à 49,2% en 2019. La zone sahélienne a notamment connu une période terrible: le nombre de personnes radicalisées a explosé par rapport à la dernière décennie. Le G5 Sahel a créé à l’époque la cellule spéciale de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent pour mener un travail de prévention et contrôler le processus de radicalisation.

La lutte contre l’extrémisme violent

Depuis 2015, un travail important a été entrepris pour contribuer à la stabilisation de la paix au Sahel. La lutte contre l’extrémisme violent comprend plusieurs volets qui intègrent la prévention de la radicalisation, explique Amadou Sall, responsable de la cellule de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent du G5 Sahel.

«Nous avons créé des antennes dans chacun des pays du G5, elles prennent en charge les questions de prévention dans les ministères des Affaires religieuses. Chaque antenne est en relation avec différents acteurs comme les représentants des confessions religieuses, des organisations des services civiques, des centres de recherches.»

La cellule travaille sur des plans d’action au niveau local. Elle entreprend également des démarches d’appui aux États en matière de conseil afin que les pays membres du G5 Sahel puissent avancer chacun à leur manière dans une direction commune.

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Aujourd’hui, le Niger est en train de faire valider au niveau politique sa stratégie de lutte contre l’extrémisme violent, relate l’expert. Dans le même temps, le Burkina Faso et le Tchad élaborent leur propre méthode. La cellule les accompagne pour renforcer leurs capacités initiales.

Les jeunes de ces cinq pays «ne sont pas à l’abri»

En matière de conflictualité, certains États sont moins touchés que d’autres. Par exemple, la Mauritanie n’a pas connu d’attaque terroriste depuis 2011. Mais, insiste l’intervenant, le travail de prévention doit être fait de la même manière dans tous les territoires de la zone.

«L’extrémisme violent est un phénomène qui n’épargne aucun jeune. Ce n’est pas une question de sexe, ce n’est pas une question de statut social, ce n’est pas une question de nationalité, ce n’est pas une question de niveau d’éducation. Tous les jeunes de ces cinq pays ont besoin, de façon constante, de continuer à renforcer leur résilience.»
Il est évident que des régions de certains États sahéliens sont en conflictualité directe et les jeunes de ces zones-là sont plus exposés que les autres.

Une méthodologie commune de déradicalisation

La cellule est en train de développer une méthodologie qui va aider les structures politiques au sein des pays membres du G5 Sahel à avoir une certaine approche de la déradicalisation, explique M.Sall. Les États sont de plus en plus confrontés à des populations de revenants, de repentis, qui ont besoin de réinsertion.

«Nous sommes dans une phase de reconstitution d’une méthodologie cohérente, inspirée de ce qui se fait ailleurs et qui peut potentiellement être adapté à un autre pays. C’est une manière de réinsérer les repentis sans frustrer ceux qui n’ont pas été engagés et qui sont de la communauté. Une fois la méthodologie affinée, nous la partagerons avec d’autres États.»

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Le phénomène de radicalisation existe depuis longtemps, mais la tendance à le retranscrire par son aspect idéologique ou religieux est nouvelle et perturbante, estime le responsable.

«C’est un amalgame que l’on voit de plus en plus souvent, au niveau local, dans les conflits intercommunautaires qui n’ont souvent plus rien à voir avec la dimension idéologique ou politique ou prétendument religieuse. Les crises que nous traversons désormais ont des racines dans les conflits intercommunautaires qui ont ressurgi à la faveur de la situation nouvelle.»
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