La plupart des étoiles se consument sans résidus ou abandonnent progressivement leur enveloppe de gaz dans l'espace environnant pour se transformer en un objet compact de la taille d'une planète - par exemple en naine blanche. Très rarement (à l'échelle astronomique) la vie des étoiles se termine par une explosion.
Dans ce cas, les étoiles émettent une immense quantité d'énergie sous la forme de neutrinos et de rayonnement électromagnétique. Si l'explosion s'est produite assez près, depuis la Terre cet événement est visible à l'œil nu: une immense étoile lumineuse surgit alors dans le ciel, qui s'estompe en l'espace de quelques jours. On parle alors de supernova.
Les chroniques historiques contiennent des informations sur sept supernovas. L'une des plus précoces a été observée par des astronomes chinois, japonais et arabes en 1054. Elle a laissé l'un des objets spatiaux les plus étudiés:la nébuleuse du Crabe, au centre de laquelle se trouve un pulsar extrêmement agité: il réalise 33 rotations à la seconde et génère un rayonnement dans différents diapasons de longueurs d'ondes.
En 1604, une explosion de supernova a été aperçue dans la constellation du Serpentaire (Ophiuchus) par de nombreux astronomes du Moyen-Âge, notamment Johannes Kepler. L'humanité a dû attendre près de quatre siècles pour assister de nouveau à un événement d'une telle puissance.
La naissance d'une supernova
Alors qu'il travaillait dans un observatoire du Chili, le jeune astronome canadien Ian Shelton a découvert par hasard en février 1987 l'explosion d'une supernova dans le Grand Nuage de Magellan, une galaxie naine - atellite de la Voie lactée à 50 kiloparsecs de nous. L'explosion était visible à l'œil nu et a été prise en photo.
Elle est désignée par le code SN 1987A - les premières lettres signifient supernova, et la lettre A indique qu'elle a été la première découverte en 1987.
Il s'avère qu'à quelques heures de l'explosion de l'étoile, le 23 février, quatre détecteurs à neutrinos dans le monde, notamment celui de Baksan dans le Caucase, avaient enregistré des flux anormaux de neutrinos cosmiques. Le détecteur Tcherenkov Kamiokande II au Japon a même réussi à déterminer la direction de la source de l'explosion.
Les neutrinos sont un type particulier de particules fondamentales, qui interagissent très faiblement avec la matière, c'est pourquoi ils sont très difficiles à détecter. Ils naissent dans les profondeurs des étoiles suite aux réactions nucléaires et volent à la vitesse de la lumière en pénétrant tout sur leur chemin. Les capter nécessite des dispositifs très sensibles et sophistiqués.
Si l'étoile est lourde, par exemple huit fois plus que notre Soleil, sa partie centrale se densifie progressivement et une réaction thermonucléaire se lance. Avec le temps, dans un volume compact, se synthétise l'hélium, le deutérium, le carbone, l'oxygène, et ainsi jusqu'au fer. La température grandit dans le centre, le noyau lourd de l'étoile se rétrécit de plus en plus. Il se transforme en réacteur de fusion où les atomes éclatent en particules élémentaires pour former des neutrons. A cette étape se produit une émission brutale d'énergie sous la forme de neutrinos. Ces derniers peuvent être vus depuis la Terre et avertir les télescopes: «Voici les coordonnées, focalisez-vous, dans quelques heures ou jours y naîtra une supernova».
S'ensuit un effondrement rapide de l'étoile: sous l'effet de la gravitation son enveloppe extérieure implose vers l'intérieur. La luminosité de l'objet est multipliée des milliers de fois, et s'il est suffisamment proche il est visible depuis la Terre sans télescope. L'onde de choc emporte l'énergie et les restes de matière, en laissant au centre une minuscule étoile à neutrons - un pulsar. Ou un trou noir. D'autres scénarios mènent à la formation d'une étoile à quarks.
SN 1987A a résulté de la mort de la géante bleue Sanduleak. Trente ans après son explosion il n'en reste que des anneaux mystérieux et une source de rayonnement radio et X. Rien n'a encore été retrouvé en son centre. Soit il y a des nuages de gaz trop denses, soit le trou noir ne se manifeste pas, soit il n'y a rien.
