Dans un entretien accordé à The Economist, Emmanuel Macron a dénoncé le désengagement américain vis-à-vis des alliés de l’Otan et «la mort cérébrale» de l’Alliance. Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, y a immédiatement réagi, accusant d’«irresponsabilité» le Président français et qualifiant de «dangereuse» son évaluation du bloc.
L’Europe de plus en plus sceptique face à l’Otan
«Compte tenu des précédentes déclarations tant de Paris, que de Berlin, l’Otan est évaluée avec de plus en plus de scepticisme ces derniers temps, et surtout avec l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche. Pour beaucoup, cela est sans doute lié à la personnalité même du Président états-unien et à ses propos impudents», a indiqué à Sputnik le politologue polonais Mateusz Piskorski.
Et de rappeler que Donald Trump avait notamment lancé une campagne de pression sans précédent sur les membres ouest-européens de l’Otan, exigeant qu’ils augmentent à 2% du PIB leurs budgets de défense et achètent des armements américains.
La Hongrie, en tant que leader de l’Europe centrale?
«Acceptant sans condition le contrôle du Vieux Monde par les États-Unis, Varsovie se sent solitaire après la déclaration de Macron sur la "mort cérébrale" de l’Otan. […] Certains représentants de la classe politique polonaise auraient par ailleurs eu peur suite à la déclaration d’Emmanuel Macron sur la nécessité d’un dialogue avec la Russie. Le parti au pouvoir Droit et justice (PiS) n’a pas apprécié non plus les propos tenus par le Président français sur son homologue hongrois Viktor Orban et Budapest, en tant que leader de l’Europe centrale. Pourtant, il [Macron, ndlr] a raison», note le spécialiste.
Pour lui, il y a aujourd’hui en Europe, un bloc pro-militaire de néoconservateurs, composé de la Pologne et des États baltes que la Roumanie rejoint parfois.
«Selon le Président français, un bloc alternatif est tout aussi possible, un bloc qui soit plus représentatif pour la région que celui qui comprend la Pologne. Il n’est pas difficile de supposer que ce bloc pourrait se former autour de la Hongrie, de la Slovaquie, de la République tchèque et des pays balkaniques», expose M.Piskorski.
Il s’agirait alors, selon ce dernier, de deux groupements diamétralement opposés: l’un qui soit souverain, réaliste et pragmatique et l’autre qui soit irrationnel, souffrant d’une multitude de phobies et dépendant entièrement de Washington.
«Dans une telle situation, pour la majorité des pays relativement indépendants de l’Europe centrale, le choix serait évident, […] et le projet de transformation de la Pologne en centre de distribution de gaz naturel liquéfié (GNL) américain serait tout bonnement compromis», relève le politologue.
Évoquant les relations entre Varsovie et Paris, il a constaté qu’elles se trouvaient en crise permanente depuis la venue au pouvoir du PiS.