Armes de guerre à Dijon: «c’est de plus en plus facile, ils ont le réseau pour s’en fournir»

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Les vidéos de bandes armées jusqu’aux dents dans les quartiers sensibles dijonnais ont choqué la France. Des images qui ne devraient pourtant pas surprendre, estime Fabien Vanhemelryck, secrétaire général du syndicat Alliance Police nationale, au micro de Sputnik. Il tire la sonnette d’alarme sur l’insécurité rampante des zones criminogènes.

On se croirait dans le 93 ou les quartiers nord de Marseille, mais c’est bien dans la paisible capitale de la Bourgogne que ces vidéos d’une extrême violence ont été tournées.

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Certains habitants du quartier sensible des Grésilles à Dijon ont exhibé –en représailles à une expédition punitive de dizaines d’individus tchétchènes venus venger le passage à tabac d’un adolescent de leur communauté– des armes de guerre qui n’ont rien à envier à celles de milices syriennes… Fusils d’assaut, fusils à pompe, armes de poing: tout un arsenal de guerre, qui n’aurait pas non plus déparé à une réunion de la NRA (National Rifle Association, la puissante association pro-armes américaine).

Pourtant, en 2019, le département de la Côte-d’Or était en dessous de la moyenne nationale dans la plupart des catégories de la délinquance, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur.

​Si les images sont particulièrement impressionnantes, Fabien Vanhemelryck, secrétaire général du syndicat Alliance Police nationale, explique au micro de Sputnik France que c’est une réalité à laquelle les forces de l’ordre sont confrontées depuis bien longtemps:

«Ces images choquent toujours. Par contre, autant moi que les autres fonctionnaires de police, nous ne sommes pas surpris. Certains collègues dijonnais nous ont expliqué qu’il y a une quinzaine d’années déjà, ils faisaient remonter des notes comme quoi il y avait déjà des kalachnikovs en circulation là-bas.»

En 2018, l’hebdomadaire Le 1, repris par RTL, avançait, après avoir mené l’enquête, qu’il y avait près de 15 millions d’armes en circulation en France, dont la majeure partie échappe au regard de la loi.

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L’enquête avait montré que parmi les armes en circulation, certaines d’entre elles étaient héritées de la résistance, mais que la plupart avaient fait leur chemin depuis les Balkans –en particulier de l’ex-Yougoslavie– jusque dans les quartiers sensibles de France. Une AK-47 s’achète pour 300€ dans les Balkans, et jusqu’à dix fois plus cher dans l’Hexagone:      

«Malheureusement, c’est de plus en plus facile, ils ont le réseau pour se fournir en armes, que ce soit ici ou ailleurs. Les armes circulent facilement dans tous les quartiers sensibles de toutes les villes de France. Il y a un réseau parallèle qu’il faut réussir à démanteler, mais une fois démantelé, il faut que la justice fasse son travail.»

En cause, un sentiment grandissant d’impunité des délinquants: «Malheureusement, c’est un constat flagrant de ce qu’il se passe en France, la situation dégénère au fil du temps. Ça fait 20 ans que l’insécurité grandit et qu’il y a des défaillances de l’État en la matière, et on ne fait rien pour que cela s’arrange. Le sentiment d’impunité grandit chaque jour un peu plus, et les choses ne vont jamais s’améliorer comme ça.»

Une police abandonnée par les politiques?

Comment en est-on arrivé à un tel niveau de laxisme pour que des délinquants se permettent d’exhiber en plein jour, en pleine rue, des armes de guerre? La faute, selon Fabien Vanhemelryck, à une justice trop souvent laxiste.

«Il faut des sanctions fortes, une répression forte et une réponse pénale forte. Et pour tous types d’agissements, pas que ceux-là. Aujourd’hui, il faut que la justice comprenne qu’on n’interpelle pas les voyous avec des bouquets de fleurs. Quand on les interpelle, il faut les sanctionner fortement. Ça nous éviterait d’interpeller 20 fois les mêmes individus.»

Également en cause selon le policier, «certains idéologues, La France insoumise en tête, qui n’arrêtent pas de dire que la police est trop répressive ou trop armée». Des propos accusés d’être «hors –sol» par les forces de l’ordre.

​Au contraire, pour lutter contre des délinquants toujours plus lourdement armés et déterminés, les forces de l’ordre réclament plus de moyens afin de pouvoir leur tenir tête.

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«Est-ce normal aujourd’hui que vous ayez 15 effectifs pour toute la ville de Dijon qui vont à l’affrontement en face de cent Tchétchènes? Est-ce normal aujourd’hui de demander des renforts à Besançon ou à Mâcon, à plus de 100 km? Et que se passe-t-il dans ces deux villes pendant ce temps-là?», déplore le secrétaire général d’alliance.

Selon lui, pour des raisons purement politiques, l’État ne soutient les forces de l’ordre que de manière superficielle: «la police est aujourd’hui à la rue et il est grand temps que le Président de la République prenne le dossier en main. Ce n’est pas le tout de constater, de s’alarmer, encore faut-il traiter les causes.»

Au-delà du simple cas de la police, il faut que chacun fasse son travail explique-t-il: La justice doit aider les forces de l’ordre en appliquant des peines qui découragent la récidive et l’État doit également jouer son rôle pour accompagner socialement des individus en marge de la société.

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