Relayée sur les réseaux sociaux, la vidéo de la chute de ces statues, réalisée par des activistes qui se présentent comme anti-béké et anti-héritage colonial, a provoqué une vague d'indignation le jour où l'île commémorait son abolition de l'esclavage.
Le jour de commémoration de l'abolition de l'#esclavage esclavage en #Martinique, deux statues de l'abolitionniste Victor Schoelcher ont été détruites. L'une à Fort-de-France et l'autre sur la commune de Schoelcher. (via Martinique 1) pic.twitter.com/fMy8rLZYu3
— Jeremy Audouard (@Jeremyaudouard) May 23, 2020
«Schœlcher n'est pas notre sauveur»
Une jeune femme soupçonnée d'avoir participé à l'action a été placée en garde à vue à l'issue de laquelle elle a convoquée au tribunal le 9 juillet, selon son avocat Me Dominique Monotuka.
«Schœlcher n'est pas notre sauveur», ont écrit dans un communiqué les manifestants qui sont aussi ceux qui ont bloqué pendant plusieurs semaines fin 2019 et début 2020 les hypermarchés chaque week-end, accusant leurs propriétaires, souvent de grandes familles locales (béké), d'être à l'origine de la pollution au chlordécone, un pesticide longtemps utilisé dans les bananeraies et suspecté d'être à l'origine de cancers de la prostate.
Histoire de l’abolition de l’esclavage en Martinique
Le 22 mai 1848, les esclaves qui s'étaient rebellés contre les colons arrachaient leur liberté en Martinique après plusieurs jours d'émeutes violentes. Des faits qui intervenaient moins d'un mois après la signature le 27 avril à Paris du décret d'abolition de l'esclavage notamment porté par Victor Schoelcher.
Les manifestants demandent d'ailleurs que la bibliothèque et la ville qui portent le nom de Shoelcher soient renommées au profit d'acteurs locaux de l'abolition de l'esclavage et de l'émancipation des Noirs.
Condamnation de cet acte de vandalisme
Dans un communiqué, le maire de Fort-de-France,Didier Laguerre condamne «avec la plus grande fermeté» la destruction de ces statues et appelle à «ne pas céder à la tentation de réécrire l'histoire».
Pour le député Serge Letchimy, ces «actes de vandalisme [...] portent atteinte au travail de l'homme dont on ne peut nier le rôle et la contribution dans l'abolition de l'esclavage en 1848».
La Fondation pour la Mémoire de l'Esclavage a expliqué samedi dans un communiqué que «ce combat a réuni les personnes réduites en esclavage qui n'ont cessé de se révolter contre leur état et l'ont fait encore le 22 mai 1848 en Martinique, et des militants abolitionnistes comme Victor Schoelcher».
Sur Twitter, l'écrivain martiniquais Patrick Chamoiseau a dénoncé la récupération politique du travail de Victor Schoelcher, mais appelé à respecter l'homme.
La ministre des Outre-mer, Annick Girardin, a estimé sur Twitter que s'il est «permis à tous de questionner l'histoire, cela nécessite un travail méthodique et rigoureux. En aucun cas cela ne doit se faire à travers la destruction de monuments qui incarnent notre mémoire collective».