Le Grand Avignon restera à droite. À 39 voix contre 29, le maire Divers droite de Vedène, Joël Guin, l’a emporté dès le premier tour face à Cécile Helle, la maire socialiste d’Avignon et ex-députée du Vaucluse, qui briguait pour la deuxième fois la présidence de la communauté d’agglomération. Pour autant, si ce scrutin local a attiré l’attention de médias nationaux, c’est parce que le maire de Vedène a pu l’emporter à deux voix près (la majorité absolue étant fixée à 37 voix), grâce au soutien des mairies Rassemblement national (RN) siégeant au Conseil communautaire, qui n’avaient pas présenté de candidature.
Un accord que LR aurait aimé voir «passer sous les radars»
C’est un accord gagnant-gagnant qui a permis à la droite de conserver la communauté d’agglomération du Grand Avignon et au maire du Pontet, Joris Hébrard, d’en obtenir la deuxième vice-présidence. «On a vu des élus locaux, de terrain, se mettre d’accord, loin de ces consignes [des partis, ndlr.]. Ils ont trouvé un accord», commente au micro de Sputnik l’eurodéputé RN Thierry Mariani, ex-ministre sarkozyste.
«C’est vrai que l’exemple d’Avignon mérite d’être signalé parce qu’on voit que, respectant encore des consignes d’un autre âge, la direction des Républicains aimerait bien que cet accord local passe sous les radars…»
Pour autant, il n’existe pas de consensus à la direction du RN pour voir dans cette alliance un modèle à décliner à l’échelle nationale: certains refusent de s’enfermer dans l’union des droites, tandis que d’autres, à l’exemple de l’équipe de Louis Aliot, récemment élu à Perpignan, ont opté pour le rassemblement à droite. Ce qui explique peut-être la discrétion du parti à ce sujet.
Mais lors du vote intercommunal, ces derniers n’ont pas présenté de liste afin de soutenir Joël Guin, le maire sans étiquette de Vedène. Comme le soulignaient France bleue la veille du scrutin, alors que celui-ci se défendait d’avoir demandé le soutien du RN, Christian Jacob, président des Républicains, se disait «très attentif à ce qu’il n’y ait pas d’union des droites LR-RN».
«Christian Jacob est quelqu’un de valeur, c’est quelqu’un de l’époque de Chirac, qui malheureusement n’a pas compris que l’époque de Chirac était révolue […] et qui continue à réciter son catéchisme des années 80», tacle Thierry Mariani
Lui-même avait claqué la porte des Républicains (LR) début 2019 pour rallier le RN, atterré par la frilosité de l’ex-parti de la majorité présidentielle à défendre ses convictions «de droite». L’ancien ministre dresse le parallèle entre les cas avignonnais et marseillais, les Républicains ayant préféré perdre la deuxième ville de France plutôt que d’accepter les voix du Rassemblement national, mené par Stéphane Ravier.
Marseille: pour Guy Teissier (LR), "il n'est pas question de faire un accord avec le Rassemblement national" pic.twitter.com/1JgOr6YhMv
— BFMTV (@BFMTV) July 2, 2020
Rassemblant près de 20% des suffrages à l’échelle de la ville, le chef de file du RN marseillais avait tendu la main à la droite dite «de gouvernement» afin d’éviter le basculement à gauche de la ville. Celui-ci venait pourtant d’être éliminé à quelques centaines de voix près du 7e secteur de la cité phocéenne, à l’issue d’un duel face au candidat LR David Galtier, soutenu par les candidats de la gauche, qui avaient retiré leurs listes.
«Catéchisme des années 80»
«La droite a perdu Marseille, mais les consignes nationales ont été respectées pour Les Républicains, et c’est toujours la même phrase imbécile qu’on entend, “on a sauvé nos valeurs”. Je ne sais pas quelle valeurs ils ont, maintenant…»
La veille du troisième tour des Municipales à Marseille, annoncé particulièrement serré et rattrapé par des soupçons de fausses procurations, Martine Vassal, candidate des Républicains, protégée de Jean-Claude Gaudin, avait cédé sa place à Guy Teissier, député LR des Bouches-du-Rhône et conseiller municipal du 5e secteur. Pour autant, celle-ci avait exigé qu’il démissionne s’il venait à être élu grâce aux voix du Rassemblement national.
En démocratie, pour Marseille, toutes les discussions sont souhaitables en vue du rassemblement pour un projet d’avenir. Toutes, sauf une: négocier avec le RN ! Avec la droite républicaine et le centre, nos valeurs ne sont pas négociables. Je serai intransigeant. #Municipales2020
— Renaud Muselier (@RenaudMuselier) July 2, 2020
Une mesure barrière qui exaspère Thierry Mariani. «Les Républicains sont devenus simplement un cartel de sortants qui ont pour seul objectif de protéger leur pré carré […] et qui se moquent complètement des intérêts de la France», se désole-t-il, fustigeant une droite «assignée à domicile par la gauche».
LR, «héritiers directs de l’ordre du Temple solaire»
Bien que le RN n’ait pas réalisé les résultats escomptés lors de ces Municipales, ce scrutin reste aux yeux de l’eurodéputé un «vrai succès», dans la mesure où il a prouvé que le front républicain «n'est plus qu'une vaste fumisterie» et surtout que les maires RN étaient à ses yeux capables de bien gérer des communes. Les élus du parti de Marine Le Pen ont été reconduits dans la majorité des villes de plus de 10.000 habitants qu’ils administraient, souligne-t-il. Pour Thierry Mariani, ceux qui agitent encore le drapeau des libertés et de la République en danger ne sont que de «tristes pitres qui ne représentent plus rien».
«En réalité, l’obstacle réside uniquement dans cette droite qui aujourd’hui se suicide et qui, en réalité, collabore sans aucun problème avec Emmanuel Macron et les anciens socialistes qui sont avec lui, mais par protectionnisme électoral refuse tout accord ou tout rapprochement avec le Rassemblement national. C’est une sorte de suicide organisé, je ne sais pas si vous vous souvenez de l’ordre du Temple solaire, aujourd’hui Les Républicains sont les héritiers directs de l’ordre du Temple solaire.»