Émeutes en Iran suite à la hausse de l’essence: une nouvelle révolution est-elle à craindre?

© REUTERS WANA NEWS AGENCYUn homme remplit le réservoir de sa moto dans une station-service, après que le prix de l'essence ait augmenté à Téhéran, en Iran, le 15 novembre 2019.
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Une puissante vague de manifestations secoue l’Iran depuis le 15 novembre, après l'annonce d'une hausse drastique du prix à la pompe. Plusieurs banques ont été la cible d’incendies criminels. A quel point la situation peut-elle dégénérer?

Les protestations en Iran déclenchées par une hausse du prix du carburant sont en partie liées au retrait des États-Unis de l’accord de Vienne, estime dans un entretien accordé à Sputnik Omid Shukri Kalehsar, expert iranien indépendant en matière de sécurité énergétique, établi à Washington.

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Pourquoi cette hausse?

«La sortie des États-Unis de l’accord sur le nucléaire n’a pas permis à l’Iran d’exporter autant de pétrole qu’il aurait dû. […] Comme l’Iran ne peut pas exporter du brut, il ne peut pas satisfaire ses besoins en argent, la République islamique n’ayant pas d’autre alternative valable aux exportations d’hydrocarbures», précise-t-il, ce qui explique la décision du gouvernement iranien d’augmenter le prix de l’essence.

Et de préciser que l’Iran avait besoin d’argent pour combler son déficit budgétaire.

«Le retrait des États-Unis de l’accord sur le nucléaire a provoqué une hausse de pratiquement tous les prix en Iran. C’est un choc inouï sur le marché de la consommation pour la classe moyenne. […] Par ailleurs, les salaires et le pouvoir d’achat des ouvriers en Iran sont inférieurs à ceux en Arabie saoudite, en Afghanistan, au Pakistan, en Irak, en Turquie et dans d’autres pays du monde. Même en Azerbaïdjan et au Turkménistan, leur pouvoir d’achat est supérieur à celui en Iran», constate Omid Shukri Kalehsar.

L’ingérence d’une force tierce?

Bien que les protestations aient dégénéré, provoquant des heurts avec la police, la situation s’est stabilisée, mais on ressent l’impact psychologique d’une force tierce, confie à Sputnik le politologue iranien Emad Abshenass.

«L’impact de forces extérieures sur les troubles en Iran est évident. Cela se rapporte tout particulièrement aux États-Unis. Il y a un an et demi, Trump a déclaré que les États-Unis se retiraient de l’accord sur le nucléaire. Et le but de l’instauration de dures sanctions consiste à contraindre les Iraniens à descendre dans la rue pour protester contre le gouvernement [afin de le renverser, ndlr]. À présent, les États-Unis abusent de la situation, notamment de la hausse des prix de l’essence pour provoquer un puissant désordre », estime l’expert iranien.

Nikolaï Kojanov, maître de conférences russe à l'Université du Qatar, pense pour sa part que le facteur d’une force tierce dans les protestations contre la hausse du prix de l’essence en Iran est plutôt hypothétique.

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«On peut sans doute dire que ces protestations ont été provoquées par des tentatives de fomenter en Iran une "révolution de couleur". Les objectifs des sanctions américaines consistent à faire pressions sur le pouvoir politique à Téhéran, y compris en déstabilisant ses assises et en affectant la vie de l’essentiel de sa population. Évidemment, de ce point de vue, on peut parler d’une ingérence extérieure», détaille l’analyste.

Pour lui, il n’y aura pas pour autant de révolution en Iran, et il est peu probable que les protestations actuelles débouchent sur un remplacement du pouvoir.

«Les méthodes employées par les autorités en Iran seraient celles "de la carotte et du bâton", soit une dure répression de la partie la plus active des protestataires et une tentative de s’entendre avec la partie la moins active et la plus massive, y compris par des concessions», résume Nikolaï Kojanov.

Á l’origine des manifestations

L'Iran s'est embrasé à la suite de l’annonce de l'augmentation du prix de l'essence. Les personnes qui protestent depuis le 15 novembre contre la hausse surprise du prix du carburant ont incendié des banques dans plusieurs villes. Les autorités ont coupé l’accès à Internet dans le pays. Le prix du carburant a doublé en Iran, passant de 15.000 à 30.000 rials (de 11 à 22 centimes d’euros), sur décision du gouvernement.

Le prix de l’essence achetée dans le cadre du quota subventionné pour les particuliers a lui augmenté de 10.000 à 15.000 rials (de 8 à 11 centimes d’euros).

Selon les nouvelles règles, ce quota est égal à 60 litres d’essence pour les propriétaires de voitures, à 25 litres pour ceux de motos et à 400 litres pour les conducteurs de taxis.

L’agence Fars informe que près de 87.500 personnes ont participé en deux jours aux actions de protestation qui ont suivi l’annonce de la hausse du prix de l’essence. Des manifestants ont attaqué des banques, des boutiques et des magasins privés. Un millier de personnes ont été interpellés.

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