Algérie: les magistrats corrompus dans le viseur du nouveau ministre de la Justice

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Le nouveau ministre algérien de la Justice a annoncé vouloir mettre un terme à la corruption dans son département en s’attaquant aux magistrats corrompus. Il a affirmé sa volonté de les combattre sans «complaisance, ni tolérance», afin de rétablir la confiance des Algériens dans les institutions de l’État.

Dans le cadre de la lutte contre la corruption, après les oligarques et les responsables politiques, Belkacem Zaghmati, le nouveau ministre algérien de la Justice et garde des Sceaux, a annoncé, jeudi 22 août, lors d’une conférence de presse, sa décision de purger le secteur de la Justice de la corruption en menant une guerre sans merci aux magistrats véreux. Dans le sillage de la mise sous mandat de dépôt de l’ex-ministre de la Justice de Bouteflika, Tayeb Louh, la nouvelle dynamique insufflée par M.Zaghmati s’avère cruciale pour l’organisation de la prochaine élection présidentielle, seule voie de sortie, selon le chef de l’État par intérim, Abdelkader Bensalah, et le haut commandement de l’armée, de la crise politique qui secoue le pays depuis le 22 février.

Le ministre a identifié trois niveaux de corruption dans le corps de la magistrature algérien, affirmant que «c’est un fléau qu’il faut combattre, sans complaisance, ni tolérance», sur un ton ferme.

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«Il y a des magistrats qui prononcent des jugements excellents et avec un haut degré d’intégrité des procédures et de l’application de la loi, mais malgré cela leurs jugements sont frappés de suspicions parce que celui qui les a prononcés a un comportement suspect», a-t-il affirmé.

Pour la deuxième catégorie, M.Zaghmati a pointé des «jugements et des décisions judiciaires prononcés par des magistrats réputés pour leur droiture», relevant, néanmoins, que leur contenu est «faible», et restent en-deçà de ce qui est demandé et prévu par la loi.

Enfin, le ministre a mis dans son viseur la «troisième catégorie de magistrats au comportement suspect», et qui «prononcent des jugements de piètre qualité».

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Par ailleurs, M.Zaghmati a relevé que la corruption, qui a gangrené l’administration et les services publics, a cassé la confiance des citoyens envers leur État. Dans ce cadre, le jeudi 15 août, Belkacem Zaghmati a limogé le procureur de la République du tribunal de Tlemcen et a suspendu deux magistrats. Le premier, exerçant au tribunal d’El Harrach, à Alger, pour non-respect du devoir de réserve et usurpation d’identité. Le second, exerçant à la cour de Tiaret, pour abus de fonction et comportements inappropriés touchant à la réputation de la justice.

Récupérer l’argent de la corruption

Le nouveau ministre algérien de la Justice a affirmé devant la presse à l’occasion de l'installation de la nouvelle présidente du Conseil d'État, que le fléau de la corruption en Algérie «ne se limite pas au détournement des deniers publics et à l'enrichissement illicite mais s'étend au détournement des biens publics par des décisions émanant de l'administration».

«Les administrations et les services publics ne sont pas épargnés par ce phénomène qui a terni leur réputation et celle de leurs fonctionnaires», a-t-il ajouté, instruisant la justice administrative, avec le Conseil d'État en tête, de lutter efficacement et fermement contre ce fléau.

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Évoquant le rôle des juges dans le dénouement de la crise politique qui secoue l’Algérie depuis le 22 février, date du début du mouvement populaire de contestation, le garde des Sceaux a mis en garde que «la justice est aujourd'hui à la croisée des chemins». «Attendue par tous, pouvoir et peuple, elle doit restaurer l'autorité de l'État et consacrer les droits des citoyens», a-t-il affirmé, soutenant que «la conjoncture difficile que traverse le pays fait reposer sur le Conseil d'État une énorme responsabilité pour contribuer efficacement à la lutte contre ce phénomène et contre les détournements de biens publics par des procédés frauduleux et des décisions illicites qui en résultent».

Le rôle de l’armée dans la lutte contre la corruption

Dans un entretien accordé à Sputnik, Ali Benouari, ancien ministre algérien du Trésor (1991-1992), président du parti Nida El Watan, a expliqué la position difficile dans laquelle se trouve l'armée algérienne pour répondre aux revendications de la révolution populaire et accompagner en même temps la justice dans la lutte contre la corruption, tout en restant dans le cadre de ses prérogatives constitutionnelles.

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«Le plus grand danger pour la transition démocratique en Algérie est l’argent sale, qui se compte par milliards de dollars et par dizaines de milliers de milliards de dinars», a-t-il affirmé. «L’arrestation des oligarques, tant qu’ils ne sont pas jugés, n’élimine pas cette menace», a-t-il ajouté. Selon lui, «il faudrait donc, à titre conservatoire, geler les avoirs des personnes incriminées, aussi bien en Algérie qu’à l’étranger, en vertu des accords d’entraide judiciaire qui nous lient à la Suisse et à d’autres pays. Il faudrait également nommer, en attendant les décisions de justice, des administrateurs provisoires à la tête des entreprises appartenant aux oligarques, pour qu’elles puissent continuer à fonctionner sans préjudice pour l’économie nationale et les employés».

L’ex-ministre du Trésor a indiqué un second danger qui complique la transition qui «est l’urgence dans laquelle se trouve le pays pour se doter rapidement de structures politiques représentatives, en raison de la crise économique». «Si on tarde plus de six mois, la transition elle-même sera compromise», a-t-il averti, soulignant qu’«on pourrait ainsi comprendre la préoccupation de l’état-major de l’armée qui craint justement qu’un processus transitionnel classique ne puisse durer au-delà de ce délai critique». «Peu d’Algériens semblent faire le lien entre ceci et cela», a-t-il poursuivi.

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