Insultes sur la santé mentale d’Emmanuel Macron, appel au boycott des produits français: la joute verbale entre le Président turc et le Président français ne perd pas en intensité. De nombreux dirigeants européens ont d’ailleurs exprimé leur soutien après les violentes attaques subies par le chef de l’État français.
Plutôt qu'un agenda positif la Turquie choisit les provocations, les actions unilatérales en Méditerranée et maintenant les injures.
— Charles Michel (@eucopresident) October 25, 2020
C’est intolérable.
Respect pour l'Europe et ses États membres #EUCO
Un geste qui rassurera certainement l’Élysée mais qui a malgré tout du mal à se concrétiser matériellement. Jusqu’à présent, les puissances européennes semblent inertes face aux provocations anatoliennes. Que ce soit sur la Syrie, la Libye, la Méditerranée orientale ou le Haut-Karabakh, Istanbul semble œuvrer en totale impunité. Seul le Canada, membre de l’Otan, a annoncé le 5 octobre suspendre la vente de certaines armes à la Turquie du fait de son implication dans le conflit au Haut-Karabakh.
Bruxelles aux abonnés absents face à la Turquie
Isolée, la France n’aurait toutefois pas manqué de fermeté. Alexandre Del Valle, géopolitologue, spécialiste des relations entre l’Europe et la Turquie, et du monde arabo-musulman, souligne d’ailleurs les efforts du Président Macron par rapport à ses voisins européens face à l’agression turque:
«La réponse du gouvernement français est assez mesurée, mais elle n’est pas faible. Aucun pays européen n’a déjà réagi comme ça après des menaces ou des insultes de la part d’Erdogan.»
À titre de comparaison, celui-ci rappelle qu’Angela Merkel avait été traitée de nazie par le Président turc pour avoir défendu des Kurdes. La dirigeante allemande était alors restée «presque impassible». Dans une situation d’agression verbale du même type, «la France a réagi fermement. Dans le discours déjà, mais aussi en rappelant son ambassadeur de Turquie pour consultation», estime le spécialiste de la Turquie.
L’Europe pourrait-elle mettre la Turquie économiquement à genoux?
Et ce n’est pas la première fois que l’Hexagone essaie de faire entrer Erdogan dans le rang, bien que ses tentatives n’aient pas toujours été couronnées de succès.
«Au-delà des mots et des symboles, depuis plusieurs mois, la France essaye de bloquer l’expansionnisme turc au Moyen-Orient et en Méditerranée. La France y a envoyé un sous-marin nucléaire, a vendu des rafales à la Grèce, a protégé Chypre au sud de l’île, et elle a également envoyé des frégates en Méditerranée», affirme Alexandre Del Valle.
Selon lui, «la France est le seul pays européen qui fait réellement obstacle à la Turquie, à l’exception de la Grèce, de Chypre, voire de l’Autriche». Des positions plutôt étonnantes des plus grandes capitales européennes. L’Union européenne reste à ce jour le premier partenaire économique de la Turquie, avec une part de marché de 41% en 2019. L’UE dispose donc –en théorie– d’un puissant levier sur Ankara.
D’autant qu’Emmanuel Macron, en plus de s’opposer à Recep Tayyip Erdogan aux portes de l’Europe, doit aussi lui tenir tête sur un deuxième front, intérieur cette fois:
«Aujourd’hui, la volonté d’Emmanuel Macron de porter une loi sur le séparatisme islamiste qui va empêcher la Turquie d’avoir des écoles où elle enseignera sa vision islamo-nationaliste est aussi très ennuyeuse pour Ankara. En effet, Erdogan veut utiliser la diaspora comme un levier de puissance extérieur. Il est donc important pour le Président turc d’encadrer les musulmans et les citoyens turcs.»
Mais là encore, le soutien de Bruxelles et des pays d’Europe semble tout aussi virtuel.
Nous sommes aux côtés de la France suite à l’attentat terroriste qui a coûté la vie à Samuel Paty.
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) October 25, 2020
We stand by France’s side in the wake of the terrorist attack that killed Samuel Paty. https://t.co/IsSvCDXy5y