Le couvre-feu, solution pour endiguer la propagation du Covid-19? Selon des informations de LCI, le gouvernement envisagerait d’instaurer ce dispositif dans certaines grandes métropoles françaises touchées par l’épidémie comme Paris.
Plusieurs scénarios seraient à l’étude concernant les horaires. En effet, il pourrait débuter à partir de 20h, 21h voire 22h, précise le média. Si la décision n’est pas encore arrêtée, le Président de la République doit s’exprimer ce mercredi 14 octobre devant les journalistes de TF1 et France 2. Compte tenu de l’accélération du nombre de cas positifs au Covid-19 et la tendance des pays voisins, les mesures sanitaires pourraient se durcir.
L’objectif affiché par l’exécutif est d’éviter un confinement généralisé.
Éviter un confinement généralisé
Le couvre-feu a déjà été expérimenté en France d’Outremer, notamment en Martinique, en Guadeloupe ou encore en Guyane, où il est toujours en vigueur. Gérard Larcher a mentionné l’exemple de cette dernière, avançant que le couvre-feu aurait permis de «réduire de 50% la circulation virale.»
Contacté par Sputnik, le docteur Laurent Toubiana, épidémiologiste à l’INSERM, fait part de son incompréhension face à la possible mise en place de mesures extrêmement contraignantes en métropole.
«Ce type de mesure serait décalée par rapport à la réalité sanitaire. Selon moi, nous assistons à l’application du principe de précaution mais dans une version inédite et poussée à l’extrême […] Ces mesures risquent probablement d’avoir des conséquences sanitaires à tous points de vue sur les populations», s’insurge l’épidémiologiste.
Pour le Dr Toubiana, «l’épidémie s’est produite entre le 1er mars et le 1er mai», ainsi le couvre-feu n’aurait-il «pas d’intérêt».
«L’incertitude sanitaire», «très néfaste à terme»
L’épidémiologiste enfonce le clou: «ce que l’on observe actuellement ne correspond pas à une épidémie, mais une élévation de l’incidence d’indicateurs signifiants que sont les hospitalisations, les réanimations ou les décès mais cette augmentation reste à des valeurs très faibles qui correspondent à un phénomène connu, des cas sporadiques en nombre insuffisant pour provoquer un embrassement équivalent à celui que nous avons vécu entre mars et avril».
Et de poursuivre, «le type de dynamique des incidences que nous voyons actuellement ne correspond pas à la définition d’une phase épidémique, et encore moins au concept de “vague épidémique”.Une phase épidémique se caractérise par une augmentation rapide et importante d’individus faisant des formes graves et de décès.» Pour illustrer son propos, il prend pour exemple la dynamique des hospitalisations en comparant les incidences au cours de la phase épidémique de mars-avril et celle que nous vivons depuis 1 mois:
«le 1er septembre, alors que l’imminence de la deuxième vague était annoncée depuis déjà 15 jours, 4.604 personne étaient hospitalisées pour COVID en France. Un mois plus tard, le 1er octobre, ce nombre atteignait 6.652 soit une augmentation de 2048. Le niveau équivalent du 1er septembre d’hospitalisation intervient le 19 mars lors de la vraie période épidémique (soit 2 jours après le confinement,) avec 4.461 individus hospitalisés. Un mois plus tard (le 19 avril) il y avait 30.610 hospitalisés soit une augmentation de 26.149 individus».
Ainsi «lors de la phase épidémique et pour une période équivalente, l’augmentation des hospitalisations a été 12,8 fois plus forte que pendant cette pseudo “deuxième vague”», explique-t-il.
Pour obtenir ce résultat, le Dr Toubiana se réfère au chiffre fournis par le site d’information du gouvernement.
Au-delà des chiffres, Laurent Toubiana fustige le fait de «maintenir des gens dans une situation d’incertitude sanitaire», une attitude qui pourrait «être très néfaste à terme». Désormais, les «gens sont prêts à accepter n’importer quoi: porter des masques à l'extérieur et pourquoi pas le couvre-feu», déplore-t-il. «L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) définit la santé comme “un état de complet bien-être physique, mental et social, [qui] ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité”», rappelle l’épidémiologiste.
«Cela doit être pris en considération lorsque l’on prend des mesures», conclut Laurent Toubiana.