De nombreuses voix se font entendre suite aux tueries de masses d’el Paso et Dayton ce 3 et 4 août, mais il en est une qui résonne plus que les autres: celle de Barack Obama. Silencieux depuis qu’il a quitté ses fonctions, le 44e président des Etats-Unis ne prend que très rarement position dans le débat public, plutôt cantonné au travail de sa Fondation Obama.
Néanmoins, celui qui avait versé des larmes en conférence de presse après une de ces tueries de masse, n’a pas pu rester silencieux après cet énième bain de sang. Et ce, en mettant en cause, avec un lexique à peine masqué, son successeur Donald Trump:
«Nous devons rejeter tout ce vocabulaire sortant de la bouche de nos leaders qui nourrit un climat de peur, de haine ou qui normalise le sentiment de racisme; les leaders qui diabolisent ceux qui ne nous ressemblent pas, qui suggèrent que les autres, les immigrants menacent notre mode de vie.»
En cause: la banalisation d’un discours, qu’il qualifie de raciste et dont il rappel, avec gravité, qu’il a déjà mené aux pires atrocités dans l’histoire récente de l’humanité.
«Ce langage n’est pas nouveau -il a été à la racine des pires tragédies humaines à travers l’histoire. Il est à la racine de l’esclavage et des lois Jim Crow, de l’Holocauste, du génocide rwandais et du nettoyage ethnique dans les Balkans», souligne Barack Obama.
Durant sa campagne et ensuite sa présidence, le 45e Président des Etats-Unis a été accusé à de nombreuses reprises d’entretenir un discours «raciste», «xénophobe» et bien d’autres qualificatifs du même registre. Au mois de juillet dernier par exemple, Donald Trump avait défrayé la chronique en multipliant les tweets invitant certaines parlementaires démocrates à «retourner d’où elles viennent».
Suite à la tuerie d’El Paso c’est surtout le terme «d’invasion», souvent utilisé par Donald Trump, qui est mis en cause. En effet, le tueur a fait référence dans son manifeste à ce terme régulièrement employé par Donald Trump. Un lexique qui selon le Président Obama «n’a aucune place dans la politique et la vie publique» américaine.
The Mayor of Tijuana, Mexico, just stated that “the City is ill-prepared to handle this many migrants, the backlog could last 6 months.” Likewise, the U.S. is ill-prepared for this invasion, and will not stand for it. They are causing crime and big problems in Mexico. Go home!
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) November 18, 2018
En effet, quelques minutes avant le drame d’El Paso, un manifeste est apparu en ligne signé par le tueur justifiant son action par la crainte d’une «invasion hispanique du Texas» et d’un «grand remplacement». Une dimension idéologique proche de la tuerie de Christchurch en Nouvelle-Zélande qui avait fait 51 morts et 49 blessés.
Un document de quatre pages circule, non confirmé mais attribué au tireur d’El Paso.
— Nicolas Henin (@N_Henin) August 3, 2019
Il commence par un hommage au tireur de Christchurch et présente la lecture du « Grand remplacement » comme une révélation...
Le sujet du contrôle de l’accès aux armes à feu a été, de son propre aveu, un des plus grands regrets du Président Obama durant sa présidence. Un manque de contrôle qu’il n’oublie pas de souligner dans son post, mais qui est marginal par rapport à l’attaque frontal envers son successeur.
Depuis le début de l’année 2019, l’organisation à but non-lucratif Gun Violence Archive recense pas moins de 255 tueries de masse aux Etats-Unis. Ces carnages ne sont pas nouveaux dans le pays où les armes sont en vente libre, mais les motifs de celui d’El Paso le 3 août dernier le sont.