Cette supernova fait partie des plus étudiées dans l'histoire de l'astronomie. Sa naissance a été observée non seulement visuellement et par les neutrinos, mais également dans différents diapasons de rayonnement électromagnétique. A l'heure actuelle, à l'endroit de l'explosion, se trouve une structure sphérique avec deux anneaux. Ils seraient restés de l'ancienne étoile, et l'onde de choc les a éclairés. Selon une hypothèse, l'anneau intérieur s'éteindra d'ici 2025.
SN 1987A rayonne encore fortement dans le diapason radio, ce qui est associé au rayonnement synchrotron engendré par l'onde de choc.
Vie et mort des naines blanches
La découverte de SN 1987A a marqué une étape importante dans l'astronomie. A présent, nos instruments étudient d'autres galaxies et les recoins les plus éloignés de l'espace. Près de 63.000 objets ont été découverts, essentiellement des résidus d'anciennes explosions. Mais parfois, on a la chance d'en observer la naissance.
Les astronomes de l'observatoire astrophysique spécial du Caucase et les membres du réseau de robots-télescopes MASTER créé par le professeur Vladimir Lipounov à l'Université d’État Lomonossov de Moscou (MGU), découvrent en régime routinier des dizaines de résidus de supernovas.
Au milieu du siècle dernier, les chercheurs ont réparti les supernovas en deux catégories: SN 1987A, née de l'effondrement gravitationnel d'une étoile massive, correspond au type II. Son spectre contient de l'hydrogène. La catégorie I, plus exactement Ia, inclut les résidus d'explosion d'étoiles mineures. Leur spectre ne contient pas d'hydrogène, ce qui témoigne d'une nature différente du phénomène.
Selon une hypothèse, les supernovas de type I se forment à partir de naines blanches. Elles sont nombreuses dans l'espace, mais toutes n'explosent pas. Le chercheur indien Chandrasekhar a déterminé qu'une naine blanche pouvait exister de manière stable si sa masse n'excède pas 1,4 fois la masse du Soleil. Dans le cas contraire, elle finit sa vie dans une explosion thermonucléaire.
Mais pourquoi une naine blanche prendrait tout à coup de la masse? Il s'avère que nombre d'entre elles gravitent en paire étroite avec un double. L'une prend progressivement de la matière à l'autre et gagne en taille. Quand elle franchit le seuil de Chandrasekhar se produit une explosion thermonucléaire. Il ne reste de l'étoile que son enveloppe qui se projette dans tous les sens. Cette hypothèse a déjà été confirmée par des observations expérimentales.
A ce type appartient, par exemple, SN 1572, une supernova qui a explosé en 1572 dans la constellation de Cassiopée. Sa naissance et son extinction ont été observées par l'astronome Tycho Brahe. Au milieu du XXe siècle, à la place de cet objet a été découverte une source de rayonnement radioactif, puis a été aperçu le résidu de la supernova dans le diapason optique.
Les supernovas de type Ia permettent une mesure précise des distances cosmologiques. Dans les années 1990 elles ont aidé à prouver que l'Univers s'élargissait en accélérant et que l'espace était rempli d'énergie noire - une substance mystérieuse poussant les galaxies.
Quand la Bételgeuse explosera
Les astronomes rêvent de voir de leurs propres yeux l'explosion d'une supernova, mais à distance sûre. Sinon, un tel événement pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour la Terre. Les géologues découvrent dans les anciennes roches et les couches de glaciers des traces éventuelles d'explosions de supernovas à des époques préhistoriques, auxquelles sont rattachées certaines des extinctions massives et des morts de civilisations. Pour l'instant, le candidat le plus plausible pour exploser dans la Voie lactée est l'objet le plus lumineux de la constellation d'Orion, Bételgeuse - une très ancienne géante rouge dont la vie pourrait s'interrompre à tout moment.
Mais il faudra certainement s'armer de patience, car les explosions dans la Voie lactée se produisent une ou deux fois tous les cent ans.
Les supernovas exercent une immense influence sur l'Univers. Elles engendrent des rayons cosmiques, affectent le gaz interstellaire et la formation de jeunes étoiles, enrichissent l'environnement en éléments chimiques, notamment lourds. Or c'est une condition primordiale pour l'apparition de la vie de type terrestre sur les planètes. C'est pourquoi autant d'efforts sont dirigés sur l'étude de supernovas. A présent, si quelque part à proximité, peut-être dans notre galaxie, commençait l'effondrement d'une étoile, les spécialistes sur Terre l'apprendraient préalablement et orienteraient les télescopes dans la bonne direction. Les chercheurs espèrent également observer les ondes gravitationnelles liées à la naissance d'une supernova.