À peine plus de 70 députés étaient répartis dans un hémicycle clairsemé, souvent ceux en mesure de déplacer dans le centre de Paris ce 28 avril. Les autres se sont contentés d’un discours retransmis par visioconférence, avec une possibilité d’intervention limitée.
C’est le cas de Valérie Boyer, députée Les Républicains (LR) des Bouches-du-Rhône. Son vote contre le plan de déconfinement présenté ce 28 avril a dû se faire par procuration et sans pouvoir intervenir, explique-t-elle à Sputnik au téléphone, depuis son domicile dans le Sud-Est.
Je voterai contre le plan de deconfinement du #Gouvernement. Non à la suspension des #libertés et de la #démocratie. Non au traçage de la population. Non à une réouverture des #écoles dans le flou total. @lesRepublicains pic.twitter.com/o1FZ118J9G
— Valérie Boyer (@valerieboyer13) April 28, 2020
Ce 28 avril au matin, le chef de file des députés LR Damien Abad a annoncé que «la droite ne voterait pas» et s'abstiendrait «massivement» sur le plan de déconfinement présenté par le Premier ministre. En cause, le refus la veille, par le Président de l’Assemblée Richard Ferrand, de donner un temps de réflexion aux parlementaires pour discuter du plan. «Là, on nous demande de voter pour un discours que l’on n’entend pas correctement et pour lequel on n’a pas une journée ou même une demi-journée de recul pour discuter des propositions», déplore Valérie Boyer.
«Dans le monde d’Emmanuel Macron, le vote ne sert à rien. Mais on ne peut pas sans arrêt piétiner les institutions. Les Français ont plus que jamais besoin de la représentation nationale à l’heure où ils sont confinés et en situation de privation de liberté. Je ne comprends pas pourquoi on ne peut pas trouver 24 heures pour discuter de ça. On a besoin d’explications.»
L’Assemblée nationale, simple formalité pour le gouvernement? C’est en tout cas le constat de la députée qui dénonce un «fonctionnement dégradé» de la démocratie.
«Quand on prône l’"unité nationale", ce n’est pas pour masquer les défaillances du pouvoir. On est en France, dans une démocratie qui va mal avec des institutions déjà très bousculées par la Macronie. Nous sommes dans une situation très dégradée: chaos économique, chaos social…»
Évoquant les émeutes en banlieue, Valérie Boyer pointe des «problèmes de sécurité partout». «Il y a des émeutes et on est toujours, 42 jours après le début du confinement, dans l’incertitude. Dans ces circonstances, il ne faut pas priver la représentation nationale de débats.»
La Sécurité sociale au cœur du dispositif, plutôt que le secteur privé
Se disant scandalisée par la gestion par le gouvernement de l’approvisionnement des masques de protection, Valérie Boyer rappelle que la Sécurité sociale pouvait être un acteur décisif dans la crise du Covid-19.
«Je propose que la Sécu reprenne la main sur la distribution des masques», a-t-elle suggéré. Et d’ajouter, faisant référence au traçage numérique privé de l’épidémie: «On n’a pas besoin de vendre notre âme, nos données de santé et notre intimité à Appel et Google.»
Face au tollé, et devant le manque de finalisation du projet de l’application StopCovid, Aurore Bergé, la députée et porte-parole du groupe La République en marche au Palais-Bourbon, avait annoncé, juste avant l’allocution d’Édouard Philippe, que le gouvernement renonçait à le soumettre au vote. Selon des sources parlementaires avancées par l’AFP, le projet controversé de traçage des données mobiles n’était «techniquement clairement pas prêt». Pour autant, la majorité avait décidé de lier cette question au train de mesures de déconfinement présentées à l’Assemblée.
S’agit-il d’un simple report, alors que l’entreprise spécialisée dans les services numériques française Capgemini s’est dite intéressée? Pour Valérie Boyer, cette tentative du gouvernement constituerait une ligne rouge.
«On nous parle de déconfinement et en même temps, on veut faire passer le tracking. Je ne peux pas l’accepter. C’est comme si on me demandait à moi, représentante de la Nation, de donner un chèque en blanc au gouvernement à toutes les étapes de décision de ce confinement.»
Et la députée de conclure: «Ç’aurait été une mise en scène.»