La Chine s'oppose à la transformation du traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) en accord multilatéral. C'est ce qu'a déclaré la porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois Hua Chunying. Plus tôt, le ministre japonais des Affaires étrangères Taro Kono avait proposé de créer à la place du FNI une nouvelle structure qui inclurait les cinq pays du «quintet nucléaire», rappelle le site de la chaîne RT.
La même initiative a été avancée par Donald Trump. D'après Hua Chunying, de telles déclarations sont appelées à détourner l'attention du retrait américain unilatéral du traité existant avec la Russie. Selon les experts, la préparation d'une version multilatérale du FNI demandera des années, et actuellement Pékin ne voit aucune raison de participer à ce processus.
La Chine n'a pas l'intention de participer à la nouvelle structure qui pourrait remplacer le traité FNI. C'est ce qu'a déclaré la représentante de la diplomatie chinoise Hua Chunying en commentant la proposition du chef de la diplomatie japonaise Taro Kono.
«En ce qui concerne un FNI multilatéral, nous avons déjà dit qu'il s'agissait d'un traité bilatéral conclu entre la Russie et les Etats-Unis. Si ce traité devenait multilatéral, il affecterait de nombreuses questions politiques, militaires et juridiques complexes. La partie chinoise n'est pas d'accord avec cela», a expliqué la diplomate.
Ce lundi 29 juillet, le ministre japonais a déclaré que c'est un format multilatéral avec la participation de tous les pays du «quintet nucléaire», la Chine y compris, qui contribuerait au désarmement nucléaire rapide.
«Nous pensons que ce traité (FNI) est important du point de vue de la contribution au désarmement non seulement pour le Japon, mais également pour le monde. Cependant, il existait des périodes quand les pays auxquels ce traité ne s'étendait pas continuaient d'accroître leurs armements. Je pense que quand ce traité cessera d'exister, il faudra créer une nouvelle structure orientée sur tous les membres du quintet nucléaire», a déclaré Taro Kono dans une conférence de presse.
Les excuses de Washington?
Les propos du ministre japonais ont été perçus par Pékin comme une tentative de justifier le retrait des Etats-Unis du traité existant.
«Ce n'est qu'une excuse pour le retrait unilatéral des USA du traité», a souligné Hua Chunying. Selon elle, le format bilatéral du traité doit être maintenu pour soutenir la stabilité stratégique mondiale.
«Nous espérons que la Russie et les Etats-Unis pourront régler leurs différends par le dialogue, feront des efforts pour maintenir le traité. C'est important pour maintenir la stabilité stratégique globale et la paix régionale», a déclaré la porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois.
A cet égard, elle a suggéré au ministre japonais des Affaires étrangères de «persuader les USA de ne pas se retirer du traité».
Comme l'a expliqué Alexeï Podberezkine, directeur du Centre d'études militaro-politique affilié à l'Institut des relations internationales de Moscou (MGIMO), le traité bilatéral russo-américain sur les forces nucléaires à portée intermédiaire ne correspond pas aux intérêts chinois.
«Il existe un problème car ce traité tiendrait compte des potentiels de l'Inde, du Pakistan et de la Corée du Nord. Il y a beaucoup de "mais", et tous ces "mais" rendent la possibilité de tels accords extrêmement problématique», a-t-il déclaré à RT.
L'absence d'un profit concret d'un éventuel accord pour la Chine a été également pointée par Vladimir Batiouk, directeur du Centre d'études militaro-politiques de l'Institut d'études des Etats-Unis et du Canada affilié à l'Académie des sciences de Russie.
«Pékin ne voit pas de raison d'adhérer à ce traité américano-soviétique sur les missiles. La Chine a ses propres préoccupations en matière de stabilité stratégique et de sécurité, qui sont dues essentiellement à la politique américaine en termes de création de systèmes stratégiques de défense antimissile. Toutes les bases américaines dotées de tels systèmes capables d'intercepter les ogives des missiles intercontinentaux sont déployés dans la région Asie-Pacifique. Et Pékin ne croit pas à l'affirmation américaine que tout cela est dirigé contre la Corée du Nord», explique l'expert à RT.
Le transfert de la culpabilité?
Il est à noter que l'adhésion de la Chine à l'accord sur le contrôle des armes n'est pas soulevée pour la première fois depuis que les Etats-Unis ont fait part de leur intention de se retirer du FNI. Début avril, Donald Trump a appelé la Chine à ne pas dépenser de l'argent pour l'armement, et en mai il affirmait que Pékin voudrait participer au futur accord entre les Etats-Unis et la Russie.
Cependant, Pékin considère toutes ces déclarations comme l'intention de Washington de rejeter la responsabilité pour le retrait du traité FNI.
«La véritable raison de la sortie des Etats-Unis du traité FNI, consistant à esquiver aux restrictions et en faisant de la Chine la cause de cette démarche, est complètement infondée, et les autorités chinoises le rejettent. En ce qui concerne la proposition américaine pour la participation de la Chine aux négociations russo-américaines et au traité, je pense que c'est également un transfert de la culpabilité», a déclaré la porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois.
Cette dernière a ajouté que les Etats-Unis disposaient du plus grand arsenal nucléaire. C'est pourquoi, affirme-t-elle, c'est sur les Américains que repose une responsabilité particulière dans le désarmement nucléaire.
Selon les experts, la Chine s'oppose à la participation à de tels accords car elle ne veut pas se résigner au contrôle américain.
D'après le politologue militaire Andreï Kochkine, responsable de la chaire de politologie et de sociologie à l'université d'économie russe Plekhanov,
«la Chine ne veut pas être soumise à un audit balistique et nucléaire, comme le souhaitent les Etats-Unis, qui plus est quand la tension monte entre ces pays, notamment après le déclenchement de la guerre commerciale par Donald Trump. Quand ils proposent un traité global multilatéral, il faut déterminer pendant un sommet sérieux le cercle des Etats qui doivent y participer. La préparation d'un tel document prendrait des années. Certes, c'est un thème progressif, mais aujourd'hui la Chine ne voit aucune nécessité d'y participer».
L'expert a noté que toutes les initiatives du gouvernement américain en ce sens n'ont qu'un seul objectif – limiter le potentiel de la Chine. De plus, estime le politologue, Donald Trump utilise l'implication de Pékin dans le traité pour promouvoir son image en prévision de la présidentielle américaine.
«Il est important pour lui (Donald Trump) de proposer avant les élections une sorte de projet planétaire grandiose mené par les Etats-Unis», a conclu l'expert.
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