Derrière les défections chez DLF, la crédibilité de Le Pen et Dupont-Aignan face à Macron

© AFP 2024 JOEL SAGETNicolas Dupont-Aignan et Marine Le Pen
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Nicolas Dupont-Aignan abandonné par les siens. Rejoignant le Rassemblement national et suivi par 60 cadres de Debout La France, Jean-Philippe Tanguy, son ancien bras droit, espère contribuer à l’élection de Marine Le Pen en 2022. Une victoire qu’estime impossible Antoine Chudzik, ancien frontiste, parti quant à lui chez DLF. Entretiens croisés.
«Nous voulons l’union!», tel est le mot d’ordre que lance Jean-Philippe Tanguy au micro de Sputnik.

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L’ex-bras droit de Nicolas Dupont-Aignan a claqué la porte de Debout la France (DLF) le 23 novembre dernier pour rallier le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen. Après son départ, le parti souverainiste s’est vidé de pas moins de soixante de ses cadres, dont Alexandre Loubet, directeur de la communication, et Anne-Sophie Frigout, vice-présidente.

Une belle prise de guerre pour le RN et un coup dur pour l’homme politique qui avait, durant la Présidentielle de 2017, brisé le tabou imposé à la droite par la gauche: l’alliance avec le Front national. Mais depuis lors, le ton avait radicalement changé chez DLF, au grand dam de ses membres.

«Monsieur Dupont-Aignan refuse toute alliance, refuse toute coalition, tout en étant incapable de justifier sur le fond ces divisions», regrette Jean-Philippe Tanguy.

Selon ce dernier, Nicolas Dupont-Aignan n’aurait pas dû refuser les propositions d’alliance que Marine Le Pen a formulées depuis sa défaite au second tour des Présidentielles, dans la mesure où «il n’y avait plus de différences programmatiques majeures entre nos deux mouvements qui justifient des divisions stériles», suite au «contrat de gouvernement» passé entre NDA et Marine Le Pen.

RN-DLF, des «divisions stériles»?

Une posture d’autant plus injustifiée, aux yeux de Jean-Philippe Tanguy, que ceux qui s’opposaient vertement à un tel rapprochement avec le RN auraient claqué la porte du parti lors de cette alliance infructueuse. Ne seraient alors restés que les partisans d’une alliance avec le RN.

«Il ne s’agit pas de s’absorber l’un l’autre, cela n’a jamais été ma position, mais nous estimons que depuis 2017 nous aurions dû travailler ensemble», estime Jean-Philippe Tanguy.

«On pouvait accepter une division aux Européennes, parce que monsieur Dupont-Aignan s’était engagé à l’époque –sur mon conseil– sur la stratégie des “Amoureux de la France”, un rassemblement des forces de droite anti-Macron, complémentaire du FN», poursuit l’ancien cadre de DLF. L’aventure avait toutefois tourné en déconfiture avec une série d’évictions, dont celle de l’un de ses cofondateurs, Jean-Frédéric Poisson, ou encore celle d’Emmanuelle Gave, présidente du think tank Institut des Libertés. La sanction des urnes fut sans appel: 3,5% des suffrages nationaux au soir du 26 mai.

«Monsieur Dupont-Aignan, d’une part, a fait exploser en vol les “Amoureux de la France” –on ne s’est retrouvé qu’avec des gens de DLF, cela ne servait à rien– et en plus, depuis, il s’est radicalisé dans une opposition stérile à la personne de Marine Le Pen, le tout, au détriment de l’intérêt national», analyse l’ancien cadre Debout la France.

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Un point qui l’oppose radicalement à Antoine Chudzik, conseiller régional Bourgogne Franche-Comté, qui a parcouru le chemin inverse, ayant quitté les rangs du RN pour rejoindre ceux de DLF.

«On a besoin d’une candidature à droite […], mais cela ne peut pas être celle de Marine Le Pen», rétorque l’élu local au micro de Sputnik.

Pour cet ancien assistant parlementaire de l’eurodéputée frontiste Sophie Montel (qui a quitté le parti au même moment que son vice-président, Florian Philippot), le RN «reste, à tort ou à raison, un parti repoussoir», tandis que «la force de DLF» serait «sa capacité à parler à toute la droite.» Antoine Chudzik en veut pour preuve le baromètre de popularité de l’IFOP-Fiducial pour Paris Match et Sud Radio, publié en septembre 2020, qui avançait que Nicolas Dupont-Aignan était «la personnalité la plus appréciée chez les sympathisants de droite et du RN, devant Marine Le Pen ou Xavier Bertrand.»

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Une autre étude de l’IFOP-Fiducial pour le JDD et Sud Radio, d’octobre 2020, créditait par ailleurs celui-ci «jusqu’à 8%» des suffrages en 2022. «Autant de voix qui ne vont pas à Marine Le Pen», tance-t-il dans une tribune publiée dans Valeurs actuelles le 30 novembre, évoquant une dynamique que le RN aurait entrepris de «tuer dans l’œuf».

«C’est un coup tout petit orchestré par Marine Le Pen», accuse en retour NDA, cité par Le Parisien. «Après avoir canonné Marion Maréchal, viré Philippot, elle fait une manip' de seconde zone contre le seul qui l’ait soutenu au second tour de la Présidentielle, ce n’est pas net», ajoute-t-il.

«Quelle autre figure politique jouit de la même popularité chez les LR et chez les RN, dont les électeurs sont, logiquement, économiquement et sociologiquement différents?», insiste Antoine Chudzik au micro de Sputnik.

Pour lui, Debout la France «doit rester un parti indépendant» et non devenir une «succursale» du Rassemblement national. Face à ces défections «des plus RN-compatibles», celui-ci relativise donc: «Cela clarifie les choses. Ceux qui voulaient vraiment que DLF et le RN se fondent, ils l’ont fait ensemble.»

Duel RN-DLF, quid des électeurs des Républicains?

Pour Chudzik, rejoindre le RN revient à prendre une impasse, condamnant toute alliance «ponctuelle» avec d’autres parties de droite, en l’occurrence Les Républicains. À l’inverse, aux yeux de Jean-Philippe Tanguy, la possibilité d’une alliance avec LR n’est qu’une chimère:

«Le sectarisme vient de l’appareil LR, qui est un appareil petit-bourgeois, de cadres soumis à la pensée unique, qui sont à mille lieues de leurs électeurs», assène Jean-Philippe Tanguy.

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Comme illustration de cette droite toujours engluée «dans le piège de François Mitterrand», qui a instauré le barrage autour du Front national, l’ancien conseiller politique de Nicolas Dupont-Aignan évoque le récent cas de l’élection départementale du Gard. Scrutin où Les Républicains refusèrent la proposition d’union des droites prônée par le Rassemblement national qui aurait pourtant permis la victoire de leur candidat, offrant ainsi le département au Parti socialiste.

Selon Jean-Philippe Tanguy, Marine Le Pen aurait tiré les enseignements de sa défaite et deux camps se dessineraient pour 2022: le camp «national» et le camp «mondialiste». Une bipolarisation où Les Républicains n’auront pas leur place. Les chances de voir les électeurs LR modérés voter pour un «Hollande de droite, comme Monsieur Bertrand», quand ils auront «l’original» en la personne d’Emmanuel Macron, seraient nulles, ouvrant ainsi un boulevard à Marine Le Pen.

Boulevard qui s’est jusqu’à présent toujours transformé en cul-de-sac. En sera-t-il autrement en 2022?

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