Lors d'un entretien avec le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, le secrétaire d'État américain, Mike Pompeo, a mis mercredi en garde son interlocuteur au sujet de «conséquences potentiellement dévastatrices d'une action militaire turque unilatérale» en Syrie et a fait savoir une nouvelle fois à Ankara l'inquiétude de Washington face à «un éventuel achat par la Turquie du système de défense russe S-400».
Le général de brigade à la retraite Naim Babüroglu, expert en stratégie militaire et professeur à l'université d'Istanbul, a constaté dans une interview à Sputnik que la déclaration de Mike Pompeo revêtait un caractère ouvertement menaçant et était contraire au protocole diplomatique.
«Le recours à une telle rhétorique par un pays membre de l'Otan est absolument inacceptable», a-t-il noté.
Cemal Bekle, porte-parole de la commission parlementaire de défense nationale de Turquie, député du Parti de la justice et du développement (AKP, au pouvoir), a lui aussi commenté pour Sputnik ces propos.
«Nous estimons erronée […] la position des États-Unis qui exigent que la Turquie, qui possède d'importants engagements dans le cadre de l'Otan, se conforme unilatéralement aux principes d'allié. Nous sommes certains que les déclarations du département d'État doivent être faites dans l'esprit de relations d'alliés entre nos pays et en conformité avec celles-ci», a-t-il noté.
Cemal Bekle a mis en relief l'importance de la Turquie en tant qu'allié de l'Otan.
«Aujourd'hui, lorsque les relations entre la Turquie et les États-Unis jouent un rôle particulier pour l'avenir de l'Otan, une grande importance revient aux déclarations de Mevlut Cavusoglu au cours de la réunion, à Washington, des chefs de la diplomatie des pays membres de l'Alliance», a-t-il ajouté.
«Après ce déplacement, Ankara devrait examiner l'adoption de sanctions contre les bases et d'autres ouvrages US en Turquie», a-t-il fait remarquer.
Les États-Unis exercent des pressions sur la Turquie pour qu'elle renonce à l'acquisition des systèmes russes S-400, menaçant de refuser de lui livrer des chasseurs F-35.
Lors de la réunion ministérielle de l'Alliance tenue le 4 avril à Washington, à l'occasion du 70e anniversaire de ce bloc militaire, son secrétaire général, Jens Stoltenberg, a reconnu qu'il s'agissait «d'un sujet de grand désaccord entre les alliés de l'Otan».
Signé fin 2017, le contrat russo-turc sur les S-400 prévoit la livraison de ces systèmes pour juillet 2019. Le ministre turc de la Défense nationale, Hulusi Akar, a récemment annoncé que la Turquie commencerait à déployer les S-400 sur son territoire en octobre 2019.