Dans le contexte de la crise financière provoquée en Algérie par la chute des prix du pétrole, quasiment seule ressource en devises du pays, le Premier ministre Abdelaziz Djerad a qualifié de «catastrophique» la situation du pays héritée de l’ancien pouvoir du Président déchu Abdelaziz Bouteflika.
Les décisions annoncées par le Président algérien sont-elles en mesure de juguler la crise? Sputnik a posé la question à l’ancien ministre algérien du Trésor Ali Benouari (1991-1992), expert international en finances et président du parti non agréé Nida El Watan (l’Appel de la Patrie).
Ainsi, il affirme que l’économie algérienne «est gérée avec des réflexes nord-coréens alors qu’elle est largement libéralisée et imbriquée dans le système mondial d’échanges». «L’urgence du moment est d’éviter de basculer dans l’horreur vénézuélienne», met-il en garde, soulignant que «le gouvernement algérien devrait se rappeler trois évidences».
La première est relative à l’endettement extérieur
Dans ce sens, l’expert explique que le rôle de l’endettement extérieur «sera d’atténuer notre gigantesque déficit de balance des paiements», soutenant que «les montants susceptibles d’être ainsi mobilisés devront en effet, pour être sans danger, exclure toute forme de crédits à court terme destinés à la consommation». «Ils devront être réservés au renforcement du potentiel productif du pays et à des projets tournés vers l’exportation», souligne-t-il, rappelant qu’«ils sont donc utiles seulement s’ils viennent appuyer une politique de développement dans un cadre strictement planifié».
La dévaluation de la monnaie
Sur ce registre, l’ex-ministre du Trésor affirme également qu’«il n’y a pas d’alternative à la dévaluation qui seule est en mesure de rétablir à bref délai nos déficits internes et externes». «La planche à billets n’est qu’une dangereuse fuite en avant qui ne fait qu’aggraver la situation», met-il en garde, emboîtant aussi le pas au chef de l’État concernant sa décision sur le financement non conventionnel.
Le taux de change
M.Benouari explique sur le taux de change que, qu’il soit fixé par le marché (le cas des pays occidentaux, de la Russie, etc) ou l’administration (cas de l’Algérie), «il a comme rôle d’ajuster les sorties et les entrées de devises». «C’est pourquoi la valeur du rouble, par exemple, a baissé au lendemain de la décision saoudienne de baisser les prix de son pétrole et d’augmenter sa production», rappelle-t-il, avant de s’interroger: «comment envisager que notre dinar puisse ne pas en être impacté? Doit-on prendre les russes pour des fous?»
Conclusion
«S’attaquer à la fois aux causes et à leurs effets simultanément me paraît être le grand défi de l’heure.
Hésiter à le faire conduira le pays tout droit vers la catastrophe», prévient-il. Et de conclure: «Une crainte parfaitement ressentie par la majorité des Algériens».