De fortes pluies se sont abattues sur la capitale malienne, Bamako, le jeudi 16 mai 2019 avant l'aube, après plusieurs semaines d'une chaleur intense en plein ramadan, selon divers témoignages recueillis par Sputnik. Elles ont causé des inondations dans plusieurs quartiers de la ville, qui ont provoqué plusieurs décès, des blessés et d'importants dégâts matériels. Dans un communiqué diffusé sur le site de la Primature, le gouvernement malien a évoqué 15 morts et deux blessés:
«Un bilan provisoire arrêté à 10H00 [GMT le 16 mai 2019, ndlr] fait état de 15 personnes décédées» recensées dans quatre quartiers différents de la capitale. «À ce sinistre bilan, s'ajoutent deux blessés», est-il précisé.
«Les sinistrés ont été provisoirement relogés dans des écoles. Ils ont reçu une aide alimentaire avec des kits de couchage et d'autres matériels», a écrit Michel Sidibé.
Aux informations de 13h00 de vendredi, la télévision publique malienne ORTM a rapporté 16 morts, citant un communiqué officiel. Des médias privés locaux et internationaux ont donné un décompte plus élevé, allant jusqu'à 24 morts mais ce bilan n'avait pu être confirmé par Sputnik le 17 mai au soir.
Des images diffusées par l'ORTM ou partagées via WhatsApp montrent des habitations effondrées ou envahies par les eaux, des voitures submergées ou emportées, tout comme d'autres biens. Certains Bamakois, interrogés par les médias locaux, ont expliqué avoir été surpris par les pluies, survenues alors que toute leur famille dormait.
Moussa Touré, responsable du Réseau d'observation et des prévisions météorologiques de Mali-Météo, a expliqué à Sputnik que l'effet de surprise avait été important parce que les précipitations enregistrées étaient non seulement en avance sur l'hivernage (la saison des pluies) mais ont en outre été plus abondantes que celles mesurées lors d'une saison normale.
Il a plu le jeudi 16 mai «de 03h00 jusqu'à 09h00» environ à Bamako, où «le début de l'hivernage est la première décade du mois de juin, normalement», a expliqué M.Touré.
Selon lui, une des stations de Mali-Météo a enregistré jusqu'à «138 mm de pluies», ce qui dépasse de loin l'un des seuils d'alerte pour la ville, qui est de 73 mm. Les quantités de précipitations mesurées ici «sont classées comme un des évènements extrêmes» par les météorologues.
«On peut l'attribuer aux changements climatiques parce que c'est un cas extrême qui vient en début de saison des pluies. Il y a un effet de surprise qui est là», a ajouté le prévisionniste, estimant que cela a contribué à alourdir le bilan.
La surprise de fortes pluies tombées en avance, «ça, c'est un aspect. Le second aspect, c'est que les gens ne sont pas préparés pour la saison hivernale. Les caniveaux sont bouchés et, au-delà du non-curage des caniveaux, les habitants sont installés d'une façon anarchique au niveau des lits des marigots», a-t-il ainsi déclaré à l'ORTM.
Cet aspect a aussi été implicitement évoqué par Boubou Cissé, le Premier ministre malien, dans un message de condoléances à la suite des inondations, invitant au respect des normes en matière de logement.
«J'appelle chacun de nos compatriotes à observer avec rigueur les consignes de sécurité et d'interdiction érigées contre les installations anarchiques d'habitation dans les zones à risque», a déclaré M.Cissé dans ce texte daté du 16 mai.
Le Premier ministre a rendu visite aux sinistrés le vendredi 17 mai, selon la Primature.
Ces dernières années, des inondations dues à des pluies diluviennes ont causé la mort et la perte de domicile de plusieurs personnes à Bamako, mais celles du 16 mai font partie des plus importantes si l'on comptabilise les décès survenus en l'espace de quelques heures.
Ces précipitations sont tombées après de fortes chaleurs en plein ramadan, le mois de jeûne des musulmans. Moussa Touré, de Mali-Météo, a parlé à Sputnik d'un record depuis 29 ans à pareil moment de l'année.
«Cette année, nous avons enregistré des températures proches du record au mois de mai. Au début du mois de mai, nous avons eu des températures dépassant 43°C (à l'ombre) à Bamako, ce qu'on n'a pas observé depuis 1990. Ça, c'est typiquement les effets des changements climatiques à ce niveau», a-t-il ajouté.
Selon lui, les quantités de pluie mesurées le 16 mai sont proches «des épisodes pluvieux assez importants en début de saison» en 1994 et en 2000. Pour 2019, les prévisions laissent présager une abondance de pluies dans le sud et l'est du pays, et un déficit dans l'ouest.
«Cette année, nous avons fait les prévisions saisonnières, dans lesquelles nous avons dit qu'au sud et à l'est du Mali, nous allons avoir des quantités supérieures à la normale, et à l'ouest, des quantités inférieures à la normale. Cela suppose qu'à l'ouest, nous allons être confrontés surtout à des problèmes de sécheresse et au sud et à l'est, surtout à des problèmes d'inondations», a-t-il prévenu.
La canicule de 2019 a même inspiré Sidiki Diabaté, chanteur et musicien idole des jeunes: il a sorti un court morceau intitulé «Dji kè n'kunkolo kan» («Verse de l'eau sur ma tête», en bambara) dans lequel il chante notamment:
«Le soleil est ardent / L'eau est fraîche / Verse de l'eau sur ma tête, vite! / Je suis la proie du soleil / J'ai faim, j'ai soif / J'ai jeûné.»
Dans un message vidéo, Sidiki Diabaté a lancé un «challenge» sur le mot d'ordre de sa chanson, poussant ses admirateurs à s'en donner à cœur joie avec des vidéos amusantes comme ici.
Selon des estimations officielles, Bamako compte près de 3 millions d'habitants, soit près de 19% de la population totale du Mali (plus de 15,8 millions).