L’annonce a suscité des remous dans l’opinion au Cameroun. Dès le 15 octobre prochain, la douane va procéder à une nouvelle manière de collecter certains droits sur l’acquisition de téléphone portable ou de tablette. Ces appareils numériques seront taxés 33% de leur valeur de sortie d’usine une fois activés en territoire camerounais et les droits seront directement payés par l’utilisateur.
Tout est là! https://t.co/XdVOL6jY5O
— Minette Libom (@LibomMinette) October 10, 2020
Concrètement, dès qu’un nouvel appareil sera détecté pour la première fois sur un réseau camerounais, un SMS sera adressé à l’utilisateur lui indiquant le montant à régler. Le ministère des Postes et télécommunication souligne que «les téléphones portables et terminaux ayant déjà été connectés au moins une fois au Cameroun avant le 1er octobre sont considérés comme étant déjà dédouanés et ne sont pas concernés par le dispositif de droits et taxes du gouvernement».
1/Les téléphones portables et les tablettes électroniques peuvent être importés en suspension des droits et taxes de douane, en dehors des cas où l’importateur procède au paiement spontané des droits exigibles.
— Minette Libom (@LibomMinette) October 11, 2020
Depuis quelques jours, Minette Libom Li Likeng, la ministre des Postes et télécommunications, tente de rassurer dans une série de messages publiés sur les réseaux sociaux.
«Il ne s’agit pas d’une nouvelle taxe»
Elle explique qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle taxe mais uniquement d’un mécanisme différent de collecte.
Ces explications n’ont pas suffi, toutefois, à rassurer.
«Je n’arrive pas à comprendre pourquoi c’est le consommateur final qui doit payer cette taxe. 33%, c’est énorme. Nous avons déjà du mal à nous en sortir et le gouvernement veut nous asphyxier», se désole Georges Ntoh, jeune commerçant à Yaoundé au micro de Sputnik.
«Mon problème n’est pas de payer une taxe mais qu’est-ce qu’ils font de cet argent? Qu’est-ce qui avance dans le pays?», s’insurge Jules T., informaticien.
Malgré les justifications du gouvernement, de nombreux internautes s’interrogent encore sur le bien-fondé de cette mesure et de nombreux messages de colère fusent sur la toile. À grand renfort de hashtags, les consommateurs exigent des explications, mais surtout la suppression de cette mesure.
On ne développe pas une économie déjà à terre par les impôts et taxes.
— Dr. Joseph Marcel Eboa (@CoachingMeNow) October 11, 2020
En le faisant, on la tue un peu plus, on détruit par la même occasion le pouvoir d'achat et affaiblit également la consommation.#EndPhoneTax
En effet, le prélèvement de cette nouvelle taxe est une exigence de l’article 7 de la loi de Finances 2019 rappelée dans une récente communication gouvernementale. Selon une disposition de ce texte, rendue effective en octobre 2020, les téléphones portables ainsi que les tablettes électroniques ou numériques peuvent être importés en suspension des droits et taxes de douane, à charge pour leurs acquéreurs de procéder au paiement desdits droits via un prélèvement effectué notamment lors des émissions téléphoniques.
Un impôt de trop?
Ces droits et taxes sont prélevés et reversés au plus tard le 15 de chaque mois au service des douanes compétent par toutes les sociétés de téléphonie.
Si les consommateurs dénoncent une nouvelle taxe, la ministre des Postes soutient, elle, qu’il s’agit plutôt d’une collecte numérique, d’une dématérialisation des procédures afin de lutter contre la fraude et la contrebande.
Ce qui a changé sur la collecte de la taxe sur le téléphone, c'est le déplacement de la frontière physique à la frontière numérique. Pour en finir avec la fraude.
— Minette Libom (@LibomMinette) October 10, 2020
Pour Dieudonné Essomba, économiste, il s’agit surtout pour l’État «de rechercher des moyens pour pallier son problème de ressources».
«Partout où il y a une niche, l’État la visite pour ratisser large. C’est une réaction tout à fait compréhensible […] L’État a pensé que c’était un secteur très prospère dans lequel un impôt pourrait générer d’importantes recettes», commente l’expert au micro de Sputnik.
Cependant, plusieurs leaders politiques et de la société civile comme Cabral Libii, député de l’opposition, plaident déjà pour la révision de cette loi. À quelques jours de l’entrée en vigueur de la mesure, le débat est loin d’être clos.
Non, non et non! Je retourne la question dans tous les sens.
— Cabral LIBII (@CabralLibii) October 12, 2020
Il n'est pas possible de payer cette taxe sur le téléphone. Cette loi de finances doit être impérativement révisée.