Comme un seul homme, les filles et fils de la Côte d’Ivoire, tous bords confondus, ont salué la mémoire d’AGC.
Hommage unanime sur les qualités de l’homme
Le Président Alassane Ouattara, dans le communiqué officiel lu par le secrétaire général de la présidence de la République Patrick Achi, a laissé entrevoir tout l’amour qu’il avait pour son «fils», son «frère», son «plus proche collaborateur depuis 30 ans».
«Ce grand serviteur de l’État dont devraient s’inspirer tous les compatriotes, ce compagnon loyal et fidèle dont tous rêvent, ce camarade courageux et téméraire que tous les hommes politiques recherchent.»
Et même Patrick Achi avouera, le 14 juillet lors de l’hommage de la Nation à son illustre fils, qu’au fil de ses charges dans le gouvernement depuis plusieurs années, il n’a pas connu tâche plus lourde que de lire ce communiqué officiel-là.
Des ministres, des cadres, des membres de son parti, le Rassemblement des républicains (RDR) qui s’est ensuite intégré dans la coalition RHDP (Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix), les responsables des partis d’opposition, des personnalités connues, des citoyens lamba, illustres inconnus… tous ont pleuré la perte d’un grand homme. Une fois de plus, fait assez rare pour être souligné, la Côte d’Ivoire a su taire sa divergence pour s’unir dans la douleur.
Même la presse ivoirienne, qualifiée à tort ou à raison d’être «partisane» a barré à sa Une, dès le lendemain du départ d’Amadou Gon Coulibaly. Déjà, à l’annonce de la nouvelle, les médias d’État en particulier l’Agence ivoirienne de presse (AIP), Fraternité Matin, la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI) auxquels s’ajoute de Centre d’information et de communication gouvernementale (CICG) ont sorti la grande artillerie pour parler et faire parler du chef du gouvernement, durant les jours de deuil national.
Les honneurs de la Nation
Un deuil national de huit jours a été décrété, du 10 au 17 juillet 2020. Le 14 juillet, AGC s’est vu remettre une distinction de Grand-Croix dans l’Ordre national à titre posthume lors de l’hommage de la Nation, avec les honneurs militaires. Il a également reçu l’hommage du RHDP –sa famille politique– au Parc des sports de Treichville (Abidjan Sud) le 15 juillet suivi d’une messe demandée par les ministres catholiques, ainsi que des témoignages des 31 régions ivoiriennes le 16 juillet à Korhogo (Nord, région du Poro), avec des prières à son endroit.
Chef jusqu’au bout, sa dépouille a été transportée d’Abidjan à Korhogo par avion militaire, puis a sillonné dans le command-car la capitale du Poro jusqu’à Gbondala et le stade municipal, puis la mosquée centrale où la prière mortuaire a été officiée par le nouveau guide de la communauté musulmane, Cheick Al-Aïma Mamadou Traoré, avant l’inhumation dans la stricte intimité familiale. Honorable et majestueux.
AGC, la culture, la foi et l’art
Homme multidimensionnel, Amadou Gon Coulibaly l’était assurément, selon les témoignages. Initié au Poro, comme le recommande la pure tradition Sénoufo, AGC en avait gardé les enseignements. Discret, patient, avec une capacité d’écoute remarquable, selon ses proches, «Le lion» –son autre surnom– avait gardé les pieds dans la tradition.
C’était également un homme de foi, un musulman qui a accompli en 2018, aux côtés de son «père» Alassane Ouattara, le Hadj, cinquième pilier de l’islam. En outre, selon des artistes, AGC aimait l’art et aidait beaucoup les créateurs, a témoigné Noël Dourey, qui préparait même la sortie d’une chanson à la gloire de celui qui a reçu en décembre 2019, le prix Mécène d’Or des artistes ivoiriens et d’Afrique.
Feu Gon Coulibaly, le jeu d’alliances remis au goût du jour
Depuis l’annonce du décès du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, une frénésie s’est emparée des différents groupes ethniques ivoiriens tant sur les réseaux sociaux, dans les médias que dans le quotidien. Le jeu d’alliances interethniques s’est intensifié et est même allé au-delà des traditionnels alliés des Sénoufos, en l’occurrence les Koyaga, le Yacouba (Dan), les Gouro et les Lobi. Les alliés des alliés s’y sont invités à cœur joie, permettant un tant soit peu d’avoir le sentiment d’être unis dans la diversité.
Dans son message lu par le ministre Jean-Claude Kouassi, la reine des Baoulé, Nanan Akoua Boni II, a rappelé le pacte entre le Grand-Centre, notamment les Baoulé et les Sénoufos. Pacte signé entre leurs patriarches, Félix Houphouët-Boigny et Péléforo Gbon Coulibaly, arrière-grand-père du défunt Gon Coulibaly, qu’il convient de renouveler.
Amadou Gon Coulibaly et Korhogo, sa terre d’origine
Être enterré à Korhogo, auprès des siens, fut certainement l’une des volontés d’Amadou Gon Coulibaly. Il aimait cette ville, ses habitants, sa tradition. Anciennement député et maire de Korhogo, AGC a marqué de ses empreintes la cité du Poro.
Le dernier voyage
Le dernier hommage auquel il a eu droit fut à la grande mosquée de Korhogo, avant l’ultime voyage. Dans le sermon qu’il a prononcé le vendredi 17 juillet 2020 à la prière de Djoumah, avant la prière mortuaire, le secrétaire exécutif de Conseil supérieur des imams, des mosquées et des affaires islamiques en Côte d’Ivoire (Cosim), Ousmane Diakité, a souligné des qualités de ce fidèle musulman qui fut, comme le recommande le Prophète, utile aux autres. Il a indiqué que selon le prophète Mouhammad (PSL):
«Le meilleur des hommes est celui-là même qui est utile aux hommes.»
Élève brillant, travailleur acharné, consciencieux, rigoureux, méthodique, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly avait une capacité de synthèse remarquable, un sens aigu du travail bien fait, il était un perfectionniste, témoignent des membres du gouvernement. Rigoureux, sans être méchant, humble, affable, prévenant, «Le lion» marquait l’esprit de tous ceux qui le côtoyaient, par son intelligence.
Mort à la tâche, le fils de Gbonblé et de Hadja Fatoumata Coulibaly, qui avait vu le jour le 10 février 1959 à Abidjan, repose depuis le 17 juillet dernier dans le caveau familial du quartier Soba de Korhogo, sur la terre de ses ancêtres.
«Le Roi (Lion) est mort, vive le Roi!»