362 écoles rurales fermées: «l’école, c’est la condition de survie du village»

© AFP 2024 Thomas Samsonsalle de classe
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Fin juin, 112 écoles de village ont fermé leurs portes pour de bon tandis que 250 vont être fusionnées. Nécessité logistique ou abandon de la ruralité par les services publics? Le débat fait rage. Sputnik fait le point avec Pierre Favre, vice-président du Syndicat National des Écoles.

«Ce qui est en cours de discussion au Parlement est de ne plus avoir d’ici à la fin du quinquennat de nouvelles fermetures ni d’hôpitaux ni d’écoles sans l’accord du maire.»

Alors que 362 écoles seront fermées ou fusionnées à la rentrée 2019 dans les zones rurales, la promesse lancée par Emmanuel Macron dans la foulée du Grand débat national sonne très creux. Mais un auditeur attentif aura relevé la condition qui change tout: «sans l’accord du maire».

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En tout état de cause, la décision de supprimer classe et établissements dans les villages fait polémique. Pour une partie des observateurs, elle coule de source dans certains cas, au vu de la taille des classes en question. Pierre Favre, vice-président du Syndicat National des Écoles, contacté par Sputnik France explique:

«Il y a des classes avec deux élèves et d’autres dans la ville à côté avec 35 élèves. Un poste avec deux élèves qui ont cours le matin et font la sieste l’après-midi, pour moi, en tant que syndicaliste, ça ne tient pas la route», analyse-t-il, avant de nuancer sur la forme, fustigeant «l’imprudence du Président qui, par son effet d’annonce, a fait de la “politique” et qui aurait dû être plus raisonnable, car il savait bien qu’il ne serait pas possible de ne fermer aucune école.»

Pour pallier cette situation d’écoles à classe unique ou avec des classes comptant trop peu d’élèves, le ministère a une solution: les Regroupement Pédagogique Concentrés (RPC). Ceux-ci associent plusieurs écoles de différentes communes dans des structures plus modernes et qui ont une capacité d’accueil plus importante.

Une solution qui ne passe pas pour tout le monde, notamment pour les premiers concernés: chez des parents d’élèves, chez des professeurs qui dépendent de ces écoles, cette décision a suscité l’indignation. Citée par Le Parisien,

Cindy Robert, parent d’élève de Oisemont dans la Somme regrette «l’identité» des écoles rurales alors que «plus personne ne se connaît. À la première réunion de rentrée ici, je me suis sentie perdue dans la foule.» L’école, dit-elle, est devenue «un drive»: «On se gare, on charge les enfants et on repart.»

En effet, dans ces villages où les services publics se font de plus en plus rares, où il faut parcourir des dizaines de kilomètres pour avoir accès aux soins ou à l’éducation, certains déplorent que l’État déserte ces territoires, et en particulier ferme les écoles. Au micro de Sputnik France, Pierre Favre décrypte l’importance de ces établissements dans ces zones rurales:

«Dans 90% des cas, les maires s’opposent à une fermeture, car pour beaucoup de maires, l’école, c’est la condition de survie du village. C’est à cette condition que des jeunes couples s’installent, qu’on revitalise un village, qu’on fait venir des entreprises», indique le syndicaliste.

 De gauche à droite de l’échiquier politique, nombreux sont ceux qui dénoncent depuis le début du quinquennat d’Emmanuel Macron son orientation politique favorable aux grandes métropoles. Par exemple, c’est sur cet «oubli» des zones rurales que surfe une partie de l’opposition, notamment le Rassemblement National (RN), vainqueur aux Européennes de mai, qui met en avant le «localisme» pour redonner vie aux campagnes.

​Afin de ne pas véhiculer cette image d’un pouvoir trop centralisé, trop parisien, le gouvernement a cependant pris soin de ne pas prendre la décision de manière unilatérale et d’y associer les maires. La consultation avec les élus locaux devient ainsi le point névralgique de cette décision du ministère de l’Éducation nationale. Interrogé par Europe 1, Nicolas Soret, président socialiste du pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) du nord de l’Yonne remet en cause une consultation qui participe à mettre les maires devant le fait accompli:

«Certains maires ont eu le temps de travailler leur projet de fermeture, mais d’autres l’ont fait sous la contrainte. Il faut savoir comment on obtient l’avis des maires. Dans certains cas, on leur dit: “De toute façon, il n’y aura pas d’enseignants devant vos élèves, donc regroupez-vous”» explique l’élu socialiste, avant d’ajouter «Dans les 400 écoles, le ministre trouvera évidemment des élus qui sont d’accord. Mais il faut avoir une vision beaucoup plus globale. C’est bien parce que l’on a affaibli la ruralité depuis de nombreuses années et que l’on a du mal à attirer des jeunes ménages que l’on ferme des classes. Et lorsqu’on ferme des écoles, on nuit à la ruralité.»

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