L’Équateur a retiré jeudi 11 avril le statut d’asile diplomatique à Julian Assange après avoir hébergé le créateur du site lanceur d’alerte WikiLeaks pendant près de sept ans. Voici quelques volte-face et exemples de maquignonnage politique qui ont marqué l’histoire.
Julian Assange vs l’Équateur
Réfugié depuis 2012 à l'ambassade d'Équateur à Londres, le fondateur du site WikiLeaks, Julian Assange, a été arrêté jeudi 11 avril. Selon Wikileaks, l'ambassadeur équatorien a «invité» la police pour l'arrêter. Pourtant, le 5 avril, l’Équateur avait qualifié de «rumeurs, hypothèses et conjectures» les informations sur l’imminente «expulsion» de M.Assange diffusées par WikiLeaks.
Après l’arrestation de Julian Assange, l'ex-Président équatorien Rafael Correa a accusé son successeur Lenin Moreno d’en être responsable, le qualifiant de «plus grand traître de l'histoire latino-américaine».
M.Moreno a pour sa part affirmé que l'asile a été retiré à Julian Assange «pour avoir violé à plusieurs reprises les conventions internationales et le protocole de cohabitation».
Nicolas Sarkozy vs Mouammar Kadhafi
En mars 2018, l'ex-Président a été mis en examen pour «corruption passive», «financement illégal de campagne électorale» et «recel de détournement de fonds publics libyens». L'enquête sur les accusations d'aide financière de Kadhafi au siège de campagne de Nicolas Sarkozy a été ouverte en 2013. Dans un enregistrement audio réalisé en mars 2011, quelques jours avant les premières frappes contre la Libye, et publié par France 3 en 2014, le colonel Kadhafi affirmait qu’il se sentait trahi par M.Sarkozy dont il avait financé la campagne présidentielle. Selon lLe Monde, Bachir Saleh, qui était à l'époque à la tête du Fonds souverain libyen du bien-être national, a confirmé que Mouammar Kadhafi avait bien financé la campagne de Sarkozy.
En novembre 2016, l'entrepreneur franco-libyen Ziad Takieddine a déclaré au site d'information Mediapart qu'en 2006-2007, il avait personnellement remis à M.Sarkozy et au chef de son siège Claude Guéant trois valises remplies de billets de 200 et de 500 euros. Ziad Takieddine affirmait que cet argent venait de Kadhafi et que la somme totale atteignait 5 millions d'euros.
Dans une interview accordée le 6 avril 2019 la chaîne italienne Sky TG24, le président du Parlement européen Antonio Tajani a accusé Nicolas Sarkozy d’être derrière le meurtre de Mouammar Kadhafi. «Sarkozy était l'un des protagonistes de la chasse à [Mouammar] Kadhafi et de son meurtre avec les Américains et les Britanniques», a-t-il déclaré.
Maréchal Pétain, un allié caché du général de Gaulle?
Du vainqueur de la Grande Guerre au chef réactionnaire d’une France humiliée par l'occupant allemand, Philippe Pétain laisse une image contrastée. Dans la mémoire nationale, il incarne à la fois la victoire de 1918, la honte de l'été 1940 et les crimes de Vichy.
Le 7 novembre 2018, le Président Macron a justifié qu’un hommage soit rendu à Pétain pour le rôle qu'il a joué dans la Grande Guerre. D'après lui, le dirigeant vichyste a été «un grand soldat» pendant la Première Guerre mondiale, mais a «conduit des choix funestes» pendant la Seconde. Réagissant à la polémique provoquée par Macron, Benjamin Griveaux a assuré les Français qu’il n’avait «jamais été question» de le faire, contrairement à l'annonce faite par le Président.
Mikhaïl Gorbatchev vs l’Otan qui ne s’élargira jamais vers l’Est
Dans un article publié en avril 2019, le magazine The National Interest a de nouveau rappelé cette histoire: peu de temps avant l'effondrement de l'Union soviétique, le Président américain George H.W.Bush, la Première ministre britannique Margaret Thatcher, le Président français François Mitterrand, le chancelier allemand Helmut Kohl et les ministres des Affaires étrangères de ces pays ont déclaré que les anciens pays membres du pacte de Varsovie ne pourraient pas adhérer à l'Organisation du traité de l'Atlantique nord.
Dès 1997, la Pologne, la République tchèque et la Hongrie étaient invitées à rejoindre l'Otan et au total, 13 États européens l’ont été par la suite.
Brutus, traître ou héros?
Trahir ou tromper pour des raisons politiques est une méthode vieille comme le monde. Le 15 mars 44 av.J.C, le sénateur romain Marcus Junius Brutus faisait partie des membres d’un coup d’État contre Jules César qui considéraient que la toute-puissance de César ne pouvait être que nuisible à l'avenir de Rome.
Il aurait porté le dernier coup à César qui le considérait comme son propre fils et lui avait pardonné d’avoir combattu aux côtés de Pompée contre les légions de César dans la guerre civile. César, au moment de mourir, le voyant parmi les conjurés, se serait alors écrié en grec («Kaì sú, téknon», en latin «Tu quoque mi fili»), signifiant «Toi aussi, mon fils».
Suite au meurtre de César, Brutus et ses compagnons ont essayé de rallier le peuple de Rome à leur cause, mais en vain. Ils ont été contraints de fuir le pays. Brutus s’est réfugié sur le Capitole avec les conjurés et a fini par rejoindre Athènes, puis sa province de Crète. Poursuivi et vaincu par le général Marc Antoine, Brutus s’est suicidé le 23 octobre 42 av. J.-C.
Pirouettes et duplicité sont la marque de fabrique du monde politique. En 1513, Nicolas Machiavel a déclaré dans Le Prince:
«Un souverain prudent ne peut ni ne doit observer sa foi quand une telle observance tournerait contre lui et que sont éteintes les raisons qui le firent promettre».
Cet ouvrage resterait le livre de chevet de nombreux personnages présents sur le devant de la scène politique.