En ce 18 novembre, Yaoundé, la capitale du Cameroun, étouffe sous une chaleur suffocante. Sur l’une des multiples collines, au carrefour Nsam, à la périphérie de la ville, le soleil accablant ne parvient pas à doucher l’enthousiasme des nombreux riverains attablés derrière des comptoirs de fortune ou dans des kiosques.
Si la vie semble se dérouler normalement ici, les habitants ont pourtant en mémoire la scène macabre du début de ce mois. C’est en effet non loin de ce carrefour populaire, dans un snack-bar, que l’explosion d'une bombe artisanale a fait au moins neuf blessés graves le 1er novembre dernier.
Sophie K., vendeuse de maïs à la braise, s’en souvient encore.
«J’étais à la maison ce jour-là quand j’ai entendu la déflagration. J’ai d’abord cru à l’explosion d’une bouteille de gaz avant d’apprendre plus tard que c’était une bombe. Ça fait quand même peur, je l’avoue. Personne ne sait quand ce genre de choses peut arriver», relate-t-elle à Sputnik.
À 500 m de là, sur les lieux de l’explosion, plus aucune trace de la tragédie. Le parfum du neuf et l’état du mobilier témoignent des travaux récemment réalisés. Seule une grande grille barre l’entrée principale et permet, nous confie un employé, de mieux assurer la sécurité des consommateurs. «Nous avons déjà rouvert les portes en renforçant le dispositif de sécurité. En dehors de la grille, il y a des caméras de surveillance et nous fouillons chaque sac à l’entrée. Il faut rassurer les clients», confie-t-il.
À l’autre bout de la ville, au lieu-dit Bata Mokolo, un quartier populaire, les habitudes n’ont pas vraiment changé à l’Antacky Bar, également victime d’une explosion en août dernier.
Dans l’espace déjà rouvert, gérant et consommateurs savourent l’instant sans vraiment se préoccuper des allées et venues de commerçants ambulants, chargés de marchandises de toutes sortes.
«Quelle que soit la prudence à observer, si de tels événements doivent se produire, on n’y peut rien. C’est Dieu qui nous garde», lance un client avant d’achever le contenu de sa bouteille.
Si Yaoundé reste pour le moment épargnée par les crises sécuritaires qui déchirent le pays, les explosions enregistrées ces derniers mois préoccupent tout de même. Depuis le début de l’année, la capitale camerounaise a recensé quatre attentats à la bombe artisanale. Des dégâts matériels ont été déplorés, parfois des blessés, mais pas de pertes en vies humaines. Pour le moment, aucune attaque n’a été revendiquée et le pouvoir de Yaoundé n’a évoqué aucune piste jusqu’ici.
Les autorités prescrivent la vigilance
Face à la montée de ce climat d’insécurité dans la capitale, Naseri Paul Bea, le gouverneur de la région du Centre, a pris une série de mesures, dont l’interdiction de transporter des colis suspects dans les lieux de grande affluence.
«Les engins explosifs étant transportés dans des sacs, on a pris des dispositions pour que ces derniers soient systématiquement fouillés et que les contenants suspects dans les bars soient interdits. Dans les grandes surfaces, ceux qui le peuvent doivent utiliser des détecteurs de métaux», a expliqué Naseri Paul Bea face à la presse, au sortir d’une rencontre d’évaluation de la situation sécuritaire le 17 novembre à Yaoundé.
Le gouverneur de la région a également annoncé des opérations coup de poing dans les lieux où la criminalité est élevée et a insisté «sur le filtrage des entrées et sorties de la ville de Yaoundé». Les autorités prescrivent la vigilance de tous les citoyens et invitent conjointement les populations à une franche collaboration avec les forces de l’ordre.
D’après des sources sécuritaires approchées par Sputnik, ce serait plutôt aux «débordements de la crise séparatiste dans les régions anglophones» qu’il faudrait imputer le climat d’insécurité qui règne à Yaoundé.